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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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absolument nécessaire. On pourrait aussi bien l'appeler autonomie de recrutement. Les facultés jouissent de cette autonomie pour le recrutement de leurs enseignants. Pourquoi ne pas l'étendre à celui de leurs étudiants? C'est le cas dans la plupart des universités du monde développé et libéral. Et cela crée une sorte de contrat entre l'étudiant et l'université — un engagement réciproque qui débouche sur la réussite. J' ai commencé de distiller mes idées pendant l'automne, dans la tournée qui m'a mené d'université en université, en octobre et novembre, prenant occasion des « séances solennelles » où doyens et professeurs en toge célèbrent leur rentrée annuelle.
    À Clermont-Ferrand, j'ai affirmé, le 14 octobre 1967 : « Faute d'une diversification et d'une orientation, l'enseignement supérieur continuerait de fonctionner comme une machine à exclure. »
    À Besançon, le 13 novembre 1967, j'ai déclaré: « Tout se passe comme si notre université organisait un naufrage pour repérer les meilleurs nageurs, qui seuls échapperont à la noyade. »
    Mais il ne s'agit pas de s'opposer à la « vague démocratique ». « L'élitisme n'est pas une réponse raisonnable », ai-je dit encore à Clermont. Partout je montre l'ampleur de la transformation nécessaire, dans les structures et les méthodes.
    À Orléans, le 3 novembre 1967, j'avertis : « Devant la jeunesse, une jeunesse qui refuse le tout-fait, une jeunesse ironique, vous êtes, nous sommes tous, non pas des distributeurs de certitudes, mais des professeurs d'inquiétude. » J'enfonce le clou à Besançon : « Il y a un fait nouveau : la jeunesse échappe au monde scolaire et universitaire où nous l'enfermons ; elle tend à s'organiser en dehors de lui. »
    À Rouen, je dénonce les « turbo-profs », qui, pressés de regagner Paris, concentrent leurs heures de cours sur une journée, et laissent à eux-mêmes les étudiants. Ici et là, je critique les cours magistraux et l'individualisme des enseignants.
    On m'écoute poliment. Mais cette mise en cause des habitudes de l'Université n'est pas du goût de ceux qui s'en croient la cible, sans bien sûr me rendre populaire auprès des étudiants, qui ne lisent pas mes discours! En Mai, bien des professeurs accusés de mandarinatdiront: « C'est la faute à Peyrefitte », comme si les étudiants avaient eu besoin de moi pour découvrir la désinvolture de l' appareil universitaire à leur égard. Cela a compté dans la solidarité paradoxale que tant d'universitaires ont montrée à l'égard des étudiants, s'efforçant de détourner vers le pouvoir politique la colère qui montait contre eux.
    Ainsi, pour moi, l'orientation n'est qu'une des façons, pour les universités, de renouveler leur prise en charge des étudiants. Il n'est pas question de contraindre les étudiants à suivre des études dont ils ne voudraient pas; ni que l'État se mette à les trier, comme des colis dans une gare de marchandises.
    Pourquoi ne généraliserait-on pas le système qui fonctionne, à la satisfaction générale, pour les grandes écoles, pour les classes préparatoires, pour les IUT, pour les écoles commerciales et professionnelles ? Chaque faculté serait libre d'accepter ou de refuser des bacheliers qui souhaitent s'y inscrire. Leurs effectifs seraient formés par la rencontre de deux libres volontés.
    Selon un système inspiré de celui qui fonctionne en Grande-Bretagne, et que j'ai fait étudier sur place par Bourricaud et Moret 1 , début décembre, chaque élève de classe terminale, avant même de passer le baccalauréat, se porterait candidat à quatre ou cinq établissements. Cette « pré-inscription » permettrait aux lycéens de réfléchir sérieusement à leur orientation, et aux facultés de se faire une idée des flux qu'elles auront à traiter. Cette orientation suppose une transformation du baccalauréat. L'examen ponctuel et dramatique serait remplacé par un « bac bilan » constitué tout au long des années de lycée.
    La diversification des voies offertes au bachelier accompagnerait cette réforme. Le nombre de places dans les facultés (enseignement long) devrait décroître ; celui des instituts universitaires de technologie (enseignement court) s'accroître : 225 000 places de plus en trois ans, ce qui permettrait d'absorber la moitié des bacheliers de 1967. Ceux qui seront refusés dans tous ces établissements devront entrer dans la vie active. Mais il leur serait

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