Azteca
fus choqué par certains de
leurs temples dont les gouttières avaient la forme du tepuli de l’homme.
Pendant toute la saison des pluies, elles ne cessaient d’uriner.
Les Huaxteca qui vivent dans le nord-est, sur les bords de la mer
orientale, sont particulièrement grossiers en matière de sexe. J’ai vu sur
leurs temples des frises sculptées représentant toutes les positions que
peuvent prendre un homme et une femme. Chez eux, un homme pourvu d’un tepuli
plus grand que la moyenne, se promène sans pagne devant tout le monde. Cette
attitude de vantardise avait donné aux Huaxteca une réputation de virilité
exceptionnelle qui n’était peut-être pas méritée. Cependant quand il y avait
des ventes de prisonniers Huaxteca sur le marché aux esclaves, il m’est arrivé
de voir des nobles de chez nous, voilés et se tenant à l’écart, faire des
signes à leurs serviteurs pour qu’ils poussent les enchères sur tel ou tel
d’entre eux.
Les Purépecha du Michoacân, à l’ouest, sont très libres et très
indulgents dans ce domaine. Non seulement ils ne punissent pas l’acte sexuel
entre deux hommes, mais ils le pardonnent et l’acceptent. Cela transparaît même
dans leur écriture. Vous savez peut-être que le symbole du tipili de la femme
est une coquille d’escargot. Eh bien, pour écrire l’acte de chair entre deux
hommes, les Purépecha n’ont pas honte de dessiner un homme nu avec une coquille
d’escargot sur ses organes génitaux.
Quant à cet acte entre ma sœur et moi – inceste, dites-vous ? – je
crois qu’il est proscrit dans le monde entier. Oui, nous aurions risqué la mort
si on nous avait surpris. La loi prévoyait des formes de supplices
particulièrement atroces en cas de copulation entre frère et sœur, père et
fille, mère et fils, oncle et nièce, etc. Mais ces pratiques étaient seulement
interdites aux mace-hualli, qui constituaient la plus grande partie de la
population. En effet, comme je l’ai signalé tout à l’heure, certaines familles
nobles s’efforçaient de conserver ce qu’elles appelaient la pureté de leur
lignée en ne se mariant qu’entre proches parents, bien que les résultats sur
les générations postérieures n’aient jamais été très probants. Quant aux
esclaves, ni la loi, ni les traditions, ni personne en général ne se
préoccupait beaucoup de ce qui se passait chez eux, viol, inceste, adultère ou
autres choses du même genre.
Vous avez également demandé comment ma sœur et moi étions parvenus à
cacher si longtemps notre forfait. C’est que ma mère nous ayant si sévèrement
punis pour des fautes bien moins graves, nous avions appris à dissimuler. Par
la suite, il m’arriva de quitter Xaltocán pendant de longs mois ; je me
languissais alors de Tzitzi et elle se languissait de moi. Mais à chaque fois
que je revenais à la maison, je ne lui donnais qu’un petit baiser fraternel sur
la joue et nous nous écartions l’un de l’autre pour cacher notre émoi, pendant
que je racontais aux parents et aux amis avides de nouvelles tout ce que
j’avais fait pendant ce temps. Il se passait parfois plusieurs jours avant que
nous puissions trouver une occasion d’être seuls tous les deux, sans risquer
d’être surpris. Mais alors, quels débordements de caresses, quelle hâte à
s’étreindre – comme si nous étions sur un volcan en train de se réveiller – et
ensuite, des câlineries moins précipitées, des explosions plus tendres et plus
subtiles…
Mais ces absences survinrent plus tard. Auparavant, nous ne fûmes
jamais pris sur le fait. Nous aurions encouru bien des malheurs si, comme vous
autres Chrétiens, nous avions conçu un enfant à chaque fois. Cette éventualité
ne m’était jamais venue à l’esprit : comment un adolescent pourrait-il
imaginer devenir père ? Mais Tzitzi qui était une femme, était plus au
fait de ces choses et elle avait pris ses précautions. Les vieilles dont j’ai
déjà parlé vendaient secrètement aux jeunes filles célibataires – comme les
apothicaires le vendaient ouvertement aux couples mariés qui ne voulaient pas
faire un enfant à chaque fois qu’ils couchaient ensemble – une poudre tirée du
tlatlaohuéhuetl, un tubercule qui ressemble à la patate douce, mais cent fois
plus gros ; ce qu’en espagnol, vous appelez le barbasco ou bouillon-blanc.
Toute femme qui prend quotidiennement une dose de cette poudre ne court aucun
risque de concevoir un enfant non
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