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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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après la messe. C'est à quoi le gouvernement polonais n'avait pas voulu consentir.
    Jeudi soir, le Général pèsera ses mots pour rédiger sa lettre de réponse au cardinal, sans la moindre allusion à la tristesse que lui inspire une intransigeance que mieux que tout autre il peut comprendre :
    « J'ai été très sensible aux voeux de bienvenue que vous m'avez adressés par votre lettre du 6 septembre. Soyez certain que ce que vous dites des liens si anciennement établis entre nos deux nations chrétiennes correspond à mes propres sentiments. C'est à la Pologne millénaire, qui a connu comme la France, et récemment en même temps qu'elle, tant de grandeur et tant d'épreuves, que j'ai l'honneur de rendre visite, avec l'espoir que l'amitié des deux peuples en sortira renforcée. »
    Hervé Alphand m'a dit l'autre jour : « Je ne peux pas entendre de Gaulle ou le lire sans avoir la gorge serrée. Il faut que je me force pour ne pas me laisser aller à pleurer. »
    C'est exactement ce que je ressens en entendant le Général qui dresse haut sa tête au-dessus du maître du Kremlin comme de celui de la Maison Blanche, et qui ne peut la dresser face à l'un que parce qu'il l'a dressée face à l'autre. Les super-grands ne l'impressionnent pas. Pour lui, ce qui est au-dessus de tous les grands, si grands soient-ils, c'est la liberté des peuples. Il appelle les Polonais à retrouver leur fierté nationale et leur indépendance. Et les Polonais, comme tous ces peuples auxquels il s'adresse ou vers lesquels il porte sa voix, l'écoutent dans la ferveur.

    « Vous êtes un peuple qui doit être au premier rang »
    Jeudi 7 septembre 1967 à 10 heures, le Général, Couve à sa droite et moi à sa gauche, faisons face à Ochab, flanqué de Cyrankiewicz et de Rapacky. Les deux Présidents s'accordent pour admettre le caractère intangible de la frontière Oder-Neisse entre Allemagne et Pologne, et pour affirmer que l'Allemagne ne saurait disposer en propre d'armes nucléaires.
    GdG : « Les frontières polonaises doivent rester ce qu'elles sont. À propos de la division de l'Allemagne, une solution doit être recherchée d'abord par les Allemands et dans le cadre d'une entente entre les Européens de l'Ouest, de l'Est et du Centre. La France est dans une situation exceptionnelle, car elle ne dépend de personne. Sa politique d'indépendance, de paix et de coopération n'est pas une politique facile, dans un monde où existent deux très grandes puissances, dont le poids se fait sentir aussi bien dans l'économie et les techniques que dans la politique.
    « La France a toujours voulu la Pologne alors que d'autres ne l'ont pas toujours voulue. À nos yeux, vous êtes une réalité populaire, solide, respectable et puissante, dans un monde qui doit être d'équilibre et d'indépendance ; vous êtes un peuple qui doit être au premier rang. »

    « Cracovie, capitale historique de la grande et chère Pologne »
    Vendredi 8 septembre 1967.
    De bon matin, nous quittons Varsovie pour Cracovie. Le Président Ochab accompagne le Général. L'Iliouchine 18 atterrit à l'aéroport de Cracovie à 11 heures. En mettant le pied sur le sol, le Général déclare : « Je suis heureux de me retrouver à Cracovie, que j'ai visitée il y a quarante-sept ans. » Aux souhaits de bienvenue dumaire de Cracovie, il répond: « J'ai dit que j'étais heureux et honoré, parce que Cracovie est la capitale historique de la grande et chère Pologne. Par-dessus tous les obstacles qui peuvent exister, nos peuples se retrouvent. Ils sont faits pour vivre ensemble et coopérer à l'avènement d'une Europe tout entière. »
    Les quinze kilomètres qui séparent l'aéroport de Balice du château de Wawel — la résidence des rois de Pologne jusqu'au XVII e siècle, où nous sommes hébergés — sont bordés d'une foule délirante.
    J'ai déjà raconté 5 ce que fut la visite de De Gaulle à l'université Jagellon de Cracovie. Comment les autorités avaient décidé que son discours à la jeunesse étudiante serait prononcé devant une cour déserte, et comment en effet, imperturbable, il parla pour les quelques doyens de faculté en toge. Il parlait de dignité, de liberté et d'avenir comme si une foule de jeunes l'écoutait, comme si son discours allait franchir les frontières, comme si la Pologne n'était pas toujours bâillonnée.
    Mais une nouvelle déception nous attend. Après avoir visité rapidement le château et la citadelle, nous nous

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