Ben-Hur
la paix et la bénédiction du Dieu d’amour et de vérité soient avec toi !
Ses manières dignes, l’onction de ses paroles, son expression, paisible et cordiale, frappèrent Ben-Hur, qui se sentit pénétré de respect pour l’étranger.
– Voilà celui qui rompra le pain avec nous, ô Balthasar, dit le cheik, en posant la main sur l’épaule de Ben-Hur.
L’Égyptien leva sur le jeune homme un regard exprimant la surprise et le doute, et le cheik continua :
– Je lui ai permis d’essayer, demain, mes chevaux ; si tout va bien il les conduira au cirque.
Les yeux de Balthasar ne quittaient pas le visage du jeune homme ; cette insistance semblait étrange au cheik, aussi crut-il devoir lui fournir de plus amples explications.
– Il est arrivé chez moi bien recommandé, lui dit-il. Il est connu comme le fils d’Arrius, un noble Romain, mais…, ici il hésita un instant, mais il assure qu’il est Juif, de la tribu de Juda et, par la splendeur de Dieu, je te déclare que je crois à ses paroles.
– Aujourd’hui même, ô le plus généreux des cheiks, s’écria Balthasar, ma vie s’est trouvée en péril, je l’aurais perdue si un jeune homme, ressemblant fort à celui-là, si ce n’est lui-même, n’était intervenu, alors que chacun s’enfuyait. Parle, ajouta-t-il en se tournant vers Ben-Hur ; es-tu celui qui m’a sauvé la vie ?
– Ce serait trop dire, répondit Ben-Hur avec déférence. La vérité est que j’ai arrêté les chevaux d’un insolent Romain, au moment où ils allaient tomber sur ton chameau près de la fontaine de Castalia. Ta fille m’a laissé la coupe que voici.
Le visage de Balthasar s’anima lorsqu’il vit la coupe que le jeune homme lui montrait.
– C’est le Seigneur qui t’a envoyé aujourd’hui à ma rencontre, dit-il d’une voix émue, en tendant vers lui sa main tremblante, et en cet instant encore, c’est lui qui t’envoie vers moi. Je l’en remercie, et toi, loue-le également, car j’aurai une grande récompense à t’offrir de sa part. Garde cette coupe ; elle t’appartient.
– Pourquoi, demanda le cheik à Ben-Hur, lorsque Balthasar eut fait le récit de ce qui s’était passé, pourquoi ne m’en avais-tu rien dit, mon fils ? Quelle meilleure recommandation aurais-tu pu m’apporter ? Ne suis-je pas Arabe, cheik d’une tribu ? Et cet homme-là n’est-il pas mon hôte ? Le service que tu lui as rendu ne m’a-t-il pas été rendu à moi-même ? Où irais-tu en chercher la récompense, si ce n’est ici, et quelle main te la remettrait, si ce n’est la mienne ?
– Épargne-moi, bon cheik, je te prie. Je ne suis pas venu chercher une récompense, petite ou grande. J’aurais secouru le plus humble de tes serviteurs comme j’ai secouru cet homme excellent.
– Mais il est mon ami, mon hôte, et non point mon serviteur, ne vois-tu pas la différence que cela fait ? Ah ! Balthasar, je te répète encore que ce jeune homme n’est pas Romain ! s’écria le cheik ; puis il se tourna vers la table, haute tout au plus d’un pied, sur laquelle on achevait de disposer le souper. Pendant ce temps, Balthasar interrogeait Ben-Hur.
– Comment le cheik disait-il que je devais t’appeler ?
– Arrius, le fils d’Arrius.
– Cependant tu n’es pas Romain ?
– Tous ceux de ma parenté étaient Juifs.
– Étaient, dis-tu ? Sont-ils donc morts ?
– Venez, le souper est prêt, dit le cheik.
Ben-Hur, soulagé de ne point avoir à répondre à cette question, offrit son bras à Balthasar pour le conduire à la table, autour de laquelle ils s’assirent à l’orientale, sur trois tapis. Après qu’ils se furent lavé les mains, Ilderim fit un signe aux serviteurs et la voix de l’Égyptien s’éleva, vibrante et pleine d’émotion, pour cette même prière que jadis, au désert, Gaspard le Grec, Melchior l’Hindou et lui avaient prononcée en même temps, chacun d’eux dans sa propre langue : « Père de tout ce qui vit, Dieu ! Tout ce que nous avons vient de toi, reçois nos louanges et bénis-nous, afin que nous puissions continuer à faire ta volonté. »
Ils avaient faim et, pendant un moment, la table, chargée des mets les plus appréciés des Orientaux : des gâteaux de fine farine, des légumes, des viandes, du lait, du miel, du beurre, absorba leur attention ; mais quand ils eurent terminé leur repas, ils se sentirent plus
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