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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Écoutez, c'est votre affaire ; comme dit le Général, débrouillez-vous. »
    Mes réponses l'irritent. Comme nous tous, il est ballotté, selon les dernières informations et les derniers interlocuteurs, entre sa profonde tendance libérale, qui consiste à faire confiance aux jeunes et particulièrement aux étudiants, et son horreur du désordre, qui lui fait souhaiter des hommes à poigne et des mesures radicales. Il oscille d'une impulsion à l'autre. Il me fait précisément ce reproche, mais déteste que ce reproche puisse lui être fait.

    Marchais : « Ces pseudo-révolutionnaires doivent être énergiquement combattus »
    Paris, jeudi 2 mai 1968.
    Ce matin, j'écoute une intéressante interview de Raymond Aron par Yves Mourousi sur France Inter 2 .
    Raymond Aron : « J'ai tendance à croire que les étudiants français se sentiraient quelque peu humiliés s'ils n'avaient pas, eux aussi, leurs révoltés. Je dis les étudiants, car je ne suis pas sûr que l'on assiste au même mouvement de révolte dans la jeunesse ouvrière. (...) Les deux meneurs allemands, Dutschke et Cohn-Bendit, semblent avoir cette particularité que l'on attribue quelquefois aux Allemands de prendre terriblement au sérieux des activités qui ne sont pas si sérieuses que cela. »
    Sur le terrain, la journée commence sous le signe des affrontements entre militants d'extrême gauche et d'extrême droite.
    À 7 heures 45, on a pénétré dans le local du Groupe d'études de lettres de la Sorbonne, qu'utilisent des étudiants d'extrême gauche. On y a mis le feu et déposé la signature des militants d'Occident sur les murs : une croix celtique.
    Personne n'a vu ces incendiaires, dont le feu, vite étouffé dans ce local, va tout embraser.
    Curieusement, Occident, qui joue un rôle si décisif au début des troubles, va disparaître pendant tout le mois de mai et jusqu'à l'automne. Prudence ? Impuissance ? Connivence ?
    En signe de protestation, les Groupes d'études de lettres (FGEL) annoncent un meeting demain vendredi 3 mai, dans la cour de la Sorbonne : « Nous ne laisserons pas les étudiants fascistes maîtres du Quartier latin. » Mais ils prennent aussi la défense de Cohn-Bendit : « Jamais les étudiants ne permettront que la répression policière s'abatte sur un des leurs par le biais d'un tribunal universitaire. »
    En effet, huit étudiants contestataires, Cohn-Bendit en tête, ont reçu la lettre recommandée qui les convoque devant la commission disciplinaire pour le 6 mai. Eux-mêmes et leurs camarades comprennent vite que notre lourde machinerie leur offre une occasion de « nanterriser » Paris. Les enragés nanterrois ne seront pas jugés à Nanterre, où ils commencent à être isolés, mais à Paris, territoire où des forces fraîches peuvent alimenter la bataille.

    Nanterre, même jour.
    À Nanterre, le Mouvement du 22 mars a lancé une première journée de « lutte anti-impérialiste ». Un « service d'ordre » important rôde autour de la faculté, guettant l'arrivée des « fascistes ». Les « fascistes » ne montrent pas leur nez, mais les maos de la rue d'Ulm viennent offrir leur renfort : Cohn-Bendit les renvoie dans leur école. René Rémond tente de faire son cours. On lance un banc contre lui, on le hue, on l'expulse. Un bâtiment de la résidence est transformé en Fort-Chabrol. À 13 heures 45, un tract des « 22 mars » lance le mot d'ordre : « Hors de Nanterre les ratonneurs ! Les commandos fascistes seront exterminés. »
    Olmer et Roche se rendent à Nanterre en fin de matinée. Grappin ne voit pas d'autre solution que de suspendre les cours, comme en mars. On est à quinze jours des examens. La faculté peut à la rigueur rester fermée jusque-là : « D'ailleurs, après avoir marqué le coup, nous prévoyons de la rouvrir progressivement si la situation le permet. »
    Du bureau du doyen, Olmer me téléphone le projet de communiqué qu'ils ont préparé tous les trois :
    « Durant la journée du 2 mai, plusieurs cours n'ont pu avoir lieu du fait d'incidents délibérément créés et de menaces proférées envers des étudiants, des professeurs et des fonctionnaires de l'administration. Il apparaît à l'évidence que les libertés d'expression et de travail traditionnelles en usage dans les facultés sont ouvertement bafouées. En conséquence, après accord du ministre de l'Éducation nationale et du recteur de Paris, j'ai décidé de prendre les mesures suivantes : à partir du

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