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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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mais vigoureux. Pourquoi pas Isaac ?
    Le visage d’Anna se glissa près de celui de Maria et leurs nattes tressées se touchèrent.
    — Sainte Mère de Dieu ! s’écria la jeune fille.
    Le bulletin était encadré, dans la niche de marbre habituelle. Maria lut la prose ampoulée avec une gravité ironique.
    — Les champions varègues défendent la chrétienté au bout du monde. Ils récupèrent les trésors romains pour la plus grande gloire du Christ Roi. Le Varègue Nordbrikt, de son bras animé par la Mère de Dieu, a vaincu les infidèles à lui seul.
    — Il paraît qu’il est assez riche à présent pour acheter le palais de Nicéphore Argyros, lança la jeune fille.
    — Anna, lança Maria de sa voix musicale, tu te souviens soudain de lui, maintenant.
    Anna baissa pudiquement les yeux.
    — Oui.
    Puis elle fit la grimace.
    — Mon père est furieux du succès de ce Tauro-Scythe. Je l’ai entendu…
    Elle soupira, en essayant d’imiter la mystérieuse note de mélancolie qui perçait souvent dans les propos de Maria.
    — Je crois que nous n’aurons guère l’occasion de l’accueillir à nos banquets.
    Maria laissa tomber le rideau et fit signe au cocher de repartir.
    — Je crains que les ennemis du Tauro-Scythe ne se soient multipliés aussi rapidement que sa fortune.
    Elle s’adossa à ses coussins et ferma les yeux tandis que la voiture remontait la Mésé, principale artère de la ville. Extraordinaire. Le rêve datait de plusieurs mois. Et comme il demeurait précis ! Peut-être était-ce plus qu’un rêve : une vision comme celles du prophète Daniel. L’homme blond, la flotte de bateaux aux équipages fantômes, un coffre d’or aussi brillant que le soleil. Mais il y avait eu d’autres rêves. Non. Elle ne pouvait pas se les rappeler. Elle ne voulait pas. Le blond auréolé d’horribles créatures noires, des eaux glacées sombres comme de l’onyx. Et à son réveil, la peur sur sa langue. Possédait-elle un don de prophétie ? Les prétendus prophètes étaient nombreux en ville, mais la prophétie n’était-elle pas comme la vertu – plus souvent feinte que réelle ?
    Maria ouvrit les yeux. Ses mains se crispèrent. Oui, le Barbare blond était un messager de mort, mais elle n’avait pas vu si la mort qui auréolait ses cheveux d’or était la sienne propre ou celle d’un autre. Elle sursauta comme si un doigt glacé avait soudain effleuré sa joue. Elle tourna brusquement la tête, s’attendant à voir Anna avouer en riant qu’elle lui avait fait une farce. Mais non, à l’autre bout du siège, Anna regardait par sa fenêtre. Maria toucha sa joue légèrement fardée comme pour palper une blessure. Rien, en dehors de la peau lisse et tiède. Elle frissonna. Ce soir, à Sainte-Sophie, elle supplierait la Mère de Dieu que le blond ne revienne pas hanter ses rêves. Et elle prierait aussi pour l’âme du Barbare, parce que dans son cœur silencieux elle espérait qu’elle avait vu la mort même du blond.
    * *
*
    — Qui est-ce ? demanda Thorvald Ostenson, centurion de la Grande Hétaïrie, quatrième officier de la Garde varègue de l’empereur.
    Les garnitures de cuir du nouveau pectoral d’or d’Ostenson grincèrent quand il contourna le fauteuil sur lequel l’homme était assis, voûté. Son dos tremblait doucement comme le ventre d’un petit animal blessé.
    — La tête pitoyable sur laquelle les corbeaux ont décidé de crotter appartient à Jean Choniatès, petit agent du fisc venu du thème d’Anatolie.
    Mar Hunrodarson croisa les bras sur le bureau et regarda fixement le déchet humain assis devant lui. Les yeux de l’homme formaient des flaques d’un rouge vitreux entourées d’énormes boursouflures violettes, et son menton semblait complètement à vif à l’endroit où on lui avait arraché la barbe. Ses doigts courts et raides étaient gonflés et tachés de sang.
    — Et pourquoi donnent-ils ces petites souris à manger aux lions varègues ? demanda Ostenson. Ces bouffeurs de papier sans couilles ne savent-ils pas que nous avons déjà assez de travail avec les traîtres de haut rang ? Notre effectif est tellement réduit ! Surtout, un Varègue n’éprouve aucune fierté à jouer avec un roseau brisé comme celui-ci. Mes hommes renâclent quand on leur demande de procéder à ce genre d’interrogatoire sans conséquence.
    Mar Hunrodarson leva les yeux vers Ostenson. Il venait de promouvoir centurion ce paysan blond né dans

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