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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Deux-Sèvres, le Doubs : deuxième voyage du président de la République en province. En manteau long bleu marine, il passe les troupes en revue, profitant de son passage à Besançon pour rassurerceux des élus qui craignent les conséquences pour l’économie locale de la réforme de l’armée. Le président de la compagnie des bains-douches de Montbéliard lui présente des travailleurs en voie de réinsertion, qui fabriquent des décors de théâtre. Le Président embrasse une jeune fille, il fonce dans la foule ravie, y découvre Dominique Voynet, son adversaire écolo à la présidentielle, et dîne enfin avec les parlementaires de la région. La dernière fois, Ségolène Royal était à ses côtés. Hier soir, c’était au tour de Jean-Pierre Chevènement.
    Ce matin, j’ai appelé Chevènement au téléphone pour lui demander l’objet de leur discussion animée telle que les Français ont pu la voir au journal de 20 heures. Il me dit avoir surtout parlé des enjeux locaux, ceux dont Paris se fiche, et qui, pour lui, revêtent tant d’importance, notamment quand ils concernent le chômage et l’emploi dans sa région.
    Je remarque que Chirac prend grand soin d’avoir, autour des grandes tables des préfectures, un représentant de l’opposition à ses côtés. Il est le président de tous les Français, que cela se sache ! Il se veut surtout celui d’une classe moyenne, celle qui, d’ailleurs, sur son parcours, lui fait fête : moyenne économiquement, ni trop riche ni trop pauvre. Moyenne politiquement, entre la gauche et la droite. Moyenne géographiquement : celles des villes ni trop grandes ni trop petites. Sociologiquement : Chirac préfère les agriculteurs aux ouvriers, les petites et moyennes entreprises aux grands groupes dont il fait mine de ne pas connaître les patrons. Culturellement, enfin : Chirac n’est pas le président de l’élite, c’est sûr. S’il pensait l’être, Le Monde lui rappellerait tous les jours que ce n’est pas le cas.
    8 mars
    Il s’appelle Philippe Auberger, il est député de l’Yonne et rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Il vient d’atteindre, dans le microcosme politique, une célébrité qu’il n’aurait peut-être jamais obtenue autrement en se voyant déchargé, hier, par le secrétaire général du RPR, de ses fonctions de délégué général du mouvement gaulliste. Il se disait lui-même « chiraquien de cœur et balladurien de raison », définition commode dont il pensait qu’elle lui permettait de s’exprimer librement sur les mesures de relance adoptées par le gouvernement. Eh bien, il s’est trompé. AlainJuppé le lui a rappelé sans précautions. La sanction a eu, sur l’heure, valeur d’avertissement généralisé.
    La question est de savoir pourquoi, aujourd’hui, lui tenir rigueur de propos que tiennent, depuis la rentrée parlementaire de l’automne dernier, nombre de députés de la majorité. La réponse est simple : parce que le président de la République vient de conforter à plusieurs reprises ce Premier ministre que tout le monde, dans la majorité, croyait sur le départ. Du coup, Alain Juppé, qui ne se sentait peut-être pas à même de le faire auparavant, a sifflé la fin de la récréation à l’intention de tous ceux qui ne le ménagent pas. Il faut dire qu’il est commode, pour ceux des balladuriens qui sont à l’extérieur du gouvernement, de critiquer le Premier ministre. Plus commode, en tout cas, que de critiquer le président de la République.
    À ce propos, je m’amuse à opposer François Bayrou à François Léotard. Unis dans le même combat pour la présidence de l’UDF, ils divergent, au moins publiquement, sur le jugement porté sur le gouvernement pour une seule et bonne raison : l’un est dedans, l’autre est dehors.
    9 mars
    À trois semaines du conseil national au cours duquel doit être élu le nouveau président de l’UDF, je rencontre aujourd’hui François Bayrou. Il me parle longuement de ses ambitions pour le centre. « Un jour, me dit-il, nous gouvernerons la France, car celle-ci, comme l’a dit Giscard, doit être gouvernée au centre. À ceci près que le centre n’existe pas. Eh bien, je vais le construire ! Cela va prendre dix ans : derrière ce but-là, tout s’efface. »
    L’alliance avec Léotard lui convient à merveille. D’abord parce que c’est le seul moyen, c’est clair, d’évincer Valéry

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