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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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désormais une dimension nationale, que, dès lors, le mieux serait de se retirer, de passer la main pour revenir au pouvoir après le départ – sans doute le 18 juin 1970 – du Général 21 . Pompidou annote le rapport de quelques phrases du genre : « C’est exactement ce que je pense. Le problème est de prendre ses distances proprement. »
    Ce que Pompidou dit au Général.
    Puis Couve de Murville 22 , ministre des Finances dans le gouvernement Pompidou de juin-juillet, est convoqué par le général de Gaulle qui lui propose Matignon : il en avise immédiatement Chirac qui, à son tour, prévient Pompidou. Brutalement, puisqu’il ne pense pas que la nomination de Couve à Matignon pose le moindre problème à ce dernier. Au contraire. Il se borne à lui dire sans fioritures ni précautions : « C’est fait. »
    Aussitôt Pompidou accuse le coup lourdement. Il répète : « C’est fait ? »
    Il s’y attendait, certes, mais, sur le moment, il ne peut en supporter l’idée. C’est alors qu’il appelle Tricot à l’Élysée 23 . Sans doute pour lui demander tout de même de surseoir.
    « C’est sa seule faiblesse, commente Chirac, mais aussi la preuve que, tout compte fait, il est humain. »

    Mitterrand, parlant à Maurice Faure de Jean-Jacques Servan-Schreiber : « C’est un somnambule, je le dis à mes amis de la Convention. Quand il est réveillé, c’est un homme formidable. Quand il gesticule et dit n’importe quoi, c’est qu’il dort.
    — Somnambule, somnambule, grommelle Maurice Faure... Funambule, vous voulez dire ! »

    Maurice Faure, je le retrouve, le jour de la rentrée parlementaire, défait, dans la salle des Quatre-Colonnes : Chaban-Delmas est l’hôte d’honneur des fêtes du centenaire de : La Dépêche du Midi . Un gaulliste chez les radicaux, à Toulouse : l’univers politique bascule !

    Un peu plus tard, rencontre entre Guy Mollet et Maurice Faure aux Quatre-Colonnes encore. Échange :
    MF : « Vous vous sentez bien, au PS ? »
    (Il attaque d’un air goguenard, alors qu’il était évident que ça allait lui retomber sur le coin de la figure.)
    GM : « Ça n’est pas difficile, mais pas tellement agréable. De toute façon, c’est plus facile que d’être dans votre position ! »
    Un temps, et puis : « Belle entreprise de démolition à laquelle vous participez. Vous avez démoli en un an ce que nous avons mis trois quarts de siècle à construire ! »
    Je dis pour détendre l’atmosphère : « N’exagérons rien ! »
    Mollet me foudroie du regard et continue. Il démissionnera du groupe, d’Arras, de tous ses postes, si Jean-Jacques Servan-Schreiber est apparenté au groupe socialiste à l’Assemblée nationale. Il est blanc de colère : il n’a pas lutté pendant trente-huit ans sous les couleurs socialistes pour trahir la gauche au dernier moment. Il comprend à la rigueur que Jean-Jacques Servan-Schreiber n’accepte pas que le comité directeur socialiste dise s’il est ou non un bon radical. Mais J-J S-S n’est pas un isolé. Il engage le Parti radical, allié traditionnel du Parti socialiste, et c’est à ce titre qu’il peut être exclu.
    « Vous paierez tout cela, dit-il à Maurice Faure, vous paierez ! »
    MF : « Oh, on ne sait jamais qui paie. »
    GM : « Si, on le sait, vous le verrez ! »
    MF : « On ne sait jamais qui est réélu et qui ne l’est pas. »
    GM : « Vous personnalisez tout de suite ! Je disais, moi, qui aura tort devant l’Histoire ! »
    Guy Mollet continue à parler morale. Maurice Faure l’interrompt : « Vous n’avez pas le monopole de la morale ! »
    Une scène insensée... La gauche se déchirant sous l’œil des journalistes.
    « Tout cela, dit à un autre moment Faure à Mollet, ne se règle pas aux Quatre-Colonnes !
    — Dites-donc, ce n’est pas moi qui vous y ai amené. C’est (me désignant) elle ! » fait GM.
    Le moment est venu de m’en aller.
    Roland Leroy passant par là, je les laisse tous les deux et pars vers la buvette avec lui.
    Cela étant, Maurice Faure ne m’a pas caché :
    1. Qu’il dînait avec Servan-Schreiber, Pierre Brousse, Michel Soulié et Robert Fabre pour ajuster le tir au bureau politique radical de demain 24  ;
    2. Qu’il avait vu Alain Savary le mardi 6, que celui-ci lui avait paru désireux d’arranger les choses ;
    3. Que Servan-Schreiber serait vraisemblablement non inscrit, prenant les devants sur Guy

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