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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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allés, en effet, beaucoup plus loin que je ne l'imaginais. Je prends note des points les plus significatifs.
    J'en retire une première impression : de Gaulle a beaucoup à faire pour convaincre les Soviétiques sur l'Allemagne. D'emblée, le Général a entrepris sur ce sujet ses interlocuteurs.
    GdG : « Voulez-vous que nous commencions par l'Europe ?
    Brejnev. —D'accord !
    GdG. — Êtes-vous dans le sentiment qu'il existe en Europe un état de choses définitif, en particulier en ce qui concerne les Allemands, ou bien pensez-vous que l'on puisse envisager un certain changement ? Si je pose la question, c'est parce que la situation actuelle en Europe, à l'Est et en Allemagne, résulte de décisions auxquelles la France n'a pas participé. La France était alors trop faible, trop endommagée par la guerre. Nous n'avons participé ni à Yalta ni à Potsdam. Vous, en revanche, vous y étiez et vous avez acquiescé à ce qui a été fait en Europe et en Allemagne. C'est pourquoi je vous demande si ce qui a été fait il y a vingt-deux ans est, à vos yeux, définitif, ou si vous considérez que des changements sont possibles. »

    Brejnev : « L'Allemagne reviendra-t-elle au nazisme ? »
    La question est en forme de piège. Les Russes ne peuvent méconnaître qu'il s'est passé bien des choses depuis Yalta : en s'en détachant, ils entrouvriraient la porte au dialogue. Mais la réponse de Brejnev ramène à Yalta, via l'Allemagne.
    Brejnev : « La RFA poursuit son chemin vers le nazisme. S'il n'y a pas de riposte, l'Allemagne reviendra-t-elle au nazisme ? Dans ce cas, Erhard ne résistera pas, et le problème sera résolu. Le gouvernement fédéral tolère en ce moment des réunions de nazis, d' anciens combattants de la dernière guerre, d'organisations qui font profession de réclamer les territoires perdus. Tout cela est inquiétant,et d'autant plus inquiétant que les États-Unis favorisent cette évolution de l'Allemagne. Si, à cette évolution intérieure de l'Allemagne, l'on ajoute la politique que suit obstinément la RFA pour obtenir l'arme nucléaire, on doit constater que plus l'on s'éloigne de la Deuxième Guerre mondiale, plus l'on s'approche d'une troisième guerre mondiale plus catastrophique encore.
    GdG. — Pour ce qui est de la sécurité en Europe, nous avons toujours pensé, comme vous, que le ferment de l'insécurité a été l'Allemagne. Nous avons souffert des guerres déclenchées par l'Allemagne en 1870, en 1914 et en 1939. Mais il y a aujourd'hui un autre élément dont il faut tenir compte et qui est l'existence de deux grandes puissances rivales dans le monde et en Europe. La question de l'Allemagne est devenue un accessoire de cette rivalité et, du même coup, entre dans un ensemble très différent. Pour nous, la question allemande fait partie de la rivalité entre l'Union soviétique et les États-Unis. Elle se présente sous un aspect intérieur et sous un aspect extérieur. À l'intérieur, il faut comprendre qu'il n'y aura pas d'évolution pacifique sans que les Allemands reçoivent une espérance de réunification. Cette réunification, nous ne la voulons certes pas sans conditions. L'Allemagne doit accepter ses frontières et renoncer aux armements nucléaires. Mais il faut lui laisser une perspective.

    « Il faut attirer la question allemande à l'intérieur de l'Europe »
    « Extérieurement, il est important de sortir le problème allemand de la contestation entre l'Union soviétique et les États-Unis et d'en faire ce qu'il doit être, c'est-à-dire un problème de bonne foi entre Européens. Il faut organiser la concertation et la consultation entre Européens, y compris les Allemands eux-mêmes. Il faut ménager la possibilité de considérer la réunification entre Européens, de telle manière que l'Allemagne ne soit pas, jour après jour, l'objet et l'enjeu de votre conflit avec les Américains.
    « Si vous voulez la sécurité, il faut attirer la question allemande à l'intérieur de l'Europe. C'est une question d'attitude. Nous avons été bien abîmés par l'Allemagne. Nous n'en avons pas moins fait notre paix avec elle. Certes, il faut faire attention. Mais il n'y a pas lieu de s'abandonner à l'angoisse. Nous souhaitons que, pour votre part, vous preniez une attitude plus cordiale. »
    Brejnev n'est pas un diplomate. Quand de Gaulle place sur le même plan les deux puissances antagonistes, les États-Unis et la Russie, il se rebiffe. Il repousse l'idée selon

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