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Ben-Hur

Ben-Hur

Titel: Ben-Hur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lewis Wallace
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et la terre changent, un Juif, jamais   ! Pour lui, ni recul, ni progrès possibles, il est ce que furent ses ancêtres dans la nuit des temps. Vois le cercle que je trace là sur le sable, et dis-moi en quoi la vie d’un Juif en diffère. Isaac et Jacob sont autour et Dieu au milieu. Et encore est-il trop vaste, ce cercle.
    Il s’arrêta pour poser sur le sol son pouce qu’il entoura de ses doigts.
    – Regarde mon pouce, c’est le temple, mes doigts représentent les frontières de la Judée. Existe-t-il rien au-delà qui ait quelque valeur à vos yeux   ? Les arts   ? Hérode fut un architecte, son nom est exécré. La peinture, la sculpture   ? C’est pécher que de les regarder. Vous enchaînez la poésie à vos autels et, en dehors de vos synagogues, où donc pouvez-vous vous exercer à l’éloquence   ? Les succès remportés à la guerre durant six jours, vous les perdez le septième. Telle est votre vie, limitée de tous les côtés, et qui s’étonnera si je me ris de vous   ? Et ton Dieu, qui se contente de l’adoration d’un peuple semblable, qu’est-il donc, comparé à Jupiter, qui nous prête son aigle pour enserrer le monde   ?
    Le Juif se leva, la figure brûlante.
    – Non, non, garde ta place, Juda, s’écria Messala, en tendant la main vers lui.
    – Tu te moques de moi.
    – Écoute-moi encore. Je te suis reconnaissant de l’attention que tu as eue de me souhaiter la bienvenue, afin que nous tentions de renouer les liens d’amitié qui nous unissaient dans notre enfance. – « Va, me dit mon maître dans sa dernière leçon, et pour rendre ton nom fameux, souviens-toi que Mars règne et que les yeux d’Éros sont ouverts. » Il voulait dire que la guerre est tout, que l’amour n’est rien. Du moins en est-il ainsi à Rome. Le mariage n’est que le premier acte du divorce, la vertu un bijou dont on trafique. Je serai donc soldat, et toi, ô Juda, que seras-tu   ? J’ai pitié de toi   !
    Le Juif fit quelques pas du côté de l’étang, la voix du Romain devint plus traînante.
    – Vraiment, j’ai pitié de toi, mon beau Juda. De l’école à la synagogue, puis au temple, enfin un siège dans le sanhédrin, quelle perspective d’avenir   ! tandis que moi   !
    Juda leva les yeux à temps pour remarquer l’expression d’orgueil qui passait sur le fier visage de Messala, tandis qu’il continuait   :
    – Tandis que moi, oh   ! Le monde entier n’est point encore conquis. La mer a toujours des îles inconnues, il y a dans le Nord des nations que nous n’avons pas toutes découvertes   ; la gloire de pousser plus avant la marche d’Alexandre vers l’extrême Orient est réservée à quelqu’un. Vois donc toutes les alternatives qui se présentent aux yeux d’un Romain   ! Une campagne en Afrique, une autre chez les Scythes, puis on commande une légion   ! Bien des carrières se terminent ainsi, mais non pas la mienne, par Jupiter   ! J’échangerai la légion contre une préfecture et j’aurai tout ce que l’argent peut procurer pour embellir la vie   : du vin, des femmes, des poètes pour chanter à mes banquets, des intrigues de cour, des jeux. La Syrie, par exemple   ! La Judée est riche et Antioche est une capitale digne des dieux. Je succéderai à Cyrénius et toi, tu partageras ma fortune   !
    Les sophistes et les rhéteurs qui enseignaient la jeunesse patricienne de Rome auraient approuvé la manière dont Messala s’exprimait, mais pour le jeune Juif, accoutumé à entendre discourir en un style solennel, il n’en était pas de même. Il appartenait à une race dont les lois, les coutumes et les habitudes défendaient la satire et l’ironie. Aussi avait-il dès l’abord écouté son ami avec un étonnement voisin de l’indignation. Ses airs de supériorité lui paraissaient offensants et l’irritaient. Pour les Juifs de l’époque d’Hérode le patriotisme était devenu une passion sauvage   ; ils n’admettaient pas que l’on pût le tourner en dérision, comme Messala venait de le faire, avec son air de suprême indifférence, plus exaspérant encore que ses paroles.
    – Il existe, à ce que j’ai entendu dire, des hommes, en petit nombre, qui peuvent plaisanter sur leur avenir, répondit Juda avec un sourire contraint. Tu viens de me convaincre, Messala, que je n’en fais pas partie.
    Le Romain l’observa un moment, puis il reprit   :
    – Pourquoi ne pas dire la vérité en plaisantant, aussi bien qu’en

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