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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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cette affaire de l’ORTF, il est au courant du déjeuner – ou de la conversation – Pompidou-Chaban sur un futur vote de confiance. On m’a en effet raconté (à Matignon, mais je ne donne pas mes sources à Chirac) que Chaban aurait « cassé le morceau » à Pompidou :
    « Soutenez-moi, lui aurait-il dit, ou foutez-moi à la porte !
    – Demandez donc un vote à l’Assemblée, lui aurait dit Pompidou. On verra bien, vous n’avez rien à perdre. »
    Non, Chirac n’est pas au courant.
    « Ce serait, dit-il, une assez bonne solution. Il y aurait quelques abstentions, et la porte de sortie serait ouverte.
    – Des abstentions ? dis-je. Vous voulez dire que vous les susciteriez ?
    – Non, me répond-il, la main sur le cœur. Ce ne serait pas convenable. En plus, cela retomberait sur l’UDR, donc sur le président de la République, et ce ne serait pas habile. Cela étant, quelques abstentions suffiraient à Chaban pour déclencher le processus du départ. Et s’il n’y en avait pas du tout, il pourrait faire ce qu’il veut. S’en aller en disant : personne n’a rien à me reprocher... »
    Chirac continue à se dire persuadé que le meilleur Premier ministre serait, à l’heure actuelle, Messmer. De toute façon, selon lui, le gouvernement ne passera pas le cap du mois de juin.

    Anecdote sur le Conseil des ministres d’hier. Gag : Marcellin parle de la dissolution du conseil municipal de deux communes. L’une, la première, s’appelle Matignon, dans les Côtes-du-Nord. Imperturbable, il explique : « Le maire n’est plus suivi, il a perdu toute autorité, les conseillers municipaux ne viennent même plus siéger. Nous sommes dans l’impasse. Il faut dissoudre. »
    Pour que la perspective de la dissolution à Matignon ne fasse pas rire, Léo Hamon n’a pas révélé le nom de la commune en question dans son compte-rendu du Conseil des ministres. Il a parlé d’« une commune ».

    13 mai
    Chaban a calé. Il est mis fin aux fonctions de Jean-Jacques de Bresson, directeur général de l’ORTF. Le secrétaire d’État à la Fonction publique, Philippe Malaud, est chargé de préparer un projet deréforme de l’Office. Chaban a perdu. En fait, il est déchargé du dossier, dont la gestion lui a été reprochée depuis 1969.
    Est-ce pour faire oublier cet échec que Chaban a proposé au président de la République d’organiser un débat de politique générale à l’Assemblée nationale et de poser, le moment venu, la question de confiance ?

    22 mai
    Demain, donc, déclaration de politique générale de Jacques Chaban-Delmas.
    Je ne suis pas près d’oublier les dix jours qui viennent de s’écouler. J’en fais le récit ce soir après avoir rencontré à peu près tous les protagonistes de cette phase politique que je pense importante.
    Celle-ci a commencé dans les remous de la discussion parlementaire au sujet de la télévision. Pierre Hunt, de Matignon, me fait, le 12, un panégyrique de Philippe Malaud, dont la personnalité rassurante, me dit-il, va calmer le désordre général qui sévit dans l’audiovisuel. Il va aider le gouvernement à arrêter sa position.
    Croit-il que je suis dupe ? Je sais très bien que Chaban a été obligé d’accepter que Malaud vienne mettre le nez dans les affaires de l’ORTF au moment même où la politique de Matignon est critiquée de toutes parts.
    Lui-même, d’ailleurs, lorsqu’il me parle des changements extorqués à Chaban à la tête de l’Office, lâche : « Il faut changer la distribution, faire de l’esbroufe, du cinéma ! »
    « Autrefois, a-t-il ajouté sans illusion, il y avait les jeux du cirque, les procès de sorcières. Aujourd’hui, les choses prennent une autre forme. Peut-être est-ce le prix de la longévité du gouvernement ? »

    Croisé dans les couloirs du Parlement, Jacques Chirac, lui, répète qu’il faut changer le Premier ministre. Il est aussi favorable à la sortie du gouvernement de Michel Debré. Qui serait alors Premier ministre ? Pierre Châtenet ? Paul Delouvrier, tous deux hauts fonctionnaires, sérieux et crédibles ? Il ne cache pas que l’on semble penser en haut lieu à Messmer.
    Il existe néanmoins pas mal de chabanistes, comme Étienne Garnier 18 , qui n’ont pas tort de penser, il me semble, que « le sort deChaban est en fait lié à celui de Pompidou », et que le désaveu du Premier ministre aboutirait à une déstabilisation du président. Il me donne une

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