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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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succession ; je ne vois pas pourquoi Georges s’en serait caché. Vous lui faites là un mauvais procès ! Peut-être que certains Français ont pensé que Georges Pompidou était là pour assurer la relève, mais ils auraient eu la même réaction si cela n’avait pas été le cas. »
    Il me raconte néanmoins que le Général a commenté d’une phrase le communiqué publié après la déclaration de Pompidou à Rome : « Je suis là, et bien là », avait-il dit.
    Il en veut beaucoup à Couve de Murville, me confie-t-il, me révélant du même coup qu’il avait été très hostile à sa nomination, parce qu’il le trouvait « pas fameux en gestion » et qu’il n’avait pas fait, au printemps 1968, ce qu’il devait faire pour dissuader le Général d’aller au référendum.
    Il revient sur la semaine qui a précédé le 27 avril et soupire : « La défaite était annoncée, prévue. Tout le monde était contre nous, l’opposition et la majorité. C’était fou, ce mécanisme ! »
    Il souligne, pour finir notre conversation, le rôle de Valéry Giscard d’Estaing, très négatif sur le référendum : « Il se disait que, tant que le Général serait là, lui, Giscard, ne pourrait jouer aucun rôle ! »
    Ce qu’il veut dire, c’est que Giscard, qu’il ne voyait à l’époque, me précise-t-il, que dans des circonstances « mondaines », pensait clairementque plus tôt le Général quitterait le pouvoir, plus vite, lui, Giscard, y accéderait.
    « Quand j’y réfléchis aujourd’hui, conclut-il, je me demande comment nous avons fait autant de voix ! »

    Rencontré Yves Guéna le lendemain ou le surlendemain. Je l’interroge sur le départ du Général.
    Il pense, lui, qu’après Mai 1968, le Général n’avait pas seulement un « référendum rentré ». Il voulait, me dit-il, promouvoir une politique de réforme, et il ne croyait pas que celle-ci pût être conduite par la voie parlementaire. Il restait convaincu que, depuis la Libération, toutes les grandes réformes du gaullisme avaient été obtenues soit par référendum, soit par ordonnance.
    Et puis, continue-t-il, le Général était sorti diminué de Mai 1968. Il n’avait pas été légitimé par les élections législatives qui avaient suivi. Il avait besoin de se retremper lui-même aux sources de la légitimité. En outre, le gouvernement Couve était contesté en permanence : troubles dans les universités et les services publics, fuite des capitaux, etc. Le Général n’avait plus la popularité qui avait été la sienne, il le sentait bien.
    Et le rôle de Pompidou dans la fuite des capitaux et la panique sur le franc ?
    « C’est une fable, m’assure-t-il. Les Français ont compris qu’il y avait une impasse de 10 milliards et qu’on annonçait une taxe sur les successions ! Voilà l’élément psychologique déclenchant ! »
    Il me raconte l’engrenage :
    « Au Conseil des ministres où Jeanneney a défendu son texte référendaire, tous les ministres étaient moroses, et le Général bougon. Il a dit : le gouvernement m’a proposé ce référendum, j’y consens. Ce qui était incroyable, vu qu’il l’avait lui-même demandé ! »
    Yves Guéna assure avoir vu venir la défaite « gros comme une montagne » : « Ma première réunion de campagne, je l’ai faite à Mompon, près de chez moi. Il y avait peu de monde, je n’ai pas réussi à faire bouger les assistants. En sortant, je me suis dit que j’avais fait un bide. En fait, ce n’était pas moi qui en faisais un, mais le référendum ! Notre campagne était molle, même chez les militants, tandis que celle des notables contre nous était très bien faite. Quant aux milieux patronaux, ils nous ont laissés tomber ; la droite n’avait plus la trouille parce que les élections législatives s’étaient bien passées pour elle et que le recours existait : c’était Pompidou. »
    À propos, la déclaration de Rome a-t-elle été faite plus ou moins en accord avec le Général, comme me l’a dit Guichard ?
    « Je suis sûr que c’est faux, me dit-il ; que Pompidou a voulu provoquer le Général, au contraire. Ce vieux renard savait bien l’importance de la moindre déclaration. Peut-être que Balladur a été le premier étonné, mais, ce dont je suis certain, c’est que la déclaration a été concoctée avec Pierre Juillet... »
    Il me raconte l’un des derniers déjeuners qu’il ait faits à l’Élysée,

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