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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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les devants ; les autres, c'était plus difficile, puisqu'ils n'en avaient pas pris l'initiative. Et puis, il voulait désigner un universitaire médiateur, pour renouer avec les universitaires rebelles. Vous n'auriez pu accepter d'être privé de vos prérogatives. Mais il ne faut pas attacher d'importance à ces quarante-huit heures. Les révolutions vont vite. Les événements se précipitent sans que personne s'y attende. Ce qui compte maintenant, c'est l'avenir. Avec l'âge que vous avez, les horizons sont larges ; alors que pour moi, l'horizon est tout proche. »

    « Il ne m'a pas laissé le choix »
    Je laisse passer un silence, puis je reprends doucement :
    AP : « Ce qui m'a surpris encore, c'est que le Premier ministre vous ait fait accepter, le soir de son retour, beaucoup plus que ce que je vous avais proposé. Il a donné droit à toutes les revendications des étudiants sans aucune contrepartie, alors que vous veniez de me donner votre accord pour un plan soigneusement équilibré.
    GdG (d'un geste las). — Il ne m'a pas laissé le choix, il a mis son mandat dans la balance. Si je n'acceptais pas son plan, c'était une crise de régime. »
    C'est la première fois que j'entends parler d'une menace de démission du Premier ministre le 11 mai, pour le cas où le Général ne se rallierait pas à sa stratégie. Autant Pompidou et ses proches ont fait connaître la démission offerte par le Premier ministre le 30 mai pour obtenir la dissolution de l'Assemblée, autant ils ont été muets sur la démission qu'il aurait offerte le 11 mai.
    Il reprend :
    GdG : « La crise de régime, nous l'avons quand même eue. Il aurait peut-être mieux valu l'avoir ce jour-là. C'est le soir où Pompidou a rouvert la Sorbonne que l'autorité de l'État s'est effondrée. »

    Pas plus aujourd'hui que je ne l'ai jamais fait depuis plus de six ans, je ne vais critiquer le Premier ministre devant le Général. Je reste silencieux, stupéfait de l'entendre porter un jugement aussi sévère sur celui qu'il garde comme Premier ministre, devant quelqu'un qu'il ne garde pas comme ministre.
    Il reprend, sur un ton bienveillant, presque affectueux : « Mais vous restez avec moi. Vous êtes jeune. Vous avez de la chance. Je suis vieux. L'avenir est de votre côté. Pensez à ce qui vous attend pour un peu plus tard. Préparez-vous.

    « Je ne peux pas tenir tout le temps les Français à bout de bras »
    AP (pour faire diversion). — Finalement, il a suffi que vous claquiez dans vos doigts pour que tout rentre dans l'ordre ! L'immense majorité des Français ne voulaient pas de ce bazar.
    GdG. — Ils n'en voulaient pas, mais ils n'osaient pas s'opposer à ceux qui flanquaient le bazar. Ils ne faisaient rien contre les piquets de grève qui empêchaient la reprise du travail. Ils sont prêts à laisser le pays dépérir, quand des équipes décidées font ce qu'il faut pour ça.
    «Les Français ont toujours la tentation de s'abandonner. Comment voulez-vous que je les en empêche ? Ça a marché quelquefois, en 40, en 58, en 61, l'autre jour. Mais ça ne pourra pas marcher toujours. Je ne peux pas tenir tout le temps les Français à bout de bras. Je ne peux pas me substituer à eux. Et il faudra bien que les Français se passent de moi.
    AP. — En tout cas, ils sont bien revenus de leurs délires, ils sont sortis de leur apathie. Ils attendaient d'être commandés. Ils vont avoir dans chaque circonscription le choix entre un candidat qui s'engagera à soutenir votre gouvernement et un candidat qui soutiendra ceux qui veulent reprendre l'action révolutionnaire. Il n'y a pas de souci à se faire.
    GdG. — On verra bien. »

    « Vous avez été pris dans une tempête »
    Il met fin à l'entretien :
    « Je ne vais pas vous garder plus longtemps. Je vous ai écrit que je n'avais rien à vous reprocher. Je vous le répète, vous avez été pris dans une tempête où vous ne pouviez plus rien faire, sinon vous faire rouler par la vague. Maintenant, ce qui importe pour le pays, c'est de gagner les élections ; et ce qui importe pour vous, c'est de gagner la vôtre. Une élection, c'est un procès. On ne vous couvrira pas de fleurs. Vous serez sûrement très attaqué. Vos adversaires vous reprocheront tout et le reste. D'avoir été trop dur et d'avoir été trop mou. Tâchez de vous en tirer. C'est comme les ordalies au Moyen Âge. Venez dans quinze jours me raconter comment se passe votre campagne.
    « Si vous l'emportez, il faudra

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