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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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de se dégager du programme commun et de renoncer aux nationalisations. À Giscard, il demande, entre autres, d’accepter clairement la réforme de l’argent public et la reconnaissance d’un pouvoir de décision régional.
    Mitterrand était coincé : il n’allait pas mettre en l’air son alliance avec les communistes pour récupérer les radicaux. Il m’a dit l’autre jour, et je l’ai noté sur un bout de papier que je retrouve aujourd’hui : « Jean-Jacques sait très bien qu’il n’est pas question de nationaliser nos neuf groupes avant que le pays ne soit sorti de la crise. Il sait aussi que je ne peux pas, publiquement, y consentir sans perdre l’élection. C’est un faux problème : il a déjà choisi Giscard d’Estaing. »
    Moi, je n’en suis pas si sûre : Jean-Jacques craint de se couper de la gauche, et cela ne doit pas lui être facile de rallier Giscard, même s’il le connaît bien et depuis longtemps.
    Hier, Giscard a répondu à Servan-Schreiber : « Je puis donner mon accord avec les idées essentielles que vous exprimez. J’espère et je crois que cette communauté de vues dissipera le mythe empoisonné selon lequel la campagne de 1974 serait un combat entre la droite et la gauche. »
    Évidemment, Giscard y voit son intérêt : démontrer qu’il n’est pas à droite, puisque J-J S-S se rallie à lui.
    Aujourd’hui, Jean-Jacques Servan-Schreiber constate : « Je suis arrivé à la conclusion que la voie de la réforme pour les Français passe par l’élection de M. Giscard d’Estaing à la présidence de la République. »
    Olivier Guichard a beau commenter, ironique, le ralliement de J-J S-S en disant : « Il a donné une voix de plus à Giscard ! », il se trompe : le ralliement a un effet plus psychologique qu’arithmétique. Il rejette Mitterrand sur sa gauche et le coupe du centre.
    15 mai
    De sa propre initiative, Georges Marchais a fait aujourd’hui une conférence de presse pour – on croit rêver – signaler que le PCF ne détiendra pas, dans le futur gouvernement de la gauche, si Mitterrand est élu, les ministères-clés de l’Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères. Il se contentera donc de ministères secondaires, techniques, du genre Plan, Équipement, etc. On n’a jamais entenduun secrétaire général du Parti communiste annoncer lui-même qu’il se contentera de si peu. Il aura, lui, vraiment tout fait pour que Mitterrand gagne !

    Rencontré Thérèse de Saint-Phalle, cousine et camarade de jeu, dans son enfance, de Giscard. Elle me raconte (mais je n’ai aucun moyen de le vérifier) qu’il aime Rainer Maria Rilke, Paul Valéry, Proust et Anna Karénine ... Il y a sept ans, il a commencé un roman, Un été brûlant , dont l’action se passe en Allemagne au siècle précédent. Il avait un cocker, Nils, et un labrador noir, Réal. « Son horoscope révèle, me dit-elle, qu’il a les mêmes thèmes astraux que Mozart, sauf que, chez lui, Saturne est remplacé par Jupiter. »
    Je n’y connais rien, mais, a priori, Jupiter me paraît mieux que Saturne...
    19 mai
    Les jeux sont faits, Giscard est élu, mais apparemment avec beaucoup moins d’écart qu’on ne l’avait prévu. J’entends encore Denis Baudouin me dire que l’écart serait d’au moins cinq points, du genre 53/47. Ce n’est pas le cas : Mitterrand obtient à peine moins de 50 % et Giscard est juste au-dessus de la barre des 50 25 .
    Une nouvelle défaite, donc, pour le candidat de la gauche unie, après une campagne formidable qu’il n’attendait pas si tôt et qu’il a perdue. Depuis le premier tour, il s’en doutait, car il n’a rien perdu de sa lucidité. Il reste que cela doit être dur.
    20 mai
    Increvable Mitterrand ! Je n’en reviens pas. Je ne l’ai pas vu hier, je lui ai simplement téléphoné ce matin. En fin d’après-midi, il donne à la presse ce communiqué encore empreint du ton de la campagne électorale : « Il n’y aura de notre part ni pause, ni trêve. »
    Il reprend immédiatement à Pierre Mauroy, qui faisait l’intérim, le poste de premier secrétaire du Parti socialiste, annonce la réunion d’un comité directeur pour samedi, et commente les résultats en disant que la droite, qui a selon lui épuisé ses dernières réserves possibles, fait moins de 51 %, toutes composantes réunies.
    « Le général de Gaulle avait certaines racines populaires. Maintenant, on sait que c’est la droite des

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