C'était de Gaulle, tome 3
part dans des universités dont ils sont, eux aussi, les membres. Ils ont soif de dialogue, de ce dialogue qui a du mal à s'instituer entre professeurs et étudiants, quand la distance qui les sépare paraît infranchissable, quand certains professeurs ont l'air de se tenir pour quittes avec quelques heures d'enseignement, et que, trop souvent, ces heures ne sont qu'un épisode dans la vie de maîtres qui ne résident pas dans leur université, au milieu de leurs étudiants.
Les universités doivent devenir, ou redevenir, le lieu d'une rencontre entre partenaires, le lieu qui appartient en commun à ces partenaires.
Ensuite, les enseignants et les étudiants revendiquent que chaque faculté, que chaque université de telle ou telle ville puisse, quant à son administration, quant à ses finances, quant à son recrutement, quant à son enseignement, quant au contrôle de cet enseignement, disposer d'une véritable responsabilité. Nous ne sommes nullement fermés à ces perspectives.
Voici les principes sur lesquels le Gouvernement estime raisonnable de s'entendre avec tous ceux que l'Université concerne :
- Les universités sont le lieu où s'élabore et se transmet le savoir, et où se forment les cadres de la société. Elles ont donc deux fonctions — l'une proprement universitaire, au sens traditionnel du mot, l'autre sociale.
- Actuellement, ni l'Université de France ni les universitaires n'existent comme corps. L'Etat, représentant la société, tient les établissements et les professeurs de l'Université en régie directe. L'État commande aux professeurs, qui cherchent leur liberté dans l'individualisme, la méfiance ou la fronde. Les professeurs commandent aux étudiants, qui réagissent à leur égard comme les professeurs à l'égard de l'État.
Demain, chaque université, dans chaque région, devrait être constituée comme corps ; corps autonome et responsable : mais non pas corps isolé et en sécession par rapport à l'ensemble de la société. Cette reconstitution des universités exige donc une nouvelle définition des rapports entre la société, l'État, les professeurs et les étudiants.
Chaque université, chaque faculté, doit rassembler dans ses instances de réflexion et de décision les trois pôles : société, professeurs, étudiants. La nature de ces rapports est complexe à définir et à préciser en institutions viables. Rien n'interdit d'ailleurs qu'ils varient selon les universités ou les facultés.
À chaque faculté ou université, il appartient de préciser les objectifs, le contenu et les méthodes de son enseignement. Cette autonomie pédagogique va de pair avec une autonomie quant au recrutement — recrutement des étudiants et recrutement des enseignants : car étudiants et enseignants doivent correspondre aux types de formation offerts par l'université ou la faculté. Dès lors, est posé le problème de l'accès aux facultés mais aussi le problème de l'unité du cadre des enseignants, voire peut-être celui de leur appartenance à la fonction publique. Enfin, cette autonomie de l'enseignement et du recrutement doit s'accompagner d'une certaine liberté de gestion et d'administration, qui fasse de chaque faculté, de chaque université, un organisme pleinement responsable.
Ces deux fonctions de l'État—harmonisation des modes de fonctionnement et planification des objectifs et des ressources — il ne peut les assumer que dans un cadre nouveau, avec l'aide d'une instance nationale qui associe elle aussi les représentants des forces économiques, sociales et spirituelles de la société, les représentants de l'université enseignante et ceux de l'université étudiante.
Qui ne voit qu'une telle révolution pose d'immenses problèmes ?
Chacun en prend conscience dans les débats qui se sont ouverts, partout, depuis quelques jours. Il nous faut trouver une méthode pour tirer des idées claires de cette immense éclosion d'idées nouvelles — ou d'idées anciennes.
Nous souhaitons donc qu'au niveau de chaque faculté et de chaque université, la réflexion se poursuive et aboutisse à des propositions concrètes. Nous souhaitons qu'elle se poursuive entre tous les étudiants et tous les professeurs, organiquement, et qu'elle ne se fasse pas en vase clos, qu'y participent aussi les forces organisées de la société.
Au niveau de l'État, nous avons institué un comité de réflexion, qui peut être le modèle provisoire de cette instance nationale
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