Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
passe ici – ce à quoi lui aussi, au demeurant, contribue : « Le choc des ambitions, la fermeture de l’huître, l’appétit de requins ! » Il me révèle, ainsi qu’au petit groupe de journalistes qui s’est agglutiné autour de lui, que Mitterrand a dû intervenir directement sur Michel Rocard pour qu’il ne signe pas le texte Mauroy-Jospin-Chevènement.
    Claude Estier passe par là : « Le problème, me dit-il, ce n’est pas seulement le secrétariat du Parti, c’est la composition de la direction du Parti. » Que veut-il dire ? Qu’il accepterait de voir Mauroy quitter la direction du Parti à condition que ses amis, dont il fait partie, y restent ? Un peu fort de café, tout de même !
    Au déjeuner, dans la multitude des tables où les congressistes se restaurent, je me retrouve avec Jean-Luc Mano 12 , du service politique de TF1, et Gérard Carreyrou – car nous avons tous fait le voyage pour ne pas manquer l’événement – en compagnie de Marcel Debarge, sincèrement bouleversé par la bataille rangée dont ce congrès donne l’aspect. Bien que, pour le moment, les couteaux ne soient pas vraiment sur la table, il prévoit une division du Parti à l’issue du week-end.
    Je réconforte Françoise Castro, la femme de Fabius, qui se plaint amèrement : le service d’ordre lui a refusé l’entrée du congrès car elle n’avait pas le bon badge. Elle ne doute pas que ce soit là une mauvaise manière faite à son mari.
    Bref, il appert que Laurent Fabius s’oriente vers l’entrée dans une minorité d’opposition, c’est-à-dire qu’il refusera toute synthèse et donc prendra la responsabilité de l’éclatement du Parti.
    Pourtant, autour de lui, beaucoup de ses partisans hésitent : Bastien Leccia, par exemple, m’assure que les choses n’iront pas jusque-là, qu’on évitera la rupture. Debarge, tout à l’heure, pensait manifestement le contraire. Jean Poperen, paraît-il, serait d’accord pour faire monter la pression, certes, sans aller toutefois jusqu’au schisme. Daniel Vaillant, proche de Lionel Jospin, que je croise au sortir de la commission de validation des mandats, se demande tout haut ce que veut et cherche Fabius.
     
    Samedi après-midi, j’intercepte Fabius pour lui demander d’intervenir dans le journal télévisé de 20 heures. Après tout, d’une certaine façon, c’est le héros inattendu de la fête ! Il me dit : « Je suis crevé. Et, en plus, je ne sais pas où on va ! » S’il ne le sait pas lui-même...
    Questions en coulisses : que fait Rocard ? Quand arrivera-t-il ? Son directeur de cabinet, Jean-Paul Huchon, est déjà là : Fabius l’a croisé dans le parking de la salle des congrès.
    Huchon passe. Les journalistes l’entourent.
    « Tu t’actives ? lui demande-t-on.
    – Eh, une synthèse, ça ne se fait pas tout seul !
    – Tu y arriveras ?
    – Ça m’étonnerait... »
    Puis nous écoutons Louis Mermaz à la tribune, plein de bonnes intentions : « Il faut, dit-il, un parti uni, renforcé, rassemblé ! » Il faut « débattre, et non pas en découdre ». « Je suis, ajoute-t-il, favorable à une synthèse qui rassemble, et hostile à une synthèse qui exclue qui que ce soit ! »
    Je ne sais pas ce qu’est une synthèse qui exclut : dans ce cas, ce n’est plus une synthèse, il me semble. Enfin, bon, puisqu’il le dit, ça doit exister !
    Il est le premier, je crois, à dire à la tribune que Michel Rocard et Mitterrand, tous deux absents au moment où il s’exprime, sont favorables à cette synthèse. « Nous ne transformerons pas, conclut-il sans originalité, le Parti les uns contre les autres, mais tous ensemble ! »
    C’est au tour de Pierre Bérégovoy de parler. Il est nettement en service commandé, cela s’entend dès les premières minutes : « C’est un congrès difficile, commence-t-il, mais c’est un beau congrès. Il fallait ouvrir le débat, et Laurent Fabius, dans sa motion, a eu raison de le faire. » Il continue alors que tout le monde a compris de quel côté il se range : « Nous sommes unis sur l’essentiel, mais il nous faut moderniser le Parti. » Pour quoi faire ? « Il nous faut, rappelle-t-il à l’assistance qui l’a complètement oublié, gagner les élections de 1993 ! » Dans la fin de son propos, toujours favorable à LaurentFabius (« qui incarnait et incarne toujours l’espoir du rassemblement et la volonté de modernisation »), il

Weitere Kostenlose Bücher