Ben-Hur
façade septentrionale de la tour Antonia, après de nombreux zigzags s’étendait définitivement vers le sud. Le voyageur familier avec Jérusalem sait que cette rue existe encore et qu’elle fait partie de cette via dolorosa qui est, pour le chrétien, d’un intérêt plus poignant que n’importe quelle autre rue en ce monde. À l’angle formé par son dernier contour, une grande construction massive élevait deux de ses façades, celle du nord et celle de l’ouest, sur une longueur d’environ quatre cents pieds. Comme la plupart des habitations des riches Orientaux, cette maison était de forme rectangulaire, haute de deux étages et construite en énormes blocs de pierres brutes. Aucun ornement ne rompait la monotonie des murailles, à l’exception de ceux qui entouraient les montants de la porte, fermée par de lourds volets de fer, et de six fenêtres percées au second étage, deux au nord et quatre à l’ouest.
Peu de temps après avoir quitté le Romain, le jeune Juif arrivait à la grande porte et frappait à un guichet qui, presque immédiatement, s’ouvrit devant lui. Il entra et s’engagea dans un long passage voûté, des deux côtés duquel se trouvaient des bancs de pierre noircis et polis par l’usage ; au sortir de ce passage douze ou quinze marches d’escalier l’amenèrent dans une vaste cour oblongue, entourée de tous côtés par des bâtiments à trois étages.
Il y régnait une grande animation : des domestiques allaient et venaient, des poules et des pigeons picoraient sur le sol, des chèvres, des vaches, des ânes, des chevaux occupaient les stalles situées au rez-de-chaussée des bâtiments. Une muraille percée d’un passage absolument semblable à celui par lequel on y arrivait, fermait cette cour du côté de l’orient. Après l’avoir traversée, le jeune homme déboucha dans une seconde cour, spacieuse et carrée, plantée de bosquets et de plantes grimpantes. Un jet d’eau y maintenait la fraîcheur et tout autour s’étendaient des arcades garnies de stores rouges et blancs. Un escalier conduisait à une terrasse, située au premier étage de la maison ; de grandes tentes les protégeaient contre l’ardeur des rayons du soleil. Un autre escalier faisait communiquer cette terrasse avec le toit, sur les quatre côtés duquel courait une corniche sculptée et une balustrade en briques rouges. L’élégante simplicité qui régnait dans toute cette partie du bâtiment prouvait le rang élevé de la famille qui l’occupait.
Le jeune homme monta tout droit l’escalier et se dirigea vers une porte par laquelle il pénétra dans un appartement déjà envahi par l’ombre, puis il se jeta sur un divan et resta immobile, la tête cachée dans ses bras. Au bout d’un certain temps, une femme vint frapper à sa porte. Il lui cria d’entrer.
– Il fait nuit et chacun a soupé. Mon fils n’a-t-il pas faim ? demanda-t-elle.
– Non, répondit-il.
– Es-tu malade ?
– J’ai sommeil.
– Ta mère t’a demandé.
– Où est-elle ?
– Dans la tourelle, sur le toit.
Il se retourna et s’assit.
– Bien. Apporte-moi quelque chose à manger.
– Que désires-tu ?
– Ce que tu voudras, Amrah. Je ne suis pas malade, mais tout m’est indifférent. La vie ne me paraît plus aussi agréable que ce matin. Toi qui me connais si bien, tu dois savoir quels sont les aliments et les remèdes qui conviennent à ce mal-là. Apporte-moi ce que tu jugeras bon.
Les questions d’Amrah et sa voix sympathique et pleine de sollicitude caractérisaient bien les rapports qui existaient entre elle et le jeune homme. Elle posa une de ses mains sur le front de Juda, puis, satisfaite de son examen, elle s’éloigna en disant : « Je vais m’en occuper. » Elle revint bientôt, portant un plateau de bois sur lequel elle avait posé une tasse de lait, quelques tranches de pain blanc, une délicate bouillie faite de grains de froment broyés, un oiseau rôti, du miel et du sel. À l’une des extrémités du plateau se trouvaient un gobelet d’argent plein de vin, et une lampe allumée, qui éclairait les murailles soigneusement plâtrées, le plafond aux poutres de chêne, les sièges aux jambes terminées en pattes de lion, le divan recouvert d’une couverture de laine blanche, en un mot tout l’intérieur d’une chambre à coucher juive.
Amrah approcha une chaise du divan, posa le plateau dessus et s’agenouilla à côté, prête à
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