Byzance
répondit-il. Sans être votre compagnon de lit, ou même un admirateur innocent et vaguement ridicule. Simplement vous et moi, comme je suis avec Halldor et Ulfr. D’un autre côté, les responsabilités d’hétaïrarque prennent tout mon temps.
— Je le sais, dit-elle, le visage radieux. Quand vous aurez un instant de liberté, faites-moi envoyer un message. Je viendrai vous voir ici, ou dans l’un des jardins. Il ne nous sera accordé que du temps et quelque intimité pour bavarder.
— Entendu, répondit Haraldr, radieux lui aussi. Prenons-nous les bras à la manière des camarades. Je vous consulterai dès mon premier instant de liberté, Estimée Éminence, lança-t-il en riant, tandis que sa forte poigne se refermait sur les avant-bras lisses de la jeune femme.
Elle s’inclina, moqueuse.
— En toute sincérité, hétaïrarque, ce sera pour moi un honneur éclatant, que surpasserait seulement l’apparition du Pantocrator lui-même dans toute sa gloire lors de mes ablutions du matin.
Leurs regards rieurs se croisèrent pendant un instant, puis Maria s’inclina et s’éloigna. Au bout de quelques pas, elle se retourna.
— Je suis si heureuse de vous voir en vie.
Elle lui fit un signe de la main puis s’éloigna en sautant à cloche-pied au milieu des dignitaires bouche bée.
* *
*
— Mon oncle ! gémit Michel Kalaphatès. Comment pouvez-vous vous lancer dans une… excursion pareille dans la situation où nous sommes !
Michel escamota ses dés sur la table d’ivoire et se leva d’un bond comme si les Bulgares étaient à la porte.
— Sans vous, je serais réduit à une vie de contemplation ascétique ! reprit-il en montrant d’un geste la décoration somptueuse de son salon, les tapisseries de soie de Perse, les candélabres d’argent, les chaises dorées. Ayez pitié de moi, mon oncle. J’ai déjà du mal à supporter l’existence que je mène dans ce palais, pouvez-vous m’imaginer dans une cellule de moine ? Mon oncle ! Vous êtes tout ce que j’ai !
Constantin prit dans ses bras le césar qui tremblait.
— Mon neveu, mon neveu, vous êtes tout à fait capable de vous débrouiller tout seul.
— Je suis extrêmement angoissé, mon oncle, répondit Michel en lissant sa robe de soie comme si, en éliminant les plis, il parviendrait à se dominer. Je ne suis même pas admis au Palais. La semaine dernière, j’ai essayé trois fois. Tout est clair. On commence par m’éloigner de la vue du public, puis quand tout le monde a presque oublié que j’existe, on me ligote au milieu de la nuit et on m’emmène au mont Athos. C’est leur plan, mon oncle.
— Je ne permettrai pas une chose pareille, je vous assure, répondit Constantin. L’empereur et l’orphanotrophe n’ont peut-être guère de considération pour moi, mais le même sang coule dans nos veines, et je vous garantis que je le leur rappellerai s’ils veulent vous arracher à cette maison. J’ai été stratège d’Antioche ! Ils semblent oublier mes capacités.
— Je les connais, mon oncle, et vous êtes mon parent le plus cher et mon ami le plus fidèle. C’est la raison pour laquelle l’idée que vous me quittiez ne serait-ce que pour deux jours m’accable profondément.
Constantin prit son neveu par les épaules.
— Nous avons besoin de trouver une arme à utiliser contre eux. Voici deux mois que je suis dans cette prison en face de la Numéra à essayer de découvrir quelque chose. Rien. Jusqu’à l’apparition du dénommé Maléinos. Je suis persuadé que c’est la main de la Providence qui me guide vers le saint établissement de Prote.
— Vous avez raison, bien entendu. Je regrette seulement d’être contraint de rester ici. Nous aurions pu faire une agréable excursion ensemble. Je parie que ce Maléinos apprécie les dés et les chevaux. Quand partirez-vous ?
— Le plus tôt sera le mieux, mon neveu. Je serai rentré dans trois jours.
— Soyez béni, mon oncle. Si je survis pour raconter cette histoire, je vous récompenserai de toutes les manières en mon pouvoir.
Constantin et Michel s’embrassèrent. Le césar escorta son oncle jusqu’à la porte et le regarda s’éloigner à cheval, traverser le cordon de gardes khazars puis descendre sur la large route pavée, avant de disparaître derrière un bouquet de cyprès. Michel rentra dans son vestibule et s’arrêta pour regarder la mosaïque du mur sur sa droite, qui représentait un aigle en train de
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