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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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octobre
    Cette semaine, les yeux rougis de fatigue, il s’est assis dans le coin qu’on lui assignait, sur la plus haute travée de l’hémicycle, à l’extrême droite, ce qui est un comble : Michel Rocard nouvellement élu dans la 4 e circonscription des Yvelines, où il a battu Maurice Couve de Murville 43 , a fait son entrée à l’Assemblée nationale. Quand on pense qu’il a obtenu à peine plus de 3 % des voix à la présidentielle de juin dernier, au milieu du capharnaüm de la gauche, on se dit que sa récente victoire à des partielles doit lui mettre du baume au cœur.
    Au fond, ce qu’il veut d’abord, c’est une tribune. Il s’était présenté à l’élection présidentielle pour marquer que son petit parti, le PSU, avait été le seul à sortir en bonne forme de la panique de mai.
    Sa candidature à des législatives, en elle-même, est un signe. Aujourd’hui, le PSU, dont il a été un des fondateurs il y a neuf ans, est composé à parts presque égales de technocrates socialistes et de socialistes révolutionnaires.
    Entre les partisans de minorités agissantes qui imposeraient le socialisme, au besoin par la révolution, et ceux qui préfèrent solliciter le suffrage des électeurs, Michel Rocard avait déjà tranché en mars dernier, au moment du sixième congrès du PSU. Il a pris le tournant de la légalité et du suffrage universel.
    Tous les leaders de la gauche le surveillent de près : Alain Savary ne souhaite pas le voir marcher sur ses platebandes, les communistes annoncent qu’ils l’auront « à l’œil ». Seul Mitterrand, isolé lui aussi, ne lui a pas fait grise figure.
    Rocard, du haut de ses ans, se fiche d’être seul au Parlement : « Je suis peut-être seul dans l’hémicycle, répond-il lorsque je lui pose la question, mais pas ailleurs. »

    18 décembre
    Les socialistes ex-SFIO, ceux dont désormais Alain Savary a pris les destinées en mains, ont gagné aujourd’hui la course à l’échalote : ils ont été les premiers, depuis l’éclatement de la FGDS à l’automne 1968, à reprendre contact et à se réunir avec le Parti communiste. Les socialistes tout seuls, sans les radicaux, sans Mitterrand surtout, qu’ils boudent toujours.
    Cette nouvelle rencontre, trois hommes la préparaient depuis le congrès constitutif du nouveau parti socialiste en juillet dernier à Issy-les-Moulineaux : le socialiste Claude Fuzier, l’éternel Claude Fuzier-ami-de-Guy-Mollet, chargé depuis plus de cinq ans d’une conversation aux fortunes diverses avec le PC, et les deux patrons de la nouvelle génération du PC, Roland Leroy et Georges Marchais.
    Pour le bonheur de tout le PS ? Certes non. À peine les émissaires du PC avaient-ils quitté les locaux, lessivés pour l’occasion, de la vieille cité Malesherbes, qu’à l’Assemblée, Jean Montalat, député socialiste de Corrèze et vice-président de l’Assemblée nationale, descendait en jaquette du perchoir condamner la reprise du dialogue avec le PC et offrait sa démission du nouveau parti socialiste.
    Tandis que plusieurs autres députés socialistes trouvaient le moyen d’annoncer pratiquement en même temps leur décision de constituer une délégation permanente avec les centristes !

    Pendant ce temps là, Giscard fonce : après leur séminaire à Courbevoie, (douze jours, 25 carrefours de discussion, 900 participants, 207 pages de propositions), les Républicains indépendants ont été les premiers à reprendre au bond la balle de la « nouvelle société » de Chaban pendant que les troupes UDR restaient circonspectes. Il y a de quoi : la plupart des dirigeants de l’UDR savent désormais que le président de la République a été franchement mécontent du discours de Chaban. Ils n’ont monté aucune hâte à engranger les propositions pour la nouvelle société.
    Du coup, Giscard a vu la brèche et a joué Chaban. Plus exactement, il ne veut pas laisser Chaban seul sur le terrain de la réforme, et l’étreint pour mieux le contenir. Pas question pour Giscard de se laisser tourner sur le centre. Le « socio-libéralisme giscardien » est avancé. D’autant que la « nouvelle société » risque bien d’être freinée par la mauvaise humeur de Pompidou.
    1 - Directeur de cabinet d’Edgar Faure au ministère de l’Éducation nationale.
    2 - Le 29 décembre 1968.
    3 - Joël Le Theule, né en 1920 à Sablé-sur-Sarthe, devient député gaulliste en 1958. Il est ministre

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