Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
dernier. La majorité bénéficie d’une défaite massive, d’une démobilisation du PS. C’est son socle, mais ce n’est pas une rente de situation pour plusieurs années ! »
    Édouard Balladur, devenu l’adversaire principal des socialistes, candidat à l’élection présidentielle ? Lentement l’idée s’impose depuis l’automne. Il n’y avait aucun doute, en avril dernier : Chirac serait candidat, et Balladur n’était à Matignon que pour lui permettre de se préparer au combat suprême.
    Et puis, aujourd’hui, je m’aperçois que, du côté de l’opposition, chez Jospin en tout cas, la candidature de Balladur, donc le conflit de celui-ci avec Chirac, est plus qu’envisageable. Jospin est bien de cet avis : « Si Jacques Chirac est candidat, me dit Jospin, l’actuelle popularité de Balladur ne se transférera pas sur lui. Si Balladur est candidat, ce sera la crise à droite. » Il considère donc l’hypothèse Balladur comme probable.
    Et à gauche ? Rocard ? « C’est l’hypothèse la plus vraisemblable », me répond-il, laconique. Delors ? Moue de Lionel Jospin : « Il est trop à l’écart. Il est très loin, il n’est pas sûr que le PS soit prêt à se donner à quelqu’un qui vient de l’extérieur. »
    Je lui demande avant de le quitter comment s’est passée sa rencontre, la première depuis longtemps, avec Mitterrand, rencontre qu’il a lui-même rendue publique, l’autre jour, au « Club de la presse ». « Nous avons parlé de tout, me dit-il, sans revenir sur mon départ forcé du gouvernement en 1992. Même si la cohabitation est un obstacle, il faut s’y faire, on ne peut pas y échapper. Je comprends la position de Mitterrand, différente de celle qui était la sienne entre 1986 et 1988. Aujourd’hui, il est obligé de sortir du septennat par le haut, de ne pas se mêler de trop près de la politique. Ma position est claire : pour le PS, la rupture avec François Mitterrand n’aurait pas de sens. À condition de ne pas se soumettre aux obligations qui sont les siennes en matière de cohabitation. ».
    Il est loin, sur ce sujet, d’être sur la même longueur d’onde que Jean-Paul Huchon, donc que Michel Rocard.
    15 octobre
    Le lendemain de cette conversation, je file chez Pierre Mauroy. Il est rentré avec Michel Rocard de Berlin où ils sont tous deux allés se recueillir sur la tombe de Willy Brandt, un an après sa mort 53 . Selon lui, la stratégie de Rocard est simple : il lui faut rassembler la gauche et ouvrir sur la droite. Pour le moment, malheureusement, Édouard Balladur occupe le terrain du centre droit et du centre gauche.
    « Aujourd’hui, donc, le PS ne peut bouger qu’en faisant le rassemblement à gauche. Les difficultés de Michel Rocard tiennent à ce qu’il a tout fait, ces dernières années, pour se mettre au centre, à la place que Balladur occupe aujourd’hui. Il y a donc une sorte de décalage entre l’image de Rocard et son poste de premier secrétaire du PS. »
    A-t-il eu raison, dans ces conditions, de prendre la tête du PS ? Réponse de Mauroy : « J’étais contre le coup de revolver, me répond-il, contre sa stratégie de meurtre au Parti socialiste... »
    Seul bon point : les États généraux de la gauche en juillet dernier. Depuis, la situation de la gauche, selon Mauroy, s’est à nouveau dégradée. « Celui qui avait annoncé le big-bang devait d’abord l’opérer au PS. Il devait aménager autrement la vie dans le Parti, il fallait rebattre les cartes. Rocard, finalement, n’a pas voulu. Fabius a fait allégeance. Jospin a marché derrière lui. Rocard a choisi le confort, il n’a pas voulu aller plus loin. Quand on pense qu’il a même repris, pour former le comité directeur, le décompte des tendances tel qu’il avait été fixé par le congrès de Rennes : 58 représentants de Fabius, 58 pour Jospin et 58 pour Rocard. J’en ai réclamé vingt pour mon courant : je pense ne pas avoir été trop audacieux ! »
    Rocard s’est donc lié les mains au lieu de conquérir sa liberté vis-à-vis du Parti. Le climat est au surplus exécrable, puisque les divisions qui ont suscité les affrontements à Rennes sont toujours là. « Fabius, qui dispose du quart du comité directeur, se tient en embuscade, Jospin et les rocardiens se surveillent. Le PS devrait se donner aux militants plutôt que de comptabiliser les courants. Il aurait fallu innover : élire, par exemple, un

Weitere Kostenlose Bücher