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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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poursuivre son action.
    « C’est le dernier grand message de Chaban avant l’ouverture de la campagne législative de 1973. S’il n’est pas suivi sur ce terrain, me dit Pierre Hunt, il faut qu’il en tire les conclusions dès aujourd’hui. Ensuite il sera trop tard. »

    Reste que, au moment où j’écris ces lignes, un grand nombre de ministres – ils me le disent – ne sont pas d’accord avec la décision de Chaban de demander un vote des parlementaires. Pourquoi celui-ci y tient-il tant ? Réponse claire faite par lui à quelques journalistes, le 18 mai : parce qu’il veut « offrir à la majorité l’occasion d’affirmer son unité et de lui manifester sa confiance ». Bref, il veut dissiper par un vote la sale atmosphère dans laquelle se complaît aujourd’hui le monde politique.
    Jacques Chirac, que je vois après lui à 16 h 30, toujours le 18, craint que, derrière la volonté de Chaban de demander la confiance pour lui-même, il n’y ait en réalité le désir de démontrer que ce n’est pas lui qui est en cause, mais bel et bien Pompidou. En tout cas, depuis l’échec du référendum sur l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun. Chirac l’a dit à Pompidou au cours d’un déjeuner, le 16 : « Imaginez que vous portiez un pull-over dont les députés tiennent un fil. Maille après maille, rang après rang, c’est vous qui allez être dénudé ! »

    Chirac pense que tous les ministres sont hostiles au dépôt d’une question de confiance. Et qu’au sein de l’UDR la plupart des dirigeants – cela s’est vu au bureau politique du 16 – s’y opposent même avec virulence :
    « Pour des raisons avouées, car ils pensent, et moi aussi, que cette procédure est un gigantesque pas en arrière vers la IV e République, qu’elle n’est pas dans l’esprit de la Constitution de la V e , où le Premier ministre n’a pas à solliciter la confiance des députés, mais la tient au contraire du seul président de la République. J’ajoute que Chaban a mis le président devant le fait accompli : il a parlé du vote avant d’y être autorisé. Quant aux raisons inavouées, il y en a des dizaines, depuis le traumatisme de la majorité sur l’ORTF jusqu’aux scandales des “copains”, comme Philippe Dechartre, que Chaban n’a jamais voulu sanctionner.
    « Il a l’initiative pour encore quelques jours, conclut-il. Reste à savoir s’il la gardera. »

    23-24 mai
    Discours de politique générale de Chaban-Delmas, le 23 .
    Dans les tribunes, Pierre Hunt, gris, cravate bleue, l’air inquiet. Jacques Delors, concentré sur le texte du Premier ministre qui estsous ses yeux et qu’il doit connaître par cœur. André Chadeau, couleur muraille, avec un costume trop grand pour lui (il a maigri, ces derniers temps).
    « C’est le discours d’investiture de Bourgès-Maunoury ou de Laniel, me dit Maurice Faure dans les couloirs avant d’aller s’asseoir dans l’hémicycle. Croyez-moi, cela sent un peu le testament. »
    Discours classique de Chaban, du même type que celui du 16 septembre 1969. Il paraît qu’il a dit au groupe parlementaire UDR, le jour où il est allé le houspiller : « Je ne demande pas de l’enthousiasme, je demande de l’entrain ! »
    Sur le plan politique, il a gagné et largement : 368 voix contre 96. Depuis le 16 septembre, c’est-à-dire depuis son entrée à Matignon, il n’a perdu qu’une voix. Une voix seulement.
    Voilà qui devrait lui permettre d’être tranquille avec sa majorité pendant un bon bout de temps.
    « On a réussi, m’a dit tout à l’heure Delors, ajoutant : depuis trois ans, on a beaucoup fait, nous avons beaucoup “balayé”. Et enregistré quelques débuts de succès : le déblocage des structures sociales, une politique active contre les bas salaires, un changement du patronat. Nous avons réussi à introduire une dynamique de la société, tandis que nos partenaires campent sur la ligne Maginot de l’immobilisme social. Tout le problème est là. Évidemment, ce qu’on nous reproche, c’est la politique de concertation, assimilée par nos adversaires à un manque d’autorité. »
    Pourquoi les députés de la majorité, giscardiens compris, ont-ils unanimement voté la confiance à Chaban ? Essentiellement parce qu’ils ne veulent pas ajouter une crise parlementaire à la crise générale. Peut-être aussi parce qu’ils redoutaient la perspective d’élections

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