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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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des positions militaires. Chacun sait que Mitterrand était pro-serbe, et Kohl pro-croate. Voilà ce qu’elle a donné, l’Europe ! »
    Mêmes violentes critiques à propos de l’Europe de l’Est : « Notre principal ennemi, dit-elle, était à mes yeux le communisme. Pourtant, quand le communisme est tombé, nous n’avons tendu la main à aucun pays de l’Est ! » Elle continue : « J’avais sous-estimé la haine des Allemands de l’Est pour les Allemands de l’Ouest, qui avaient profité de la vie pendant qu’eux souffraient de la dictature. Et sous-estimé aussi la colère des Allemands de l’Ouest contre ceux de l’Est, qui leur coûtent cher aujourd’hui et qu’ils accusent d’avoir hier plié sous le joug. »
    « De toute façon, dit-elle, pleine d’ironie vis-à-vis d’elle-même, je ne peux ni ne veux prédire l’avenir. Tout ce qui m’est arrivé d’important pendant mes douze années de pouvoir, je ne l’avais pas prévu. Je n’avais pas prévu que les Russes envahiraient l’Afghanistan. Pas prévu que l’Irak et l’Iran se feraient la guerre. Pas imaginé non plus la guerre des Malouines. Et pas davantage la destruction du mur de Berlin. On ne prévoit jamais ce qui est le plus important. »
    Les premières paroles de Margaret Thatcher m’avaient paru abruptes. Le reste ne manque pas de vérité. Elle a dit tout cela sur un ton tranquille, so british , et l’on sent qu’elle a dit la même chose directement, dans les mêmes termes, à Mitterrand, à Kohl et aux autres.
    Je comprends ce qu’en a dit un jour Mitterrand : devant lui, quelqu’un, j’ai oublié qui, a déclaré qu’il la trouvait assez revêche. Mitterrand a répondu : « Détrompez-vous, elle a un charme fou ! » J’avais alors pensé que, décidément, on ne referait jamais Mitterrand dès lors qu’une femme, y compris celle-là, passe à sa portée... Aujourd’hui, je comprends mieux ce qu’il voulait dire. Je ne lui trouve certes pas un « charme fou », plutôt une présence, et, oui, une belle simplicité, quelque chose de très direct, sans détour, dans la façon dont elle s’exprime.
    15 novembre
    Le temps se gâte pour Balladur : les sondages se font moins bons. L’initiative prise par François Bayrou, au nom du gouvernement, de modifier la loi Falloux est diversement appréciée – mal, notamment, par les syndicats enseignants qui annoncent leur mobilisation contre le projet, lequel figurait pourtant au nombre des engagements pris par l’actuelle majorité lors de la campagne électorale.
    Pour le reste, il y a une telle différence entre la situation de 1986 et celle d’aujourd’hui que rien n’est comparable. Mitterrand ne se représentera pas, mais il a une réelle volonté et un véritable intérêt à effectuer son mandat jusqu’au bout. Autant dire qu’il ne veut ni susciter ni même exploiter le moindre dérapage, le moindre piège contre Balladur.
    C’est une différence plus qu’appréciable : Mitterrand ne veut en aucun cas reprendre la main.
     
    Vu longuement, une fois de plus, hier à l’Élysée, Maurice Bennassayag. À quelques phrases, je comprends que l’état de grâce dont Balladur a joui auprès de Mitterrand commence à s’effriter. « Balladur, me dit-il, c’est Philippe Noiret. Il peut jouer dans de mauvais films, tout en restant populaire. Il sait, poursuit-il, que 52 % des électeurs de gauche ont une bonne opinion de lui, parce qu’il n’attaque pas le Président. Il doit donc à Mitterrand une cote de popularité qui, sans lui, serait inférieure à celle de Jacques Chirac. »
    Cette appréciation émane directement, à mon avis, du Président lui-même, qui a dû faire partager son analyse à ses conseillers.
    J’en viens donc à la question : Mitterrand pense-t-il aujourd’hui que Balladur sera candidat ? Mon interlocuteur n’hésite pas une seconde : « Si Balladur avait envie de faire élire Chirac, il aurait hâté les échéances. Par exemple, il aurait proposé un référendum sur le droit d’asile. Il s’en est bien gardé... La France, soupire-t-il drôlement, est une divorcée de 55 ans qui s’est donnée à un notaire de province. »
    Oui, à l’Élysée, le ton vis-à vis de Balladur a nettement changé. Je m’interroge sur les raisons de cette évolution. Mitterrand, tel qu’on le connaît, n’a pas du tout apprécié que Balladur envoie directement une lettre à Clinton au sujet du GATT. C’est le

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