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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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fière qu'elle soit présidente. D'abord parce que c'est une sacrée revanche, pour l'avorteuse qu'on l'a accusée d'être, de se faire élire avec des voix démocrates-chrétiennes. Ensuite parce qu'elle est française, et enfin parce que c'est elle, l'ancienne déportée, qui parle de paix aux Allemands.
    Michel Debré, dont la voix s'est reportée au deuxième tour sur Simone Veil, me dit à l'issue du scrutin qu'il est sûr qu'une voix RPR au moins a manqué à Simone Veil. Il s'agit de celle d'un député RPR dont il tait le nom, qui lui a montré, au moment du vote, un bulletin blanc : « Ne rien inscrire, lui a-t-il dit, c'est tout de même mieux qu'inscrire un nom. Cela prend moins de temps ! »

    18 juillet
    Simone Veil lit son discours, très émue, d'une petite voix. Habillée d'un tailleur vert et blanc ravissant (Chanel ?), elle est vraiment superbe. Défi de la paix, défi de la liberté, guerre économique, chômage : « Nous avons tous conscience, dit-elle, que ces défis, ressentis d'un bout à l'autre de l'Europe avec la même acuité, ne peuvent être efficacement relevés qu'en commun. »
    Une phrase pour se féliciter du pluralisme de cette assemblée, qui « peut être un facteur d'enrichissement », et son discours, une dizaine de pages bien tassées, s'achève sous les applaudissements. L'attention se relâche, la mienne en tout cas, pendant que les différents orateurs lui répondent.
    Je vois Simone Veil bâiller en même temps que moi pendant que Scott Hopkins 36 parle. Puis écouter avec davantage d'attention le chef du PC italien, Enrico Berlinguer, parler d'eurocommunisme. Il est, dans ses propos, beaucoup plus européen que les communistes français. Les Anglais, dans tout cela, affectent une nonchalance de bon ton et un désinterêt permanent.

    21 juillet
    Quelques petites anecdotes qui, mises bout à bout, rendent difficilement compréhensible le comportement actuel de Jacques Chirac :
    1. À Luxembourg, avant le scrutin, il rencontre Simone Veil. Il est dans sa voiture, assis à l'avant (comme souvent depuis son accident, où il se trouvait à l'arrière). Simone Veil, dans un mouvement instinctif, s'approche de lui. Sans attendre, il lui dit : « Nous voterons pour vous ! » Lorsqu'il dit cela, il sait pertinemment que le groupe RPR au Parlement européen pense au contraire à déposer une candidature séparée.
    2. Lorsqu'il arrive à Strasbourg, le 17, la décision est prise de présenter Christian de la Malène à la présidence de l'Assemblée européenne, face à Simone Veil. Chirac s'y soumet sans manifester la moindre réticence.
    3. Simone Veil à peine élue, Michel Debré est chargé de prononcer le discours au nom de son groupe (Démocrates européens de progrès, dont le RPR est adhérent). Il a une phrase chaleureuse à l'égard de la présidente française nouvellement élue. À peine a-t-il terminé que Chirac le lui reproche en public : « Moi, dit-il, je n'aurais pas fait de tels compliments à Simone Veil ! » Naturellement, sur la dizaine de parlementaires présents, il s'en est trouvé quelques-uns pour aller illico rapporter ses propos à Simone Veil.
    Le bilan est négatif sur toute la ligne : Chirac a présenté un candidat contre Simone Veil au premier tour, ce qui a l'air d'être en réalité un ultime coup de pied à Giscard, et il se met mal inutilement avec elle, que, par ailleurs, il respecte et aime beaucoup.

    28 août
    Reprise sur les chapeaux de roue de l'activité politique.
    Pierre Bérégovoy, que je rencontre au siège du Parti socialiste, me parle de la ridicule affaire de la radio libre du Parti socialiste, pour laquelle Mitterrand et d'autres parlementaires socialistes ont été inculpés, le 24. Inculpés ! Le gouvernement s'est débrouillé pour que l'inculpation ait lieu hors session parlementaire, donc sans qu'il soit nécessaire de lever l'immunité des inculpés.
    « Sur le fond, me dit Bérégovoy, il est difficile de savoir si cela nous sert ou nous dessert. Ce que le gouvernement veut prouver, c'est que ni Mitterrand ni le Parti socialiste ne sont au-dessus des lois. Mais nous plaidons, nous, que la loi actuelle est bafouée : au monopole technique, défini par la loi actuelle, le pouvoir a substitué un monopole politique. Le pluralisme n'est aucunement garanti dans le fonctionnement actuel de la loi. »
    L'inculpation a été faite, c'est le juge qui l'a précisé, « sur réquisition de la

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