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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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situation actuelle me semble tenir du miracle. Le groupe est comme quelqu’un qui a vu la mort de très près et qui est heureux de vivre. Il aurait suffi que le président prenne un autre Premier ministre que Chirac pour que nous soyons condamnés. »
    Pour l’heure, il a beau dire cela, il ne me paraît pas particulièrement reconnaissant à Chirac d’être à Matignon. Il reste clairement antigiscardien : « Le président de la République est obsédé par le peuple et par la gauche. Il prend des mesures qu’il croit populaires. Le malheur est qu’il ne connaît pas le peuple ! Et qu’il ne peut pas compter sur le groupe des républicains indépendants ni sur lesgroupes Perspectives et Réalités pour incarner la novation et la réforme ! »
    16 octobre
    Serge Maffert, qui dirige le service de presse de Chirac, parle de « guérilla parlementaire ». C’est tout de même un aveu, moins de quinze jours après l’ouverture de la session ! Les groupes parlementaires de la majorité ne sont pas tenus. Leurs présidents ne sont ni des « gardes-chiourme, ni des organisateurs ».
    Jacques Chirac a réuni le groupe UDR, hier. Sur le projet de loi concernant les Comores, il s’est montré très ferme et a bénéficié de l’aide de Messmer et de Debré. Il est revenu sur le reste en disant que le projet de compensation sur la Sécurité sociale ne serait pas voté. Quant aux réformes constitutionnelles 37 , il est évident qu’il y a une fronde antiGiscard à la Chambre, et d’ailleurs aussi au Sénat.
    Je demande à Maffert quelle est l’attitude de Chirac : indifférent, dépassé, impliqué ?
    « Il n’est pas du tout indifférent, m’assure-t-il. La difficulté, pour lui, est de tenir l’UDR et la majorité soudée sur des projets essentiels. Pour le reste, pour ce qu’il appelle “les fariboles”, comme la réforme constitutionnelle, il laisse filer. “Ça fait mauvais effet, mais ce n’est pas vital.” Oui, ajoute Maffert, Chirac est agacé, mais pense que les choses vont se tasser. »
    Il confirme tout de même que le Premier ministre serait plus que gêné si l’UDR venait à lui échapper, et qu’il va se lancer dans une opération de séduction vis-à-vis du Parlement : il a déjeuné jeudi avec les parlementaires de la commission des Finances, il a dîné hier avec Claude Labbé.
    Tout cela me donne l’impression que Chirac ne peut pas en rester avec l’UDR dans des rapports que Jacques Chaumont, jeune député UDR de la Sarthe, qualifie de « sado-masochistes ». Tout cela ne durera pas. Il veut y mettre bon ordre, mais comment ?
    16 octobre
    Roger Chinaud tente de dissimuler, derrière sa rondeur, l’exaspération où le plonge la situation parlementaire. « Les dix types qui mènent, de façon d’ailleurs peu coordonnée, la fronde n’ont d’influence ni à l’UDR ni au gouvernement. Nous avons contre nous le génie d’un ancien préfet de police qui a découvert la gestion financière [il s’agit de Maurice Papon, dont le rapport sur le budget est très hostile au gouvernement], ou l’acharnement contre la réforme constitutionnelle d’un Jean Foyer. »
    Ça l’énerve prodigieusement, mais il tempère son irritation : « Nous ne polémiquerons pas avec l’UDR. Quelques jeunes champions de l’union de la majorité présidentielle autour de Giscard équilibreront les dix types, qui finiront par abandonner le terrain. »
    Je comprends mieux la stratégie de Chirac : il attend effectivement que les choses se calment pour reprendre le contrôle de ses troupes. D’où sa feinte indifférence.
    21 octobre. Congrès de Versailles
    Dans l’hémicycle rouge et or, tous les députés et sénateurs qui attendent l’ouverture de la séance écrivent des cartes postales à leurs amis ou administrés. Je remarque que les deux horloges, à gauche et à droite de la tribune, ne marquent pas la même heure.
    Pendant la suspension de séance, la question court les travées : Chirac parlera-t-il ou pas ? Certains, dans l’opposition, soutiennent que les ministres ont le droit de s’exprimer à l’Assemblée nationale et au Sénat, mais pas au Congrès : le règlement, selon le socialiste Tailhade, ne prévoit pas un débat entre le Congrès et le gouvernement.
    Difficile, pourtant, que le Premier ministre se taise, même s’il est loin de trouver indispensable la réforme constitutionnelle soumise aujourd’hui au vote des deux assemblées. Sinon

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