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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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voulons placer l'Allemagne dans une situation telle qu'elle ne puisse pas s'armer atomiquement.

    « L'arme atomique est un grand malheur pour le monde »
    GdG. — Vous garderez votre armement et l'Amérique en fera de même, alors que pendant des années on a eu l'air de poursuivre l'idée d'un véritable désarmement. Ainsi, pour toujours, ceux qui ont la bombe la garderaient et ceux qui ne l'ont pas, ne l'auraient jamais. Il est difficile de considérer le monde de cette manière.
    Kossyguine. — Vous semblez dire que n'importe quel État peut avoir un armement nucléaire et que les autres n'auraient pas le droit de l'en empêcher. L' Allemagne aussi pourrait donc l'avoir si tous les pays avaient les mêmes droits. Ne vaut-il pas mieux arrêter leur nombre à cinq, sans les limiter dans leur perfectionnement. Par contre, si d'autres États acquéraient la bombe atomique, et si tous les États le pouvaient, ce serait la catastrophe. Aujourd'hui la Chine, demain n'importe qui.
    GdG. — Il est vrai que l'arme atomique est un grand malheur pour le monde. L' Amérique l'a inauguré, vous avez suivi. L' Angleterre aussi, car elle dépend de l'Amérique. Nous avons dû le faire pour assurer notre indépendance vis-à-vis des États-Unis.
    « L'on ne peut pas dire que certains pays en ont le droit et d'autres, non. En réalité, il y a des pays tels qu'il ne faut pas qu'ils aient la bombe. Et nous sommes d'accord sur le fait qu'il ne faut pas que l'Allemagne l'ait, car elle est l'Allemagne, elle a fait deux guerres mondiales et si elle avait un armement atomique, elle nous ferait courir les plus graves dangers. Il y a donc un intérêt politique à l'en empêcher. C'est une affaire d'intérêt politique. Mais, quant au droit, ou bien tous l'ont, ou personne ne l'a. Il faudrait qu'aucun pays n'eût le droit d'avoir un armement nucléaire. Nous en serions d'accord.
    « La Chine n'acceptera jamais un tel accord. Alors que ferez-vous ?
    Kossyguine. — La Chine ne signera pas, mais qu'est-ce que détient la Chine en matière atomique ? Nous le savons mieux que quiconque : elle ne peut rien donner car elle n'est pas prête. Certes, en y mettant le prix par la misère et la famine, tout pays peut fabriquer la bombe ; et c'est ce que fait la Chine aujourd'hui en se démunissant de tout et en causant un désastre économique. À l'heure actuelle, la Chine n'est pas en état de transmettre quoi que ce soit à un autre. Elle me fait penser à l'Égypte des pharaons, constructeurs de pyramides.
    GdG (décidant de résumer leur échange sur ce point, à sa manière). — Vous avez des clients, comme la Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie. En fait, votre arrangement consiste pour vous à déclarer que vous ne leur donnerez pas la bombe ; et pour eux, qu'ils ne la recevront pas. Les États-Unis ont leurs clients, comme l'Allemagne, le Japon. Pour eux aussi l'accord consiste à ne pas donner et à ne pas recevoir. Nous n'y voyons pas d'inconvénient. Nous, nous n'avons pas de clients ; nous n' avons donc pas avantage à signer un tel accord. Nous n'avons personne à qui donner la bombe. »
    Kossyguine doit se contenter de l'assurance que son projet de déclaration n'alimentera aucun contentieux avec la France, même si elle se refuse à le signer.

    « Il y a en Europe un désir de se retrouver indépendant et européen »
    Plus loin dans la conversation, je retiens ces autres échanges sur l'Allemagne : on sort du nucléaire pour aborder le politique.
    GdG : « Il y a en ce moment en Europe un désir croissant de se retrouver indépendant et européen. À cause de la guerre du Vietnam, les États-Unis sont en train de perdre moralement beaucoup de terrain en Europe. Cette guerre et la façon dont elle est menée ne sont pas bien vues, même si les gouvernements, sauf le français, ne le disent pas et même s'ils disent le contraire. Au fond, l'Europe n'accepte pas cette guerre. Comme ils ont beaucoup de besoins, militaires et autres, pour le Vietnam, les États-Unis s'intéressent moins directement à l'Europe : il y a peut-être là une occasion politique qui s'offre à l'Union soviétique et à la France d'organiser une politique plus européenne qui serait très bien vue en profondeur par beaucoup d'États de l'Europe occidentale.
    « Peut-être même par l'Allemagne, imaginez-vous. Celle-ci a éprouvé beaucoup de désillusions à l'égard des États-Unis et elle a besoin d'une nouvelle politique. Elle serait peut-être

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