Bastard battle
Enguerrand tout aussi vite courrait sus et garde ouverte.
Au moment de se rencontrer, le chevalier fit dévier la pointe de la lance d’un jet de pied et brusquement, avant que l’aultre ne vide la selle, il lui flanqua un coup d’épée sur la teste qui lui enfonça tout le casque dans le crâne, lui faisant sortir la cervelle par les œilz et les oreilles, de quoi le malheureux tomba roide mort de son cheval.
Il y eut un instant un grand silence chez les supporters du Bourbon. Puis :
— Pipeur ! On combat lance conte lance !
Un aultre lieutenant fut armé. Enguerrand rejoignit son héberge, flatta son cheval, baissa le viaire de son haubert et empoigna sa lance de quatorze empans. Au signal, il s’élança sur l’adversaire qui sortit en armure complète, à fond de train, ayant pris quelque avance, et l’épée au poing haut levée. Il n’eut le loisir de l’abaisser car la lance du chevalier le prit et le transperça à travers le fer sur un empan et demi à la base du col, jusqu’au frein de l’arme. Enguerrand le traîna, dégosillant le sang, sous le haut gradin de son maistre.
— Et alors roy bastard, sont-ce là tes meilleurs chevaliers ?
— Nenni, fii de pute, s’estoient les amuses bouche. Gouste à cestui-là ! Relancourt ! À deux épées ! Enguerrand tournait bride pour rejoindre sa tente quand entra en lice en sautant la barrière ledit Relancourt, sans cotte ni haubert, mais armé de flamberge aux deux poings, chascune huit empans. Le cheval d’Enguerrand était trop lourdement caparaçonné pour faire volte face dans l’instant. Ils coururent droit sur l’héberge, le chevalier prit en se penchant sa deuxième épée, et trancha le fond de la tente qu’il traversa au galop, Relancourt à sa suite. Sur le pré ouvert, il fit tourner large son cheval et de nouveau face à l’ennemy, piqua des deux, fondit sur lui. Comme la foudre, ses deux épées croisées devant son visaige, tenant en selle par miracle, il se rua à l’assault. À l’instant de l’encontre, il fit jouer en ciseaux ses fers croisés et la tête de Relancourt qui se trouvait au milieu, sauta haut dans le ciel comme un bouchon de boyte fermentée. Sur les gradins, les gueux perdant toute prudence, hurlaient de joie. Enguerrand fonça vers eulx et les bénit de ses deux épées sanglantes.
— Et de trois, bastard ! Qu’en dis-tu ?
— Va crever !
Régnier de Montigny fut armé et cestui-là, que le bastard haïssait en secret pour cause de sa vraye noblesse, était rompu au métier et au style des armes anciennes. Ce qui changea l’allure.
Au signal les deux chevaliers s’élancèrent de concert dans la lice, portant deux lances itelles de quatorze empans, brassards, avant-braz et gantelets sans garde, plastrons et dossières sans accessoires aulcuns.
Empris du mesme feu de chevalerie les deux adversaires se touchèrent vite et violemment, au flanc pour Enguerrand qui fut déséquilibré mais resta en selle, au chef pour Régnier de Montigny et d’un tel coup que son bassinet sauta au pied des gradins. Au deuxième assault, ils se choquèrent si prochement que leurs gantelets s’agrippèrent, toutes lances brisées. Du bras gauche, Enguerrand frappa Régnier à la poitrine qui chut dans la lice. Si tôt au sol icelui cria à pied ! à outrance ! Et Enguerrand sauta incontinent de sa monture. On leur lança les épées. Ils s’en portèrent des coups terribles, redoublés, toujours sur le haut du corps, et le bruict des armes sur le fer sonnait la plaine tout entière. Régnier combattait avec beaucoup de force et de science mais Enguerrand ne s’essoufflait. À la fin, il lui tailla d’un coup le braz au défaut de l’épaule et le sang de Montigny jaillit roide et rouge dans l’air chargé de poussière. Il tomba, épuisé, hors de souffle mais pas de sens, et ainsi, couché au sol, trempé de sang, il supplia le chevalier de l’achever.
— Tue-moi ! Tue-moi, je m’égarais en vaines courses, tu m’as fait revoir la beauté, tue-moi, par pitié !
Lors Enguerrand tira sa dague et se pencha sur le chevalier vaincu. Et tout proche en sus son corps, il dit :
— Tu meurs plein d’honneur. Je t’aurais épargné si tu n’avais été qu’un maraud du bastard. Je t’excuse, tous les chevaliers qui exercent le métier des armes pour gaigner renom et réputation doivent être cruels et avoir un siège au milieu de l’enfer !
Puis il plaça la pointe de sa dague sur
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