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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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l'est resté ! »
    Il rit franchement à ce souvenir. Puis nous dit au revoir sur une phrase qui nous laisse songeurs, Guimard et moi : « Allons, au prochain tournant ! »

    28 février
    Campagne pour les élections municipales. Ça tangue en politique, ça tangue donc à la Haute Autorité. Il est évident que si, après l'échec aux cantonales de l'année dernière, la gauche accentuait son dérapage, son pronostic vital serait engagé. Les sondages, pour la gauche, varient sans que l'on sache trop bien s'il s'agit ou non d'intoxication : ils ont d'abord été très mauvais, puis meilleurs depuis quelques jours. La gauche est partie de très bas, et, brutalement, la rumeur est qu'elle tiendra le coup.
    La vérité, comme le dit Mitterrand à Paul Guimard, est sans doute au milieu. La majorité actuelle va perdre toutes les villes qu'elle avait gagnées à 600 voix près. Ailleurs elle va conserver ses bastions.
    Il est évident que la perte de 50 villes sonnerait d'une certaine façon le glas de l'expérience. À moins de 30 villes perdues, la gauche s'en sort. Entre 30 et 50, ce sera affaire d'appréciation.

    6 mars
    Défaite cuisante de la gauche au premier tour des municipales. Lionel Jospin, Paul Quilès, Gaston Defferre, Mauroy lui-même sont très sévèrement secoués.
    La querelle de la légitimité de la gauche ne se pose pas tout de suite – ou du moins personne ne la pose encore. Mais jusqu'à quand ?
    Sur les 82 villes que détenait le PS, 31 ont été conservées, 4 perdues dès le premier tour, 30 sont en ballottage.
    Sur 106 villes, le PC en a 21, le PS 31, l'UDF 19, le RPR 24, les divers droite 11. Succès, donc, du RPR dans le camp de l'opposition.

    13 mars
    Deuxième tour des municipales : « Le coup passa si près que le chapeau tomba... » (Victor Hugo).

    15 (ou 16) mars
    Grève à la télévision.
    François Mitterrand, qui attend pour remanier son gouvernement, ne sait plus à quel saint se vouer : comment annoncer un gouvernement fort avec une télévision en grève ?
    J'interroge Gabriel de Broglie, dont la connaissance du service public est proportionnelle au temps qu'il y a passé, c'est-à-dire immense, sur la durée probable de la grève. « Rien à faire, me dit-il, c'est une situation idéale où la CFDT peut faire monter les enchères : vous vous rendez compte, la formation d'un gouvernement ! et les syndicats qui sont maîtres de le faire savoir ou pas ! »
    Jean-Claude Colliard m'appelle depuis l'Élysée. Je lui dis que personne n'est à même de dire quand la grève s'arrêtera. Je parle à mots à peine plus couverts. De deux choses l'une : ou bien Mitterrand annonce la formation de son gouvernement tout de suite, ou alors, s'il veut que la télé en parle, il attend la semaine prochaine.
    Quelques minutes après, annonce officielle de l'Élysée : le remaniement est reporté à huitaine.
    Est-ce l'effet de mon échange avec Colliard ? Je ne sais.

    18 mars
    Ce n'était sans doute pas l'effet de ma conversation avec Jean-Claude Colliard : le remaniement annoncé n'a donc pas eu lieu. On l'attend toujours, pour le 23 mars.
    Le vrai problème, m'assure-t-on, tient à Pierre Mauroy. Mitterrand, s'il est persuadé qu'il lui faut tenir compte du demi-échec des municipales, tient néanmoins à le garder. Mais Mauroy ne veut pas être l'homme d'une troisième dévaluation. Mitterrand voudrait au contraire – il l'a dit à Maurice Faure – le garder jusqu'à la fin de l'année, quitte à l'user jusqu'à la corde.
    Autre difficulté pour lui : il ne peut aisément se débarrasser des ministres qu'il juge « médiocres », auxquels il demande au surplus de ne pas se représenter à des législatives partielles, car il a peur qu'ils les perdent et que leur échec rejaillisse sur le gouvernement tout entier.
    André Rousselet plaisante devant moi : « Defferre et Chevènement auraient été battus que cela aurait fait de la place ! »
    Certes, mais il aura du mal à me démontrer que, pour que Mitterrand se porte mieux, pour qu'il ait les coudées plus franches, il fallait que davantage de ses proches soient battus.
    La résistance de Mauroy doit prodigieusement agacer Mitterrand. Ce qui complique les choses, me semble-t-il, c'est qu'à ces élections tous deux ont gagné le deuxième tour, après avoir perdu le premier, en attirant à eux des électeurs de gauche, voire d'extrême gauche, qui, au premier, jugeaient le gouvernement trop

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