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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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ses scrupules de commission, inapte au dialogue, scandant ses mots d’ordre, dosant ses applaudissements. De l’autre, un Parti communiste qui lui donne la réplique,l’opposition non communiste prise dans les filets de ses contradictions, craignant de tomber dans les provocations gouvernementales et incapable de se solidariser avec les communistes.
    Dialogue de sourds. L’un fait appel à l’opinion, l’autre répond à l’opinion. Le vote est acquis, sans surprise.
    Lorsque Mitterrand parle, pourtant, la majorité fait silence. Pas longtemps : puisque les jeux sont faits, les députés s’en vont par petits paquets, les uns après les autres. Mitterrand, depuis quelques années, n’est pas habitué à cette indifférence. Il n’importe, il trouve les accents du chef de la gauche qu’il a été, qu’il était encore il y a un an, pour dénoncer cette loi qu’il juge « pernicieuse », car elle ne parvient pas à l’équilibre entre la répression et la sauvegarde des libertés individuelles.
    Claudius-Petit intervient à nouveau après lui.
    Je me demande si la haine que déclenche François Mitterrand n’est pas due, plus qu’on ne le croit, à la IV e  République. Il est allé trop vite, trop loin, de 1945 à 1958. Ce sont tous les hommes politiques de la IV e qui lui en veulent, les Pleven, les Claudius-Petit, les Guy Mollet, les Mendès France. Entre Pleven et Mitterrand, par exemple, existe un vieux conflit autour de quelques cadavres.
    Pleven hait Mitterrand : tout en lui sue le fiel lorsqu’il en parle, lorsqu’il lui parle. Cela date de l’UDSR, mouvement né de la Résistance. Mitterrand le dit drôlement : « Il ne manque plus que Capitant pour reconstituer notre ancien parti. »
    Vingt-cinq ans de haine, comment font-ils pour que ça dure ?

    30 avril
    Loi votée dans la nuit.

    13 mai
    Maurice Faure, chez lui, boulevard Raspail. Il marche de long en large et se prépare, sans bruit, à changer de stratégie. Les communistes ? Il n’en veut pas. Alors ? Le centre ? La majorité gaulliste ?
    « Les communistes, dit-il, n’ont pas les mêmes problèmes que nous. Ils n’envisagent pas de prendre le pouvoir à court terme. Nous, oui, au contraire. Le PC s’en fout, d’avoir 15 députés ou 150. Pour nous, en avoir 40 ou pas du tout ne nous est pas indifférent. »
    Il me parle surtout de Jean-Jacques Servan-Schreiber, qui, au Parti radical, lui mène un train d’enfer : « Il m’en fait voir, oui, alors ! »
    Pendant que je suis chez lui, un cycliste apporte une enveloppe que sa femme de ménage lui amène comme le saint sacrement : « J’en reçois quatorze par jour, venant de J-J S-S, des lettres comme celle-là », soupire-t-il.
    De lui-même il dit : « Je ne suis pas fait pour être le roi à Paris, mais un grand féodal de province. Je ne suis pas un intellectuel, un penseur ; je suis un gestionnaire. »
    C’est une des raisons, me dit-il, pour lesquelles il n’a pas osé déclarer sa candidature, en 1965. Et aussi parce qu’il avait programmé, à l’automne de cette année-là, un voyage je ne sais où avec je ne sais pas qui. De Jacques Chirac, secrétaire d’État UDR au Budget et député de Corrèze, il dit : « Je le regardais, l’autre jour, à la Coder 3 , et je me disais : c’est tout moi il y a dix ans ! »

    Roland Leroy, furieux du procès en délation fait au PCF par les Tchèques aujourd’hui au pouvoir. Il me redit quelle avait été la position de Waldeck Rochet en 1968 : il avait été à Prague rencontrer Dubcek, précisément pour le mettre en garde contre une intervention soviétique.

    20 mai
    Pompidou en voyage présidentiel dans le Cantal.
    Catherine Nay, qui le suit pour L’Express , se plaint à un de ses conseillers de l’indifférence du président vis-à-vis de la presse. « Il n’a sans doute pas une bonne vue, lui répond-il pour l’excuser. Il est atteint d’une cataracte, il ne voit personne. »
    Quelques heures plus tard, Pompidou arrive à la hauteur de Catherine et lui dit presque à l’oreille : « Je suis peut-être aveugle, mais pas sourd... »
    C’est bien le seul moment où il ait montré de l’esprit. Le reste a été d’une platitude ! « Pas même à un comice agricole, me dit Maurice Faure, je n’aurais été aussi plat. »

    Les communistes français et Garaudy. Pour la première fois, le comité central et le bureau politique du Parti ont face à eux un

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