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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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de la nécessité de créer un échelon exceptionnel en fin de carrière, ils évoquent le problème de la gendarmerie – bref, ils ne parlent, lorsque j’arrive, que des problèmes des militaires et du service national.
    Jusqu’à ce que Claude Labbé, qui préside la séance, se donne la parole à lui-même et en profite pour tirer quelques coups de semonce. Il remet en cause la loi sur l’avortement, et, plus largement, « les majorités d’idées qui donnent à l’occasion une fâcheuse idée de la majorité ». Et pan pour Edgar Faure, inventeur de ces fameuses« majorités d’idées », qui correspondent, il est vrai, à son tempérament, et qui lui permettent de soutenir certains projets de loi du gouvernement et d’en condamner d’autres. Le concept de « majorité d’idées » est un costume taillé tout spécialement pour Edgar. On peut comprendre qu’il ennuie Labbé !
    Ce que celui-ci dit à la fin de son intervention est révélateur : il laisse entendre que l’éclatement du programme commun, tel qu’il se dessine si l’on entend les échanges entre socialistes et communistes, peut ouvrir la voie à une autre majorité socialo-giscardienne (il parle de rapprochement entre Ponia et les socialistes). Sa conclusion : « Nous devons nous préparer à l’éventualité d’être dans l’opposition plutôt que de renoncer à ce que nous défendons ! »
    Au fond, l’UDR nourrit la même crainte qu’éprouvent les communistes : que Giscard, Mitterrand, ou les deux les cocufient.
    Au dîner qui suit dans un bon restaurant près de Sainte-Maxime, La Reine Jeanne, Jacques Chirac fait un numéro pour redonner confiance aux siens. Il calme leurs appréhensions sur un rapprochement éventuel entre le Parti socialiste et les giscardiens en cas de rupture du programme commun. Sur les syndicats : pas question de modifier le règlement sur leur représentativité. Sur l’agitation sociale chez Renault : « C’est une offensive de nature politique. Si la Régie veut faire une grève générale, qu’elle fasse une grève générale ! » Et annonce que Giscard parlera, dans sa prochaine causerie au coin du feu, des dernières manœuvres de l’OTAN auxquelles la France a participé.
    Juste un mot – cela m’amuse beaucoup – sur l’art de la table dans les partis politiques. Au PC, chez les radicaux et à l’UDR, on aime manger, et bien manger : pas de gargotes infâmes ni de plateaux-repas ! Des fruits de mer (les communistes ont invité la presse, cet hiver, dans un restaurant, près de L’Huma , où chaque journaliste a eu devant lui une montagne d’huîtres !), des plats roboratifs comme Jacques Chirac les aime, ou du foie gras. Chez les socialistes et les Républicains indépendants, on mange peu et mal.
    12-19 mars
    Une semaine en Italie à l’occasion du congrès du Parti communiste italien. Je vois pour la première fois Berlinguer, le secrétaire général du PCI, fragile et faible, du moins en apparence, face à cette sallebondée, joyeuse. Les tendances, exprimées de surcroît, se manifestent et s’expriment d’une travée à l’autre : Berlinguer ne veut pas casser la Démocratie chrétienne ; Ingrao et Trentin le veulent, au contraire. Le premier, me dit-on, pense que la gauche n’est pas encore prête pour gouverner ; Amendola, lui, pense le contraire. Les uns ne veulent pas gérer la crise, les autres ne veulent pas arriver au pouvoir avec les seuls socialistes, ils préféreraient voir au gouvernement, en même temps que des ministres socialistes et communistes, des démocrates-chrétiens, ceux-là dont ne veut pas la majorité du PCI. La plupart ne souhaitent pas exercer le pouvoir s’ils ne réunissent que 51 % des voix dans le pays. Si on ajoute que, même les communistes italiens acceptent que les Américains exercent une influence considérable sur l’État italien, on a l’impression de se trouver à des milliers de kilomètres de la France.
    28-30 mars
    Séminaire gouvernemental à Rambouillet.
    Huis clos absolu pour ce séminaire de réflexion : ministres et secrétaires d’État se sont retrouvés vendredi soir enfermés dans le château de Rambouillet, avec deux compagnies de CRS disposées dans le parc pour veiller à ce que personne ne vienne briser leur isolement.
    Jacques Chirac loge dans les appartements de la tour François-1 er  ; Michel Poniatowski s’y est vu également aménager une suite avec chambre et salon. Giscard,

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