Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
Vom Netzwerk:
il
     l’aida à reprendre place sur une chaise.
    — Donne-lui un verre d’eau, Mélanie, dit-il.
    — Vous aviez promis...
    — Buvez, ordonna Mélanie.
    Miss Harrington refusa. Après une grande inspiration, elle reprit des couleurs.
     Plus calme, elle murmura :
    — Emmenez-le avec vous.
    — Quoi ?
    — Je suis malade, Mélanie, très malade. Je vais mourir bientôt. Je vous en
     supplie, pour Timmy...
    — Mon ami dit qu’il aime pas être dehors tout seul.
    Timmy fit cette réflexion, la tête passée par l’entrebâillement
     de la porte. Inquiet, le fils de Miss Harrington se dandinait d’un pied à
     l’autre.
    Pierre regarda sa femme, une question muette dans les yeux. Mélanie fit signe
     qu’elle était d’accord.
    Pierre se tourna alors vers Timmy :
    — Que c’est tu dirais de faire un grand, grand voyage ?

    Toute la semaine fut consacrée à préparer le déménagement. Dominique ne
     comprenait rien à toute cette agitation, mais prenait plaisir à se cacher dans
     les boîtes de carton et les caisses. Timmy jubilait et répétait :
    — Nous partons en voyage, nous partons en grand, grand voyage !
    Mélanie s’affairait à organiser leur départ. Courageuse, elle pleurait en
     cachette la perte de son bébé, ne montrant aux autres qu’un regard voilé de
     tristesse. Il fut convenu que Pierre et sa petite famille partageraient
     l’appartement de ses parents, à Chicoutimi. Julianna s’était un peu inquiétée
     d’héberger Timmy.
    — Il n’est pas dangereux, tu es certain ?
    — Maman !
    — C’est pas après qu’il soit arrivé quelque chose qu’il faut poser la
     question.
    — Timmy a pas de malice pour deux sous.
    — Je veux bien te croire, mais de là à l’avoir sous notre toit ! Peut-être que
     sa mère savait le contenir…
    — Julianna, intervint François-Xavier, Pierre le connaît depuis des
     années.
    — À Montréal, quand j’étais jeune fille, il y en avait un de sa race qui
     habitait pas loin de notre rue.
    — Bon, tu vois.
    — Ses parents l’enfermaient dans la garde-robe ! J’avais tellement peur qu’il
     s’échappe...
    — Maman !
    — Bon, bon, ça va. J’espère qu’il ne se passera jamais rien de fâcheux.
    — De toute façon, on demeurera chez vous. C’est juste en attendant de trouver
     une autre solution.
    Le matin du départ, tous les bagages, même ceux de Timmy, étaient entassés dans
     le camion de Pierre. Près de la voiture, Julianna jouait à faire semblant
     d’attraper Dominique. Avec une si longue route en perspective, faire dégourdir
     les jambes de son petit-fils n’était certes pas une mauvaise idée ! Pierre et
     François-Xavier vérifiaient la solidité des nœuds qui maintenaient une bâche de
     toile pardessus la boîte du camion.
    — J’espère qu’on pognera pas trop de pluie… s’inquiéta Mélanie en observant le
     chargement.
    — T’en fais pas, ma belle-fille. Vos affaires sont bien protégées, la rassura
     François-Xavier.
    Miss Harrington arriva avec Timmy, qui tenait un sac brun à la main.
    — Je lui ai préparé un lunch, expliqua-t-elle. Vous savez comment il a toujours
     faim.
    L’Américaine tendit à Pierre une épaisse enveloppe.
    — Là-dedans, tu trouveras tous les papiers et documents importants se
     rapportant à Timmy. Je t’ai fait un chèque pour couvrir les frais de
     subsistance.
    — Vous étiez pas obligée.
    — Allons Pierre, c’est la moindre des choses. J’ai eu une longue conversation
     avec Timmy. Il m’a promis d’être sage. N’est-ce pas, Timmy ?
    — Nous connaissons les bonnes manières, ne pas manger la bouche
     ouverte, dire merci...
    — Oui, Timmy, c’est cela, l’interrompit sa mère.
    Miss Harrington se tourna vers Mélanie. Les deux amies se serrèrent
     chaleureusement dans leur bras.
    — Je ne veux pas que Timmy me voie pleurer... souffla l’Américaine.
    Pierre l’entendit.
    — Viens mon Timmy, j’ai besoin de ton aide pour barricader la maison.
    François-Xavier les suivit.
    — Miss Harrington, je… je sais pas quoi dire… soupira Mélanie.
    —  It’s o.k. C’est mieux pour tout le monde. Il est temps que Timmy
     laisse les jupons de sa maman. J’ai été chanceuse, je l’ai eu trente-sept ans
     pour moi toute seule. Life is life. N’oublie pas de m’écrire
     régulièrement.
    — Toutes les semaines, Miss Harrington.
    La vieille femme s’en retourna. Mélanie chassa ses larmes.

Weitere Kostenlose Bücher