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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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par les Américains est, comme disent les Anglais, très sophistiqué. Alors, pourquoi n' acceptons-nous pas ? Parce que cela ne nous servirait pas dans l'immédiat; et, dans l'avenir, nous ne savons pas exactement quelle voie nous emprunterons ; mais ce que nous savons, c'est qu'elle sera la nôtre.
    « Nous devons garder les mains libres. Or, c'est justement ce que les Américains veulent éviter. Ils ne veulent pas que leurs alliés disposent d'une indépendance stratégique, et donc politique. Ils se sont sentis, avec la crise de Cuba, capables de tenir tête aux Soviétiques, et même de les faire reculer. Ils en ont tiré la conclusion qu'ils n'ont aucune raison de se gêner vis-à-vis de leurs alliés. Ils sont résolus à abolir leurs alliés (il a bien dit abolir).
    « Dans un cas pareil, on survit ou on ne survit pas. Quand on est une nation comme la France, on ne peut accepter de disparaître.
    « Accepter l'offre américaine, ce serait la fin de toute possibilité d'action atomique indépendante, ou même autonome. Il nous faudrait mettre dans ce système nos propres forces atomiques, et les placer sous le commandement absolu des Américains. Il n'y a aucune raison pour l'accepter.
    « Les Anglais doivent aux Américains beaucoup de ce qu'ils ont ou de ce qu'ils auront. Pour le nucléaire, nous ne devons rien aux Américains, sauf des crocs-en-jambe. Pour nos expériences atomiques, ils ont fait tout ce qu'ils ont pu pour nous embêter, grâce à l'ONU, en suscitant des protestations comme celle du Nigeria 5 . C'est tout ce qu'ils ont fait pour nous.
    « À l'avenir non plus, nous n'aurons aucune raison d'entrer dans ce système. La Grande-Bretagne s'imagine avoir sauvegardé son autonomie, puisque le texte contient l'expression : "si ses intérêts suprêmes sont engagés ". Ce sont des mots. C'est de la poudre aux yeux. Comment pourrait-on briser une organisation faite pour la guerre et dans laquelle on serait entré ? Un système de défense, c'est un système concentré, imbriqué, complexe et qu'on ne pourra pas détruire quand on l'aura fait, même si on le veut.
    « Il nous est arrivé de reprendre une certaine autonomie par rapport aux Américains. À Strasbourg, Eisenhower a mis les pouces, parce que j'ai donné l'ordre à nos troupes de défendre Strasbourg quoi qu'il advienne 6 . Mais ce ne serait pas la même chose avec une force multilatérale intégrée sous direction américaine.

    « Messieurs les Anglo-Saxons, vous perdez votre temps »
    « Sur ce point fondamental, nous devons garder intactes nos possibilités de défense. Il est possible qu'on nous les dispute. Toute une campagne se développe, avec Lippmann, Alsop 7 , les officiels, les officieux.
    « Et les Anglais sont furieux de voir que nous ne mordons pas à l'hameçon où ils ont mordu eux-mêmes. C'est dérisoire !
    « Messieurs les Anglais, Messieurs les Anglo-Saxons, vous perdez votre temps ! votre argent ! Vous gênez la stratégie alliée !Car cette stratégie ne peut fonctionner que si des pays comme la France se sentent engagés par eux-mêmes et pour eux-mêmes.
    « Notre défense est la condition même de notre politique. Elle doit rester la nôtre. Il n'est pas sûr que les intérêts des Américains coïncident toujours avec ceux de l'Europe et de la France. Il est possible que les contacts actuels des Américains avec les Russes viennent le prouver un jour.
    « Il ne s'agit pas pour nous de nous doter d'une force équivalente à celle des Américains et des Russes. Nous ne sommes pas dans le domaine des armes conventionnelles, mais dans le domaine de la dissuasion. La question n'est pas de se hisser au même niveau que celui d'en face. La question est de représenter une capacité de représailles suffisante pour le faire renoncer à l'agression.
    « La dissuasion commence dès que l'on a la possibilité de tuer assez de gens chez l'agresseur pour qu'il soit persuadé que le jeu n'en vaut pas la chandelle. Il n'est pas nécessaire d'avoir une capacité atomique à la dimension de celle des Américains ou des Russes.
    « Quand on est sûr de pouvoir tuer (ce qui sera le cas avant sept, huit ou neuf ans) 40 ou 50 millions d'habitants chez notre agresseur, nous sommes assurés de ne pas être attaqués.

    « ... Si les Américains sont dans les coulisses »
    « Au contraire, nous cessons d'en être assurés si les Américains sont dans les coulisses ; car ils auront intérêt, ou croiront avoir intérêt, à nous

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