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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Dans la nuit, vers 3 heures du matin, au moment où je m’apprête à partir, m’attendant à ce que la loi soit retirée, Simone Veil a réclamé une suspension de séance.
    Je n’ai appris que ce matin ce qui s’était passé : Simone Veil a appelé Chirac au secours. Il est arrivé tout de suite et a passé un vrai savon aux députés UDR. Il en a apostrophé, paraît-il, un – un des plus virulents – en lui disant qu’il était aussi con qu’une valise sans poignée !
    D’où ce dénouement inattendu : c’est Jacques Chirac, celui qui était le plus hostile au dépôt du projet de loi, celui qui, politiquement, faisait valoir que cela diviserait la majorité plus que ce qui était souhaitable, qui a sauvé la loi : quelques UDR ont fini par la voter. Et toute la gauche.
    De Giscard, pas de nouvelles, cette nuit-là.
    3 décembre
    Conférence de presse de François Mitterrand.
    Les communistes entretiennent jour après jour le suspense. Du coup, ils sont plus de cent journalistes à s’entasser dans la petite salle du nouveau siège du Parti socialiste, 7 bis, place du Palais-Bourbon. Circuit intérieur de télé, murs blancs, affiches rose au poing sur les murs, moquette rousse.
    Mitterrand commence par évoquer l’inefficacité de la politique économique du gouvernement, par annoncer le dépôt d’une motion de censure au Parlement la semaine prochaine sur ces questions, et en profite pour défendre à nouveau la nécessité de l’intervention de l’État dans la politique industrielle, donc pour parler des vertus des nationalisations. Il fait un long paragraphe sur la lutte contre le chômage et conclut sur la liberté d’expression et la Sofirad, société dont dépend Europe 1, devenue, selon lui, « l’officine des partis de la majorité ».
    À vrai dire, ce n’est pas ce qui intéresse les journalistes : les premières questions portent en rafale sur les relations entre communistes et socialistes.
    Les communistes se sont mis, depuis maintenant plusieurs semaines, à tirer à boulets rouges sur le PS. Tout leur est bon : quand Mitterrand dit que la gauche acceptera de former un gouvernement si elle est majoritaire lors des prochaines législatives de 1978, les communistes lui reprochent de vouloir collaborer avec le pouvoir giscardien. Lorsque Mitterrand parle (abondamment) du programme commun, ils reprochent à Rocard de ne pas en avoir parlé lors des assises du socialisme. Qu’il y ait un revirement du PC, plus personne ne le nie désormais.
    Pourquoi ? Ça, c’est moins compréhensible. Cause extérieure, pressions soviétiques, comme le pensaient Guy Mollet ou Bérégovoy l’autre jour ? Origines purement électorales : c’est que le PS continue à profiter largement de l’union de la gauche. On l’a vu à l’occasion des dernières élections partielles.
    Mitterrand est prodigieusement agacé par ce procès que lui font les communistes. Les raisons lui en paraissent, il le dit, « largement insuffisantes ». Il ajoute : « S’ils sont de bonne foi, ils doivent croire en la nôtre ! »
    4 décembre
    Robert Pontillon, socialiste de toujours et proche de Mauroy, me dit en rigolant – un peu jaune, il est vrai – : « La position des communistes français, la voici : plutôt un pouvoir lointain, ou pas de pouvoir du tout, qu’un pouvoir proche et partagé. »
    L’Humanité de ce matin ne dit pas un mot sur la visite de Leonid Brejnev en France. Georges Marchais se contente de faire un communiqué, où il réaffirme que cette visite ne change rien au combat du PC pour un changement « réel et profond de la politique française ».
    8 décembre
    Convention du Parti socialiste.
    Mitterrand est considérablement agacé par la réaction masochiste d’une partie des socialistes. Il en a marre de cette réaction imbécile qui consiste, me dit-il, pour les sociaux-démocrates, à se coucher devant le PC et à se frapper systématiquement la poitrine en faisant leur mea culpa !
    Un problème : personne n’a organisé la convention d’aujourd’hui. Seuls interviennent à la tribune des militants favorables au PC, condamnant l’attitude de Mitterrand et surtout de Rocard dans la querelle qui grossit entre les deux partis de gauche.
    François Mitterrand est au bord de l’explosion.
    Je demande à Claude Estier pourquoi cette impréparation. Il me répond qu’il n’avait pas prévu d’organiser les débats. Hé oui, c’est cela aussi, le

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