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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Assuré de la clarté avec laquelle, à son habitude, il a donné ses instructions de fermeté, téléphonées à Joxe et à Tricot, il est allé se coucher vers 23 heures.

    Pompidou : « Tenez bon, l'heure des concessions n'est pas encore venue »
    Pompidou aussi, de Kaboul, a donné ses instructions, en début de soirée. Joxe, frappé de leur formulation, me les répète, telles que Jobert vient de les lui communiquer au téléphone : « Tenez bon, l'heure des concessions n'est pas encore venue. » Joxe se demande : « Pompidou se réserve-t-il de faire les concessions à son retour ? »
    Quand les rues du Quartier latin ne sont que gravats et voitures brûlées, il reste à obtenir le plus difficile : le retour à l'ordre universitaire. La négociation a échoué ; elle n'était pas possible avec les enragés. Il reste à tenter de déborder la petite masse des excités par la grande masse des étudiants. Il faut ouvrir une perspective, faire une offre publique. C'est cette démarche que j'entends soutenir auprès du Général.

    « Faut-il faire venir la troupe ? »
    Samedi Il mai 1968, matin.
    Joxe m'appelle. Il m'apprend qu'il a fait réveiller le Général pour qu'il n'apprenne pas les événements de la nuit par la radio. Le Général a convoqué aussitôt, à 6 heures du matin, Joxe, Messmer et Fouchet pour parler du maintien de l'ordre. Il a posé d'emblée la question qui le concernait directement, comme chef des armées : « Faut-il faire venir la troupe ? »
    Messmer s'y est opposé avec force. L'armée d'aujourd'hui n'est plus adaptée aux missions de maintien de l'ordre. Si on fait appel à la Légion ou aux paras, ils n'hésiteront pas à tirer, et le pire risqued'arriver. Quant aux régiments formés de jeunes du contingent, il faut craindre au contraire qu'ils se solidarisent avec les étudiants.
    De son côté, Fouchet me raconte qu'en entrant dans le bureau du Général, il a lancé : « Dieu merci, aucun mort ! » Il ajoute : « Le Général n'a pas relevé, mais il doit quand même se rendre compte que c'était la meilleure nouvelle possible. C'est miracle que, dans une pareille émeute, la police s'en soit tenue à une intervention à la fois mesurée et massive. C'est miracle que les seuls blessés graves soient de son côté. C'est miracle que les officiers de police aient eu assez de sang-froid pour adapter à tout instant leur tactique. »
    Le Général lui a dit : « Il faut donner de la gnôle aux policiers ! Ce ne serait pas payer trop cher leur moral. Ils le méritent. » Façon de dire qu'il faut leur distribuer des primes. En leur offrant des compensations financières, on les aiderait à supporter la dureté des affrontements.
    L'ordre a été maintenu. Et les forces de l'ordre n'ont pas infligé aux émeutiers seulement une raclée, mais une leçon. L'État dispose de cent mille gendarmes et de cent mille policiers, dont la moitié seraient rapidement opérationnels, sans parler des réservistes. Il est donc absurde de tirer de cette nuit la conclusion que la prochaine manifestation se rendrait maîtresse de Paris.
    C'est pourtant ce qu'on croit à Matignon, et dont on va convaincre Pompidou à son retour.

    « Si nous nous déculottons, il n'y a plus d'État »
    Samedi 11 mai 1968.
    Pendant ce temps, des prises de position innombrables me parviennent, condamnant « les brutalités policières ». Jacques Droz, professeur d'histoire contemporaine à la Sorbonne, me transmet une motion au nom de trois cents enseignants de la faculté des lettres, qui, « bouleversés par le massacre délibéré d'étudiants (sic), exigent la démission du recteur Roche, en qui l'Université ne peut se reconnaître ».
    Vers 10 heures, Marangé nous fait savoir que sa réunion de bons offices est reportée à 14 heures, et vers midi, que Geismar et Sauvageot se sont raidis et veulent un accord écrit avant tout contact...

    Le conseil de l'Université de Paris s'est réuni ce matin, sur le mode de la déploration. Il a prié le recteur et les doyens de demander d'urgence audience au chef de l'État, pour l'informer qu'il n'a plus confiance dans le ministre. Au cours de cette séance, je n'ai pas eu beaucoup d'avocats. Les doyens ne comprennent pas comment ce que j'avais annoncé solennellement à l'Assemblée nationale — ou du moins, la traduction simplifiée qui en avait étéfaite par la manchette de France-Soir — ne s'était pas réalisé. Ce qui prouve que le long coup de téléphone que

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