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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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bordel. Il fera jouer l’article 16 pendant un an, et il sera dans l’incapacité de préparer l’élection présidentielle. Au bout d’un an, il changera la Constitution. C’est pour cela que je dis à Giscard : “Attention, vous serez le dernier président de la V e  République !” »
    Contrairement à ce qu’Olivier Guichard nous a dit l’autre jour, je crois qu’il engagera l’UDR derrière Giscard en 1978.
    Monologue de Chirac dans la voiture. Je ne l’interromps pratiquement pas par mes questions. Il parle sans se faire prier.
    Il a deux hypothèses de travail, en quelque sorte :
    Première hypothèse : la situation actuelle ne dure pas. Il faudra « rester droit dans ses bottes », et voir venir.
    Deuxième hypothèse : ça dure. Dans ce cas, deux sous-hypothèses : 1) Giscard remonte et gagne les élections de 1978 « grâce à notre action et à celle de quelques autres » ; 2) Giscard perd les élections, et il partira « la paille aux fesses huit jours plus tard ».
    François Mitterrand (voir plus haut) ne sera pas capable d’organiser l’élection présidentielle, et c’est le chaos. « Mitterrand a la capacité, dit Chirac, il a le caractère, mais il gouvernera avec les communistes, il n’est pas libre de gouverner sans eux. »
    La solution : « Nous sommes dans une citadelle assiégée, il faut faire une sortie et attaquer l’ennemi à revers. »
    Il revient sur sa rencontre avec Giscard d’il y a quelques jours. « Il m’a proposé deux jours, le mercredi ou le jeudi. J’ai reculé le pluspossible, jusqu’à jeudi donc. Je lui ai dit : “Vous êtes foutu, vous allez perdre les élections.” Il m’a répondu : “Ça fait deux ans que vous me dites la même chose !” Il est persuadé que tout ira bien, il est d’un optimisme invétéré. Il a besoin d’être aimé, voilà tout !
    « Je lui ai dit aussi : “Vous ne trouvez pas que c’est un comble : à Rocamadour, personne n’a prononcé votre nom ! Tout de même, moi, je ne me permettais pas de faire un discours sans parler de vous une ou deux fois !” »
    Chirac ajoute, à mon intention cette fois : « Au comité central de l’UDR, Olivier Guichard n’a pas osé parler de Giscard ! Je lui ai dit : “Mon vieux, tu pourrais en faire plus, tu pourrais avoir un peu plus de courage !” »
    Est-il en mesure, lui, d’amener l’UDR à faire la campagne des législatives derrière Giscard après tout ce qui s’est passé entre eux ?
    Il me dit qu’il y parviendra : « C’est très facile, j’arriverai à persuader mes troupes UDR que, si Giscard s’effondre, la majorité s’effondre aussi. »
    « Giscard donne aujourd’hui l’impression d’être léger. Parce qu’il a pris une série d’initiatives malheureuses comme la main serrée aux prisonniers. Et aussi parce que c’est au sommet de l’État que les choses ne vont pas. Tous les ministres ont répercuté cette impression d’indécision permanente et d’intervention permanente. Maintenant, ces rumeurs, parties du sommet, sont arrivées à la base, c’est-à-dire qu’elles sont dans l’esprit des Français, et elles y restent. »
    Il m’assure aussi – mais je n’ai aucun moyen de vérifier si c’est vrai – que lors de la conversation qu’il a eue avec Giscard le 25 août 1976, juste avant que sa démission ne soit officiellement acceptée, Giscard lui a dit :
    « Après les municipales, vous reviendrez à Matignon.
    – Eh bien, lui a-t-il répondu, il faudrait que beaucoup de choses aient changé ! »
    Il commente : « Il a tout fait pour me retenir, il ne voulait pas me lâcher avant 1978. J’ai tout fait, moi, pour être licencié ! Mais ça n’a pas marché. »
    Le 4 novembre, Giscard et lui ont également parlé de l’Europe : « Ce processus est une fois de plus engagé n’importe comment. Il l’a fait sans me consulter, d’ailleurs, alors que le conseil européen s’était très bien passé. Mais bon, je lui ai dit : “Je ne ferai pas de problème sur cette affaire européenne si vous prenez un engagement public derespecter le traité de Rome et de ne pas modifier les compétences de l’Assemblée européenne. Dans ces conditions, l’UDR suivra.” »
    Il ajoute à mon usage : « Il faut que Giscard comprenne qu’il ne peut pas tout avoir, le beurre et l’argent du beurre. S’il veut que l’UDR se batte pour la majorité, il doit accepter ses

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