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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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pour négocier, voilà tout. Et il le fait bien : « Il est régionaliste à Rennes, planificateur ailleurs ; il en fait un peu trop partout. Naturellement, il ne tiendrait pas ces discours contradictoires s'il voulait vraiment être président. Il arrivera plus probablement en numéro 3, et, dans ce cas, il devra bien négocier avec nous ! »
    Et Mitterrand ? Il a un fil à la patte : les communistes. Giscard ne se privera pas d'exploiter la peur des Français : « Avec Mitterrand, voilà ce que vous risquez : l'inconnu, l'aventure ! »
    Quant aux communistes, il en sait autant que nous tous, pas davantage : il avoue son incertitude. Veulent-ils barrer la route de l'Élysée à Mitterrand ? Ou, au contraire, finiront-ils par s'y rallier ? Serisé se rassure aussitôt : « S'il n'y avait pas le problème de l'entrée de ministres communistes au gouvernement, Mitterrand l'emporterait sans doute. Le Président le sait, il est lucide. Mais le problème se pose. Et c'est là-dessus qu'il va gagner ! »
    Tout cela est bel et bon, mais quand le Président compte-t-il entrer en campagne ? À ma surprise, j'ai peine à le croire, Serisé avoue n'en rien savoir. Il m'explique que tous les collaborateurs de VGE ont passé avec lui un pacte : « Ne nous dites rien ; lorsque vous vous déciderez, nous serons là. »
    Suit un long passage sur ses relations à lui avec Giscard. Un homme politique, surtout lorsqu'il est au pouvoir, est entouré d'ambitions. De gens qui pensent inévitablement à leur carrière. « Cet homme, me dit-il – il parle de Giscard –, ne peut avoir confiance en personne. Il y a quelques jours, il m'a demandé ce que je voudrais faire, après l'élection. Je lui ai demandé s'il était prêt à répondre à n'importe laquelle de mes demandes. Oui, m'a-t-il assuré. Alors, lui ai-je dit, je ne vous demanderai jamais rien ! »
    Ce dialogue entre un président et son conseiller préféré ne manque pas d'allure.
    « Croyez-moi, conclut Serisé, il faut rester libre ! »
    Et Raymond Barre, dans tout cela, quelle sera sa place dans la campagne ? Le Premier ministre parlera, certes, mais quand ? Je me trompe peut-être, mais il me semble que Serisé n'est pas trop pressé...

    Même jour, plus tard
    Je reviens sur quelques échanges que je n'ai pas notés sur le moment après le dîner d'hier avec Mitterrand. Il s'attend bien sûr à une offensive de la droite sur les ministres communistes. Il souligne cependant que dans les sondages où il est à 50/50 avec Giscard, 80 % des Français ont déjà pris leur parti : ils accepteraient des ministres communistes.
    « Vous verrez, plaisante-t-il ; à la fin de ma campagne, je serai obligé de dire : “Certains, au début, ont cru pouvoir mettre en doute ma volonté de prendre des ministres communistes au gouvernement. Non, je n'ai pas varié sur ce sujet : il faut des ministres communistes au gouvernement !” »
    Plutôt réticent, André Rousselet lui fait remarquer qu'à propos de communistes, ceux-ci lui préparent un fabuleux rendez-vous pour la prochaine fête du travail : ou Mitterrand se rend au 1 er  Mai unitaire, et il fait peur à tout le monde ; ou il n'y va pas, et le PC dénoncera son absence. Mitterrand hausse les épaules : il verra bien.
    Dernière chose remarquée au cours du dîner : l'agressivité à l'égard de Giscard monte de façon continue chez Mitterrand. Comme s'il avait besoin de s'échauffer, à l'instar d'un boxeur avant d'entrer sur le ring. On lui dit que Jean-François Deniau l'appelle, lui, Mitterrand, « Fantômas ». « Tout de même, ricane-t-il, Fantômas, lui, portait des diamants. Je dirai à Deniau, si je le vois : “Vous vous trompez, les diamants, ça n'est pas moi !” »
    Même type de sortie à l'intention de Michel d'Ornano : « Il a dit à Pierre Mauroy, paraît-il : “Votre Programme commun, vous allez le passer dans une valise, clandestinement, en échappant à la douane !” Là encore, je dirai qu'il se trompe d'homme : moi, je déclare tout à la douane. Pas Giscard ! »

    28 février et 1 er  mars
Congrès des radicaux de gauche.
    Pour commencer, beau morceau d'éloquence de l'avocat Jean-Denis Bredin qui s'interroge sur l'apport du Parti radical à la gauche : « D'abord, le doute laïque, l'esprit libre, méfiant à l'égard des dogmes, le doute à l'égard des Églises. En second lieu, la méfiance à l'égard de tous les pouvoirs. Enfin, le

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