Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
conditions. »
    La transition est toute trouvée pour qu’il me parle de Michel Debré. Celui-ci lui a bien écrit une longue lettre, après son départ, en lui donnant une foule de conseils. « De quel droit ? » lui a demandé Chirac. Il ajoute, faussement naïf : « Debré l’a très mal pris, je me demande pourquoi ! »
    Quelques phrases qui valent leur pesant de cacahuètes, pendant que la voiture roule : « Quel entourage ! Ponia, un fasciste. Lecanuet, rien du tout ! »
    Je lui demande : « Et Barre ? » Sa réponse : « Barre a un défaut : il manque de caractère. Il n’a jamais su dire non à Giscard ! »
    Des propos qu’il m’a tenus aujourd’hui, parfois contradictoires, notamment sur Giscard, je conclus qu’il veut faire la démonstration à Giscard que lui seul, Chirac, peut assurer la victoire de la majorité en 1978. Qu’il lui est donc indispensable.
    Ce qui est difficilement compréhensible, c’est qu’il l’ait quitté avec autant d’éclat, et qu’aujourd’hui il revendique la première place dans le combat.
    Cela étant, « le beurre et l’argent du beurre », « droit dans ses bottes », « la paille aux fesses », « Il ne faut pas laisser les chiens pisser sur les pneus des voitures » : infantile et potache, voilà aussi le vrai Chirac 47  !
    12, 13, 14 et 15 novembre
    Voyage de Barre en Égypte. Je n’en retiens surtout que de très belles choses : les pyramides, le Sphinx, Louxor, la vallée des Rois, Abou Simbel.
    Pierre-Christian Taittinger, secrétaire d’État aux Affaires étrangères, est du voyage.
    Je passe plus de temps dans le tombeau d’Aménophis VI que dans le sillage de Barre.
    16 novembre
    Rencontré Michel Jobert, très remonté contre ce gouvernement : « J’y suis contraint, me dit-il, mais je dis que cette politique est médiocre. » Il juge que tout le milieu politique accepte sans broncher que la diplomatie américaine accapare les affaires mondiales. « Il est important que les hommes politiques français le disent, même si leurs paroles tombent dans le désert. Il n’y a pas de désert pour les paroles ! »
    Sur Jacques Chirac, qu’il connaît depuis longtemps, il n’a pas d’indulgence : « Les actions nées dans l’opportunité meurent dans l’opportunité ! »
    Sur Giscard, il n’en a pas davantage : « Voilà une gestion qui s’est effectuée de juin 1974 à août 1976, et qui a été un échec. Est-ce qu’on rassemble les Français sur un échec ? »
    18 novembre
    Confidence de Robert Boulin : il me raconte qu’hier, au déjeuner des ministres UDR chez Giscard, il lui a fait part de ses difficultés de ministre chargé des Relations avec le Parlement... et avec l’UDR :
    « Je lui ai dit qu’il ne fallait pas accumuler tous les obstacles à la fois : l’Assemblée européenne, le FMI 48 ... À moins qu’il ne cherche la rupture. De toute façon, une seule solution : il faudrait réunir les députés UDR. Ils sont cent quatre-vingts. Soixante ne se représenteront pas, et vingt seront écartés. Il en reste cent. C’est à ceux-là qu’il faudrait dire : vous êtes candidats uniques de la majorité. Dès lors, il n’y aurait plus aucun problème entre l’UDR et les giscardiens. La grogne disparaîtrait dans la minute ! »
    2 décembre
    Tout le monde est dans l’attente du grand rassemblement autour de Jacques Chirac, rassemblement qui doit marquer une nouvelle phase dans la vie de l’UDR, qui doit succéder à l’UDR. Michel Debré, que je rencontre aujourd’hui, est inquiet. Ce rassemblement ne lui dit rien qui vaille. Chirac lui paraît dénué d’idées politiques etéconomiques. « La lutte contre l’inflation, répète-t-il, je ne suis pas encore sûr qu’il soit convaincu de sa nécessité ! »
    Il me raconte l’histoire de la note que Robert Boulin avait fait parvenir en 1969 à Giscard, du temps qu’ils étaient respectivement ministre de la Santé et ministre des Finances. Boulin avait donc rédigé cette note sur les difficultés prévisibles de la Sécurité sociale en 1970. Giscard lui a renvoyé sa note barrée d’une phrase : « Éloignez de moi ce calice ! »
    5 décembre
    Assises extraordinaires de l’UDR. Foule immense, porte de Versailles, venue de toutes les rues avoisinantes. Cinquante mille personnes au moins qui attendent debout, dans le froid et la bruine. Parfois ce cri, comme une vague : « Chirac président ! »
    Yves

Weitere Kostenlose Bücher