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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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commission des résolutions, vers 22 heures, les convives se dispersent, les uns pour sonder Rocard dont la présence a été signalée dans un hôtel de la ville, et qui, Premier ministre, ne participera pas à la commission des résolutions, les autres avec Michel Charasse pour prendre le pouls des fabiusiens.
    Au bout de quelques minutes, sur la place de Rennes où s’est réunie ce soir la commission, Philippe Barret ressort, furieux, et me retrouve. Il est hors de lui, persuadé que tout ce tapage ne sert plus à rien, que le PS est en morceaux, que tous les efforts de Chevènement pour sauver une ligne politique ne servent plus à rien.

    Dimanche matin
    Congressistes et journalistes se retrouvent au congrès. La commission des résolutions, qui n’est pas terminée, s’est transportée, pour continuer les négociations, dans une salle voisine. Un technicien de TF1 vient me chercher : « Tu veux écouter quelque chose de drôle ? me dit-il. Viens avec moi dans le car-régie... »
    Je le suis. Et j’entends – car les micros sont restés branchés dans la salle où Mauroy, Jospin et les rocardiens rendent compte des résolutions votées, ou plutôt non votées, la veille – l’intégralité des propos échangés entre les rapporteurs et les militants. Bientôt tous les journalistes, alertés, entourent le car où ils écoutent le compte rendu apocalyptique que fait Mauroy. Les militants réclament alors, presque sur l’air des lampions, de ne « pas se coucher devant Fabius ». « Synthèse ! synthèse ! » clament-ils, tout en maintenant leurs exigences. « Trois points, estime Mauroy, ne sont pas négociables : le poste de premier secrétaire, le secrétaire aux fédérations et le trésorier. »
    Les militants lui font une ovation.
    Lionel Jospin prend alors la parole. Il répète avec force son refus d’accepter que le Premier secrétaire ou le secrétariat chargé de la coordination entre les fédérations changent de main. « Nous avons dit non, ils en ont pris acte. Moi, personnellement, j’ai dit non, et je resterai sur ma position ! » Quelques interjections s’élèvent : « Vote ! Vote ! On passe au vote ! » Jospin continue : « Nous n’avons rien en poche. Je fais une proposition – si le premier secrétaire est d’accord, naturellement... Nous vous consultons tout de suite : vous votez sur la nature du mandat que vous nous confiez. Pour une synthèse générale ? »
    Aucun bruit dans la salle.
    « Pour une synthèse partielle ? »
    Bruits divers.
    Jospin reprend (c’est toujours lui qui mène l’affaire, pas Pierre Mauroy) : « Je comprends que les camarades sont pour la synthèse générale, mais à nos conditions ? »
    C’est bien cela, apparemment, que nous comprenons, toujours entassés dans le car-régie, sans voir la scène.
    Pendant ce temps-là, la commission des résolutions continue ses travaux. Je m’y rends. Interdiction d’entrer pour les journalistes, à l’exception notable de Serge Moati qui, réalisant un film sur lecongrès de Rennes, est seul autorisé à pénétrer dans le saint des saints.
    Je reste donc dans l’antichambre où Roland Dumas et Édith Cresson sont venus aux nouvelles dans le but de tenir au courant Mitterrand, resté à l’Élysée mais à l’écoute de Rennes.
    Roland Dumas résume à mon usage la bagarre interne : « C’est le Cambodge plus le Liban ! »
    Édith Cresson est plus nette encore : « Tout est de la faute de Laurent, me confie-t-elle. Le fils de Dieu, me dit-elle, évoquant Fabius, ça ne marche pas. On ne fait pas n’importe quoi sous prétexte qu’on est le fils de Dieu ! Fabius est un monstre politique ! »
    J’en conclus que Mitterrand s’est débrouillé pour envoyer deux observateurs au congrès, l’un favorable à Fabius, l’autre contre. Même dans le choix de ceux qui présentement sont ses représentants politiques, il continue de dresser un camp contre l’autre !
    Dumas me raconte qu’il a rencontré tout le monde, mais que Lionel Jospin est le plus dur (plus que Mauroy, en effet, on s’en était aperçu !).
    Arrive Huchon : « Ça va bouger ! » Il assure que le vote sera proposé sur trois textes : le premier, Mauroy-Jospin ; le second, Michel Rocard ; le troisième, Chevènement.
    Et Fabius ? Il n’en sait rien.
    Dumas soupire d’aise : « Tout était fait, m’explique-t-il, pour éviter que Michel Rocard ait en main l’organisation du

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