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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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premières questions. On va bien s'amuser.»
    En me raccompagnant, il me dit, la main sur la poignée de la porte :
    « Nous n'avons pas l'ambition de faire une force aussi puissante que celles des Américains ou des Soviétiques, mais une force proportionnée à nos moyens, à nos besoins et à notre taille. Même si elle est petite, elle sera redoutable, dès lors que nous n'hésiterons pas à nous en servir pour nous défendre contre une attaque. Nous y passerions peut-être, mais la moitié des Russes y passeraient aussi. Alors ils ne nous attaqueront pas.
    « Voyez-vous, la France est souveraine. Ou plutôt, elle le redevient,ce qui ne lui était pas arrivé depuis la Première guerre. Elle s'était blottie à l'ombre des Anglais dans l'entre-deux-guerres, puis des Américains après la Seconde. Tout ça, c'est fini. La France a fini de se blottir. »

    « Que va dire le Général ? »
    Le lendemain matin, 20 décembre 1962, Olivier Guichard 2 et Simone Servais 3 questionnent Pompidou : «Que va dire le Général ?
    Pompidou. — Je pense qu'il va chercher la détente. Faire du charme. Ce serait bien dans son caractère. De toute façon, on ne peut faire de réformes avant quelques mois, puisqu'on ne les a pas étudiées. Le moment est favorable à la politique du sourire. Les radicaux parlent de Monnerville en le traitant de "roi nègre" : " Il nous a mis dans une situation...", etc. Il faut profiter de l'état d'esprit des radicaux pour leur tendre la main.
    (Mutisme obligé. Comment dévoiler que le Général ne s'apprête nullement à faire du charme ni à mener la politique du sourire, sans vexer Pompidou, si susceptible ?)
    Simone Servais. — On me pose des questions : y aura-t-il un référendum sur l'Europe ?
    Pompidou. — Mais non, sur quel texte ?
    « Tout ça, c'est comme si vous demandiez si le Général aura bon appétit le 17 février. Il fait ses conférences de presse pour garder l'habitude, pour réchauffer l'atmosphère et pour résoudre des questions. Mais il est toujours plus ou moins imprévisible.
    « Un message à l'Assemblée ? Le Général se fout de l'Assemblée. Ce qui intéresse les journalistes, c'est : est-ce que le gouvernement est menacé ? Est-ce qu'il va tomber ? Comment la crise va-t-elle se déclencher ? Eh bien, il faut qu'ils se reconvertissent. Tout ça, c'est terminé ! Les problèmes politiques se posent en fonction des événements. On ne pouvait pas prévoir qu'il y aurait un référendum en octobre, parce qu'on ne pouvait pas prévoir l'attentat du Petit-Clamart. »
    Là encore, mutisme obligé... Pendant les trois quarts d'heure que nous passons à commenter la presse du jour, perplexité : le Général ne m'a pas donné mission de prévenir Pompidou. Mais la loyauté que je dois au Premier ministre me fait un devoir de révéler un minimum. C'est vraiment une procédure étrange.
    À la fin de notre petite réunion, je glisse à Pompidou que j'ai un mot à lui dire et le préviens des deux thèmes principaux. Il ouvre des yeux en porte cochère.
    1 Entretien de Gaulle-Macmillan du 3 juin 1962 au château de Champs, voir chapitre 4, p. 298.
    2 Chargé de mission auprès du Premier ministre.
    3 Chef du service de presse du Premier ministre.

Chapitre 9
    «POUR LE NUCLÉAIRE, NOUS NE DEVONS RIEN AUX AMÉRICAINS, SAUF DES CROCS-EN-JAMBE »
    Élysée, 3 janvier 1963. C'est le premier Conseil depuis l'accord de Nassau que le Premier ministre britannique a signé avec le président Kennedy le 21 décembre. Les Américains proposent à la France un accord analogue de coopération nucléaire : c'est la « force multilatérale ». Nous attendons tous la position que va prendre le Général.
    Mais d'abord, Couve expose le détail complexe de cet accord, ainsi que les avantages et inconvénients de son extension à la France :
    « Le gouvernement américain a annoncé, au même moment, qu'il renonce à construire le missile Skybolt 1 , qui devait équiper les forces aériennes britanniques, et qu'il propose de les remplacer par des fusées beaucoup plus puissantes, les Polaris 2 . La décision américaine est-elle une coïncidence fortuite avec le voyage de Macmillan ? Ou a-t-elle été annoncée intentionnellement à ce moment-là ? Cette affaire, en tout cas, a donné à la rencontre une touche dramatique.
    « La Grande-Bretagne cessera d'avoir des bombes transportées par des avions. Elle n'aura plus que des sous-marins nucléaires. Le tout sera inclus dans cette force

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