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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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pas basse du tout – sur le PSU et certains syndicalistes, qui, pour la première fois, au cours de ces assises, ont parlé à visage découvert.
    15 octobre
    Le sentiment que Chirac est « ailleurs », qu’il pense à autre chose, se confirme. Aujourd’hui, séance de la majorité, salle Colbert. Il défend mollement devant les députés de la majorité le projet de loi Fourcade-Durafour sur la Sécurité sociale. André Fanton, au nom du groupe UDR, intervient pour contester le financement de la Sécurité sociale par des taxes sur l’alcool. Chirac laisse filer : « C’est au groupe de se déterminer », dit-il. Tête de Fourcade et de Durafour, qui, c’est le moins qu’on puisse dire, ne se sentent pas vraiment soutenus. La seule chose qu’affirme Jacques Chirac, c’est qu’on ne touchera pas au régime général : « Nous ne voulons pas que le régime des salariés fasse les frais de l’extension de la Sécurité sociale », dit-il.
    Sa phrase reflète l’attitude de tout le groupe UDR à l’égard de ce projet de loi. En commission, un giscardien s’irrite : « Je ne comprends rien à ce qui se passe ici : ce sont des députés de la majorité qui combattent les amendements du gouvernement ! »
    C’est ainsi que le premier projet sur la Sécurité sociale est repoussé en commission.
    Le deuxième texte, avec amendements gouvernementaux, l’est également. Ne reste qu’une ligne : « La Sécurité sociale est étendue à tous les Français. » C’est un peu court !
    Tout se passe de la même façon, selon une même technique : l’UDR tourne le gouvernement sur sa gauche et rejoint sur les amendements les socialistes et les communistes, goguenards, pour mettre en pièces le projet gouvernemental. Idem pour la réforme constitutionnelle : les projets sont rejetés en commission ; en séance publique, le gouvernement est battu par deux fois.
    Tout cela dans l’apparente indifférence de Jacques Chirac.
    16 octobre
    Claude Labbé, président du groupe parlementaire UDR, me dit que je me trompe, que son groupe n’est pas « houleux ». Que, s’il a rejeté trois projets de loi (la Sécurité sociale, la réforme constitutionnelle, les Comores), c’est un simple concours de circonstances. « Il est facile de dire que nous menons une sorte de fronde. Mais, avec Georges Pompidou et Messmer, il nous est arrivé d’avoir une attitude tout aussi ferme. »
    Claude Labbé ne veut pas me l’avouer, mais les choses sont plus compliquées qu’il ne me le dit. En réalité, le groupe UDR supporte mal l’élection de Giscard et a des sentiments mitigés à l’égard de Chirac. Quoi de plus naturel, si l’on se souvient que l’élection présidentielle, l’effondrement de Chaban et le rôle que Chirac y a joué sont encore proches dans tous les esprits.
    Sur l’élargissement du régime commun de la Sécurité sociale, Labbé ne varie pas d’un pouce : « Même si les réformateurs et les républicains indépendants le veulent, nous ne changerons pas d’avis : nous n’acceptons pas que les salariés supportent seuls l’effort de l’élargissement aux autres régimes. »
    Chirac indifférent ? Il convient que l’indifférence a des limites : « Le gouvernement a commencé d’adopter l’attitude d’un édredon : c’est une attitude de façade, qui ne peut pas tenir, car le Premier ministre finit par râler, puisque tous les projets gouvernementaux sont repoussés. Mais, enfin, on ne peut pas demander au groupe UDR de faire preuve de plus de discipline qu’avant.
    « Notre règle reste celle-ci : lorsque nous ne sommes pas convaincus de l’urgence de tel ou tel projet, nous prenons notre temps. Le contrat passé avec Chirac est celui-là : si vraiment le gouvernement, sur un point fondamental, a besoin de nous, nous le suivrons. Nous ne voulons pas livrer une guérilla au président ni au Premier ministre. »
    Je demande s’il pense que l’attitude du groupe gaulliste aide ou pas Chirac ; il me répond : « La situation est nouvelle : elle requiert obligatoirement un certain rodage. À certains moments, Jacques Chirac peut s’appuyer sur la fronde du groupe et montrer qu’il est le seul à pouvoir la dominer. À d’autres, il risque de se heurter à un mur. La voie est étroite pour Chirac, mais pour nous aussi. »
    Tout de même, Chirac leur sauve la mise, non ?
    Réponse de Claude Labbé : « Je considère que nous sommes en survie. La

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