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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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finirez par venir avec nous.” »
    Nous reparlons de Chirac que Pasqua semble considérer comme un adolescent de génie, non maîtrisable, à surveiller comme le lait sur le feu. Sur la peine de mort, par exemple, Jacques Chirac s'est « laissé freiner dans ses pensées et dans ses élans ». Il était favorable à son abolition. Il n'a pas osé en parler pour des raisons électorales. « C'est une erreur, affirme Pasqua. Un homme politique doit dire ce qu'il pense. Il s'est laissé avoir par gentillesse et par habitude. Il lui faut sortir de sa chrysalide ! »
    Aurait-il les mêmes tentations castratrices que Marie-France Garaud et Pierre Juillet ? « Ils ont été tous deux très utiles, avoue Pasqua. Mais ils ont poussé les choses à l'extrême. Chirac ne pouvait être prisonnier de leurs chimères ! »
    Et puis, cet aveu : « À partir de 1976, notre ambition était de reconquérir le pouvoir ! »

    Grey, 15 h 20
    Chirac arbore ce curieux sourire qu'il a lorsqu'il parle de lui devant les électeurs, comme incrédule et ravi de ce qui sort de sa bouche. Il est sur un petit nuage et se lance dans ses couplets favoris dont il sait qu'ils marchent à tous coups. Il fait un tabac sur la Grande-Bretagne et le Marché commun, se paie les bureaucrates de Bruxelles, « excellents lorsqu'il s'agit de faire des rapports en trois points, mais nuls lorsqu'il s'agit de faire du commerce ! ». Ovations garanties !
    Dans ces rencontres avec les Français, on entend tout et n'importe quoi.
    Quelqu'un, Dieu sait pourquoi, pose une question sur les pompes funèbres. Chirac lui répond illico en annonçant une réforme capitale desdites pompes funèbres, sur laquelle il serait bien incapable d'articuler un seul mot.
    Question sur les emplois « au noir » des gendarmes et des militaires, qui, à écouter l'interlocuteur de Chirac, nuisent gravement aux chômeurs. Il s'agit, à l'en croire, de pas moins de 700 000 emplois volés en quelque sorte aux sans-emploi. Réponse de Chirac : « Le problème du chômage n'est pas de savoir mieux répartir la famine, comme le veut le candidat Giscard d'Estaing ! »
    Forte attaque, enfin, à propos de la politique étrangère du Président, sur un thème connu : « Jamais l'esprit de Munich, l'esprit de dialogue systématiquement recherché, n'a conduit à la paix ! »
    Giscard, ennemi numéro un ? C'est inévitable à partir du moment où les deux hommes chassent le même électorat, celui de la majorité. Mitterrand, au milieu, bénéficie de cette bataille dans laquelle, un jour comme aujourd'hui, par exemple, il n'apparaît même pas.

    17 heures
    Rencontre avec la presse à Besançon. Différence de Chirac avec VGE : il joue sur la relance de la croissance, pas VGE. « D'ailleurs, suggère-t-il non sans culot, le Président ne me cite pas trop ; cela veut dire qu'il ne conteste pas le bien-fondé de mes propositions ! »
    Automobile, textile, horlogerie : il regrette les contraintes excessives pesant sur l'économie, qui vont d'une taxation inadaptée à de trop astreignants contrôles ; réclame des protections communautaires ou nationales sur les produits qui viennent de l'étranger ; affirme son hostilité à quelque nationalisation que ce soit ; et joue la carte libérale : « Je ne suis pas dirigiste », conclut-il.
    En marge de la rencontre, les pronostics vont bon train : le responsable fédéral du RPR assure qu'en Haute-Saône, Chirac sera à égalité avec Giscard ; que, dans le Doubs, il le devance. Dans le Jura, en revanche, Giscard devrait l'emporter. À Belfort, enfin, le PS sera largement en tête.
    Je m'émerveille une fois de plus devant cette faculté qu'ont les militants politiques – et leurs dirigeants, le plus souvent – à s'illusionner sur des résultats électoraux. Peut-être ce moteur leur est-il nécessaire ?

    Un peu plus tard, à Besançon, dans une autre salle du Palais des sports.
    Une note discordante parmi les questions : « À plusieurs reprises, vous avez entre vos mains la clef de voûte, lui dit un mécontent, et vous avez choisi de ne pas abattre la voûte en ne déposant pas de motion de censure ! »
    Pour la première fois, je l'entends faire cette réponse sur l'avenir : « Si je suis élu, assure-t-il, je ne dissoudrai pas l'Assemblée nationale. Il n'y aura pas d'élections législatives. »
    Pourquoi donne-t-il cette assurance ? Pour montrer qu'il n'ouvre pas une période de

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