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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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confectionner un pansement avec une chemise déchirée prise dans le ballot de vêtements et quelques parcelles d'un baume à base de graisse de mouton et de genièvre que possédait l'un des Écossais. Puis elles avaient, elles aussi, mangé un peu de pain et de fromage, bu quelques gorgées de vin avant que Mac Laren donnât le signal du départ. Catherine se sentait lasse. La fatigue de leur marche nocturne entre Vézac et Aurillac, jointe au choc du récent combat, l'avait épuisée. Un sommeil invincible s'emparait d'elle et elle avait une peine infinie à garder les yeux ouverts.
    Cette fois, elle monta en croupe derrière le chef d'escorte. Malgré les protestations furieuses de Gauthier, Ian Mac Laren avait décidé de s'en charger lui- même.

    — Ton cheval a déjà bien assez de ton poids, lui déclara-t-il sèchement. Il n'a aucun besoin de surcharge !
    — Elle ne tiendra pas derrière vous, rétorqua le Normand. Ne voyez-vous pas qu'elle tombe de sommeil ?
    — Je l'attacherai. Au surplus, c'est moi qui commande ici !
    Force avait été à Gauthier de s'incliner, mais Catherine avait intercepté au passage le regard chargé de colère qu'il adressa au jeune Ecossais et dont celui-ci, d'ailleurs, ne sembla nullement se soucier. Mac Laren appartenait vraisemblablement à cette catégorie d'individus qui n'hésitent jamais sur le chemin à suivre, s'y engagent avec résolution et ne reviennent jamais en arrière, quelles que puissent être les conséquences. Ayant solidement arrimé Catherine à lui au moyen d'une sangle, il prit la tête de la colonne. Les Écossais et les quatre fugitifs s'enfoncèrent au cœur de l'épais et redoutable Massif Central.
    Appuyée contre le dos de Mac Laren, Catherine se laissait aller au pas du cheval. La montagne déserte, les volcans éteints chevelus de forêts, étoilés de profondes vallées rocheuses, les enveloppèrent bientôt de leur silence que l'hiver rendait plus profond. Les rares hameaux, les burons isolés que l'on apercevait demeuraient clos, hermétiquement, sur la chaleur mêlée des hommes et des bêtes. Seuls, les minces panaches de fumée grise qui traçaient sur la neige leurs fugitives arabesques dénonçaient la vie. Dans les maisonnettes de lave noire, les paysans s'entassaient auprès de leurs petites vaches rousses et frisées qui, l'été venu, mettraient dans l'épaisse laine verte des prairies la tache ardente de leur pelage... Catherine pensa que ce rude pays était beau, même sous la neige qui en accentuait les lignes dures.
    Un curieux bien-être l'envahissait, malgré la douleur sourde de son épaule, malgré la petite fièvre qui montait dans ses veines. L'homme auquel elle était liée lui communiquait sa chaleur. Son torse vigoureux opposait une solide barrière au vent coupant. Elle y appuya sa tête, ferma les yeux. L'impression bizarre d'un lien, plus étroit que cette sangle de cuir, entre elle et cet inconnu lui venait... Pourtant, jamais encore elle n'avait vraiment regardé Mac Laren. Murée dans sa douleur hautaine, enfermée dans ses voiles noirs mieux que dans un couvent, les hommes qui gardaient Carlat, et surtout ces étrangers venus de loin, se confondaient devant ses yeux qui ne voyaient plus que l'invisible. Paradoxalement, l 'était sous cet accoutrement de garçon qu'elle réintégrait sa vraie nature de femme. Et, malgré l'amour désespéré, inguérissable, qui habitait son cœur, elle n'avait pu s'empêcher de remarquer l'étrange beauté de Mac Laren.
    De haute taille, sa minceur confinait à la maigreur, mais cette longue silhouette avait la souplesse nerveuse d'une lame d'épée. Le visage étroit offrait un arrogant profil d'oiseau de proie, une bouche serrée et des maxillaires carrés dénotant une obstination totale. Les yeux bleu glacier étaient moqueurs, sans tendresse, profondément enfoncés sous les épais sourcils clairs. Les cheveux, assez longs, étaient d'un blond pâle, ses lèvres se relevaient d'un seul côté, en un drôle de sourire en coin, insolent et bref, qui n'atteignait pas les yeux.
    Tout à l'heure, quand il avait saisi Catherine par la taille pour l'installer sur son cheval, il l'avait regardée profondément. Un regard qui perçait comme un poignard. Et puis il avait souri sans rien dire.
    Mais, devant cet inconnu, vaguement narquois, elle s'était sentie tout à coup bizarrement désarmée. Le regard de tout à l'heure semblait dire que, dépouillée de ses voiles de deuil, la

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