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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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qu’il avait la barbe et les cheveux roux, mais encore parce qu’il avait tué tant de gens, qu’on disait que ses mains étaient à jamais rougies.
    » Cependant, le comte se maria. Il épousa Béatrix, la fille d’un baron, réputée pour sa beauté.
    » Il y eut une grande fête. Tous les habitants de Monteforte furent conviés à un repas qui eut lieu en plein air. Sur la fin du repas, la jeune comtesse fit le tour des tables, et vous pensez si elle fut acclamée. En arrivant à la dernière table, un homme que personne ne connaissait se dressa tout à coup devant elle.
    « Que voulez-vous ? demanda la jeune comtesse, croyant que cet homme avait une grâce à lui demander.
    – Je veux, dit l’homme, te déclarer que je suis épris de ta beauté et que si tu ne consens à être à moi avant peu, j’aurai détruit la ville de Monteforte ! »
    » La comtesse Béatrix poussa un cri d’effroi. Son mari et les seigneurs qui l’entouraient voulurent se précipiter sur l’insolent. Mais au même instant, une cinquantaine de montagnards surgissant des tables voisines, entourèrent l’homme et, jouant du poignard, protégèrent sa fuite puis s’enfuirent eux-mêmes en criant :
    « Vive Jacques le Rouge !… »
    » Cet événement troubla fort la jeune comtesse… Or elle n’était pas encore remise de son émotion, lorsque, au loin, on entendit sonner du cor. C’était un héraut envoyé en toute hâte par les barons voisins. On baissa le pont-levis. Le héraut entra. Et il apprit alors au comte Philippe que des barbares avaient envahi toute la haute Italie et que chaque baron, chaque comte réunissait toutes les lances dont il pouvait disposer.
    « C’est bien, répondit le comte Philippe, va dire à ceux qui t’envoient que demain, à l’aube, je me mettrai en chemin avec cinquante lances. »
    » Le lendemain de son mariage, le comte se mit en route à la tête de son armée qui comprenait, outre les cinquante lances, une centaine d’estramaçons, ce qui faisait en tout environ mille hommes, tant gens d’armes, qu’écuyers et suivants.
    » Une année s’écoula, pendant laquelle le comte Philippe guerroya sur les bords du Pô et de l’Adige. Enfin, les barbares furent repoussés au-delà des monts. Le comte rentra avec une armée décimée, mais victorieuse. Il était heureux de regagner le vieux château de Monteforte. Pendant cette année d’absence, il avait bien souvent pensé à sa jeune épouse et à la menace de Jacques le Rouge. Mais il n’était pas trop inquiet. En effet, à cette époque, Monteforte était inaccessible. La ville était entourée de toutes parts de rochers infranchissables et le défilé que vous voyez là, à deux cents pieds au-dessous de vous, n’existait pas…
    » Une cruelle déception attendait le comte à son arrivée. Les bandits de Jacques le Rouge s’étaient depuis trois mois emparés de Monteforte ! Depuis trois mois, la comtesse enfermée dans le donjon soutenait un siège qui devait fatalement se terminer par la mort des assiégés ou par leur capitulation, à moins d’un prompt secours.
    » Le désespoir du comte fut immense. En effet, les défenses naturelles de Monteforte, défenses dont il était si fier jadis, se retournaient contre lui ! Il n’y avait pas moyen d’approcher de la ville : il n’y avait pour y parvenir, que deux ou trois sentiers où il était impossible de passer plus de quatre hommes à la fois.
    » Installé ici, à cette place même où nous sommes, le malheureux comte, réduit à l’impuissance, pleura amèrement en contemplant de loin la cime du donjon où sa femme était enfermée. Il fit dresser sa tente à l’endroit même où se trouve l’auberge et, dès le lendemain, il essaya un assaut. Mais il dut bientôt constater que ses hommes d’armes tomberaient l’un après l’autre, sans qu’ils pussent traverser l’infranchissable rempart.
    » Les chevaliers du comte lui représentèrent alors que tout assaut serait inutile et ils annoncèrent que, dans trois jours, ils partiraient pour tâcher de se créer plus loin une autre patrie. Le comte Philippe adorait Béatrix. Il laissa donc dire ses chevaliers et il résolut de se tuer…
    L’aubergiste s’arrêta.
    – Allez donc, mon cher, dit Ragastens, vous contez fort bien.
    – Ah ! fit l’aubergiste ; c’est que je suis arrivé au point réellement étrange de cette aventure… Donc, le comte Philippe avait pris la résolution de se

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