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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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gagner ! »
    Je lui demande si, tout de même, il ne craint pas que Debré lui enlève des voix. « Le paramètre Debré n'entre pas dans ma réflexion », me répond-il superbement.
    Vrai ou faux ? Il s'explique en comprenant mon incrédulité : « De deux choses l'une : ou bien je ne me présente pas, et, dans ce cas, je soutiendrai Debré, quitte à faire campagne pour lui ; ou bien je me présente, et, dans ce cas, Debré ne m'enlève pas une voix ! »
    Il termine par ces mots : « Je voulais récuser les combines. Ne pas faire comme Riolacci 39 qui disait l'autre jour à un journaliste de mes amis (ce doit être Paul Guilbert ou Franz-Olivier Giesbert, qu'il voit en tête à tête, comme moi, lorsqu'il veut faire connaître ses décisions ou éclairer sur sa stratégie, souvent fluctuante) : “Si VGE est élu de justesse, il peut prendre Rocard comme Premier ministre et Debré comme ministre d'État. Cela, c'est de la combine, et je la récuse !” »
    Pourquoi dire tout cela aujourd'hui, fin juillet ? Il rigole franchement : « Je voulais pousser un contre- ut avant de partir en vacances ! »

    4 août
    Midi. Comme prévu depuis le mois dernier, j'interromps mes vacances pour remonter trente-six heures dans la Nièvre. François Mitterrand m'attend à Nevers au train de 10 heures, chemise rayée beige et orange, costume de gabardine beige.
    Comme d'habitude, pas un mot de politique dans les premières paroles que nous échangeons. Ce soir, peut-être, dans la voiture – et encore, si je suis habile !
    En trente-cinq ans de vie politique nationale, m'assure-t-il, il n'a jamais manqué d'aller toutes les semaines dans la Nièvre : il n'en a pas manqué une. Quand il ne pouvait pas y aller pour le week-end, il se débrouillait pour y passer une journée, le jeudi ou le lundi. Sa circonscription compte près de 150 communes : lorsqu'il en a fait le tour, il recommence inlassablement, sans jamais marquer de pause. « C'est très intéressant, d'ailleurs, dit-il, pas blasé le moins du monde ; on suit le cours des choses, on voit évoluer les gens... »
    Il s'arrête en chemin à Langy, chez une femme qui l'avait souvent hébergé, à ses débuts dans la Nièvre, car sa maison est absolument équidistante de Château-Chinon et de Nevers, et qui aujourd'hui lutte contre un cancer. « Lorsqu'elle a su qu'elle avait un cancer, elle n'a rien dit, elle s'est promenée une semaine dans la campagne. Elle en est revenue et m'a dit : je me battrai. Elle a fait tout ce qu'il était possible de faire : chimiothérapie et tout le reste, avec le professeur Israël. Je l'ai vue dix fois agonisante, et elle a triomphé ! »
    Pour aller à Langy, nous passons par Azy, d'où est natif, ce qu'il m'apprend, celui qui présidait l'Assemblée nationale le jour du coup d'État de Louis-Napoléon, le 2 décembre 1851. Est-ce pour cette raison qu'il avait décidé, je ne sais quand, d'écrire un livre sur ce fameux coup d'État du 2 décembre ? Je le lui demande.
    « Non, me dit-il, je ne m'y étais pas intéressé moi-même ; un éditeur me l'a demandé, je m'y suis intéressé en chemin. »
    Nous arrivons à Langy. Splendide demeure. Il monte au premier étage converser avec son amie. Je l'attends dans un bureau où la domestique ne m'offre pas un verre d'eau.

    Château-Chinon, 14 h 30. Critérium cycliste. J'apprends que Mitterrand sait tout sur le vélo. Il compose avec le sélectionneur de l'équipe de France, en véritable pro, la liste des sélectionnés. Noms inconnus de moi : Bernard Hinault, Martin (« Vous ne pouvez pas ne pas prendre Martin ! » dit Mitterrand, sérieux comme un pape, au sélectionneur). Et Duclos-Lassalle ! Surtout ne pas oublier Duclos-Lassalle !
    « Attention, dit en riant le colonel-sélectionneur Marilier, vous faites de l'intimidation ! À quoi reconnaît-on que commence l'intimidation ?
    – À l'inflexion de la voix ! » répond Mitterrand en souriant.

    Dans la voiture, entre Langy et Château-Chinon, il m'apprend qu'il a conservé, envers et contre tout, depuis des années, des amis qui n'appartiennent pas au monde politique, amitiés qui datent du 104, rue de Vaugirard. Un amateur d'art et de tableaux qui vit, célibataire, à La Charité-sur-Loire et rue Vavin, à Paris, au milieu de centaines d'œuvres célèbres. Un notaire du Havre et de droite. À propos, Bettencourt est resté « un ami fidèle de tous les jours ».
    Je suis

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