Byzance

que Zoé eût la liberté de recevoir dans sa villa du Bosphore, elle ne pouvait pas espérer en plus que l’empereur assiste à son bal.
    — Maîtresse, pensez-vous que je serai séduite ce soir ? demanda Petite Maria d’un ton allègre.
    — Pas ce soir, petite fleur, répondit Maria en tirant sur sa longue natte blonde d’un coup sec. Quand tu seras prête à être cueillie, je trouverai quelqu’un de très bien pour te séduire.
    * *
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    — Eh bien, c’est là, Votre Honneur. Si vous êtes capable de trouver ce charto je-ne-sais-quoi par ici, c’est que vous connaissez votre affaire mieux que moi. Et je pourchasse ces maudits démons bossus dans le coin depuis deux indictions. C’est de la folie, Votre Honneur. Je connais tout ça, et c’est de la folie. Mais enfin ça m’occupe.
    La chaleur de la fin de l’été recouvrait la vallée de Cappadoce de son manteau scintillant. « Incroyable », se dit Constantin. Il en avait évidemment entendu parler, mais il imaginait trouver quelques dizaines de ces habitants du désert. Incroyable : à perte de vue jusqu’à l’horizon, s’étendait un pays couleur de bronze, torturé par le vent et la pluie en des milliers et des milliers de cheminées de fées déchiquetées, presque toutes de la même hauteur, s’échelonnant en rangs serrés sans ordre apparent. Le paysage était en lui-même une merveille, mais le plus étonnant, c’était que cette fantastique étendue de rochers rongés par le temps constituait une ville. Ni un village ni un bourg, mais une immense ville de demeures sculptées dans ces aiguilles coniques de pierre tendre. Pas un seul de ces clochetons qui ne fût percé de petites fenêtres carrées et de portes rectangulaires, avec même parfois de vastes balcons en retrait. Et la ville creusée dans le roc grouillait de vie. Des moines en robe brune ou noire montaient et descendaient sans cesse sur les échelles de bois conduisant à leurs perchoirs, et les routes parcourant cette étrange métropole étaient pleines à craquer de ces ermites et de leurs ânes chargés de sacs de provisions et d’amphores d’eau douce ou de vin. Des milliers de feux de cuisine empestaient l’atmosphère déjà brumeuse. Constantin aperçut un moine qui battait un tapis sur un des balcons. La scène n’appartenait pas à ce monde. Il essaya de retrouver son calme. La chaleur et la poussière étaient suffocantes. Il mourrait avant de trouver dans cette fourmilière le vieux moine qu’il cherchait. Mais il n’était pas question de se laisser aller au désespoir. Il était homme de compétence.
    Et tout homme de compétence mettrait à profit son intelligence supérieure pour conquérir cet autre monde à la fois repoussant et sacré. Avec son voile couvert de poussière, il essuya son visage trempé. À son arrivée ici, le chartophylax s’était sans doute dirigé vers le monde qu’il connaissait : celui des livres, des manuscrits. Aucun ermite ne devait avoir ce genre de choses, en tout cas en abondance. Seulement une église. Constantin parcourut le terrain des yeux. Certains porches, plus larges et plus complexes, indiquaient des chapelles, mais il devait y en avoir des dizaines, probablement même des centaines.
    — Estimé compagnon, demanda-t-il au chamelier, où trouve-t-on la plus grande chapelle de ce district ?
    Le chamelier cracha dans la poussière, aussi fine que de la fleur de farine.
    — Par là, Votre Honneur, lança-t-il en montrant un vaste groupement de cônes arrondis qui ressemblaient beaucoup aux dômes multiples d’une cathédrale orthodoxe engendrée spontanément par la nature.
    Cette chapelle de rochers se trouvait bien à huit stades.
    — Et où pourrais-je trouver un âne et quelques cruches d’eau ?
    — Ah ! vous avez de la chance, Votre Honneur, c’est mon cousin qui vend des mules aux ermites, là-bas.
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    — Je suis positivement certaine que le père de sa femme avait un Arménien du côté de sa mère.
    Théophano Attaliétès, l’épouse du sénateur et magister Nicon Attaliétès, souleva d’un mouvement de son coude gauche et de sa vaste poitrine la traîne de son pallium écarlate brodé d’or et rehaussé de pierreries, comme si le vêtement était une sorte de manuscrit portant les généalogies de toutes les personnes présentes. Elle toisa de son œil impérieux l’épouse presque aussi grotesquement splendide d’un autre sénateur.
    — Par la main du Seigneur, madame,