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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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petits enfants, n'avait de temps à perdre dans
l'oisiveté, et il n'avait pas de camarade pour l'accompagner dans
ses excursions sans but. D'ailleurs, quand il y en aurait eu une
légion, ils n'auraient pas été tentés de le suivre. Mais il y avait
bien dans le voisinage une vingtaine de chiens errants dont il
aimait tout autant la compagnie. Il en prenait deux ou trois,
quelquefois une demi-douzaine, qui l'escortaient en aboyant
derrière ses talons, quand il partait pour quelque expédition qui
devait durer tout le jour. Et le soir, quand ils rentraient
ensemble, ils étaient tous fatigués de leur course boitillant ou
tirant la langue. Barnabé seul, debout le lendemain dès le lever du
soleil, comme si de rien n'était, reprenait, avec un cortège plus
frais, le cours de ses promenades lointaines, et revenait de même.
Dans tous ses voyages, Grip, au fond de son petit panier, sur le
dos de son maître, ne manquait pas une partie ; et, quand le
beau temps les mettait de belle humeur, il n'y avait pas un chien
dans la bande qui criât plus haut que le corbeau.
    Leurs plaisirs étaient bien simples : une
croûte de pain, avec une bouchée de viande, l'eau de la source ou
du ruisseau, suffisaient à leurs repas. Barnabé s'amusait à
marcher, à courir, à sauter, jusqu'à ce qu'il fut las ; alors
il se couchait sur l'herbe, ou le long du blé, ou à l'ombre de
quelque grand chêne, suivant des yeux les nuages qui flottaient sur
la surface d'un ciel d'azur, et écoutant le chant brillant de
l'alouette qui s'élevait dans l'air. Et puis il y avait des fleurs
champêtres à cueillir, le coquelicot d'un rouge éclatant, la
jacinthe parfumée, le coucou ou la rose. Il y avait des oiseaux à
regarder ; des poissons, des fourmis, des insectes ; des
lapins ou des lièvres qui traversaient comme une flèche l'allée du
bois et disparaissaient au loin dans le fourré. Il y avait des
millions de créatures vivantes à étudier, à épier, qu'il
accompagnait de ses battements de mains quand ils avaient fui de sa
vue. À défaut de tout cela, ou pour varier son plaisir, il y avait
le gai soleil à poursuivre à travers les feuilles et les branches
des arbres, où il jouait à cache-cache avec lui, descendant bien
avant, bien avant dans des creux semblables à une mare d'argent, où
les rameaux frémissants baignaient leur feuillage en se jouant. Il
y avait les douces senteurs de l'air par un soir d'été, quand il
avait traversé les chants de trèfle et de fèves ; le parfum
des feuilles ou de la mousse humides ; l'agitation vivante des
arbres, dont les ombres changeantes suivaient tous les mouvements.
Et puis après, quand il en avait assez de l'un ou de l'autre, ou
même pour mieux savourer sa jouissance, il fermait les yeux, et il
y avait un somme à faire au milieu de ces innocentes séductions de
la campagne, avec le doux murmure du vent dont ses oreilles
aimaient la musique, et tous les objets d'alentour dont le
spectacle et le bruit se fondaient en un sommeil délicieux.
    Leur hutte (car elle ne valait guère mieux)
était placée sur les lisières de la ville, à une petite distance de
la grande route, mais dans un endroit retiré, où il était bien rare
qu'on rencontrât, dans aucune saison de l'année, quelques voyageurs
égarés. Il y avait un petit morceau de terre qui en dépendait, et
que Barnabé, dans ses accès de travail, arrangeait ou soignait par
boutades. En dedans comme en dehors, la mère ne cessait jamais de
travailler pour leur commune subsistance : la grêle, la pluie,
la neige ou le soleil, tout cela lui était bien égal.
    Quoique déjà bien loin des scènes de sa vie
passée, bien loin surtout de songer ou d'espérer qu'elles
revinssent jamais, elle ressentait pourtant un désir étrange de
savoir ce qui se passait dans le monde d'activité auquel elle était
maintenant étrangère. Sitôt qu'il lui tombait sous la main quelque
vieux journal ou quelque bout de nouvelles de Londres, elle les
lisait avec avidité. L'impression qu'elle en éprouvait n'était pas
toujours agréable : car, dans ces moments-là, la plus vive
anxiété et les angoisses de la crainte se peignaient quelquefois
sur ses traits, mais sans lasser sa curiosité. Puis aussi, dans les
nuits de tempête, pendant l'hiver, quand le vent sifflait et
faisait rage, sa figure reprenait son expression d'autrefois, et
elle tremblait de tous ses membres, comme dans un accès de fièvre.
Mais Barnabé ne s'en apercevait

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