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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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qu'ils devraient gagner un million par mois. (Un silence.) En tout cas, il faut que le dialogue reprenne. »
    Un silence encore, puis il se raidit :
    « L'intérêt national passe avant les intérêts particuliers ! Il n'y a pas de dialogue qui tienne ! Il faut expliquer aux Français que les adversaires de l'État seront brisés, comme l'OAS l'a été.»
    Un silence encore, puis il reprend les chiffres :
    « Les représentants des mineurs proclament qu'ils ont un retard de salaires de 11 % sur EDF. Mais EDF équilibre son budget, alors que le déficit des Charbonnages a coûté 168 milliards d'anciens francs en 1962. Si on donne 11 % aux Charbonnages, les gens d'EDF vont en demander autant. Les professions se courent les unes après les autres. Il suffit de prendre une base de départ différente pour arriver à des résultats différents. Pourquoi torturer les chiffres ? Pourquoi les curés montent-ils en chaire ? Les députés gaullistes se nuisent, nuisent à l'UNR et nuisent à leur situation électorale quand ils volent au secours des revendications. »

    Pompidou : « Ni laisser faire , ni dramatiser »
    Le mardi matin 12 mars 1963, Pompidou, soucieux, me demande : « Quand un gouvernement a-t-il réglé correctement une grève ? En tout cas, je ne serai pas un second Jules Moch 2 , je ne tirerai pas sur les grévistes.
    « Il y a un risque croissant de politisation. Il faut mettre l'accent, dans les journaux, à la radio, à la télé, sur le risque de provocation de l'OAS. Il faudrait que la RTF inquiète l'opinion, en prévenant que la grève des mineurs se prête à une action de l'OAS. »
    Là-dessus, il me dévoile son plan d'ensemble :
    « Des contacts souterrains ont repris. Il n'y a pas de discussions officielles. On discute d'un protocole qui réglerait simultanément la levée de la réquisition et la perspective d'un arrangement, de manière à éviter une perte de face de part et d'autre.
    « Le retard dans le salaire des mineurs est de l'ordre de 5 %, nous admettons ce principe. Mais il sera couvert sur deux ans, avec une procédure d'arbitrage. Les 3 % prévus en sus seront augmentés s'ils acceptent d'arrêter leur grève.
    « J'ai l'impression que ces propositions seront admises par les mineurs et qu'ils accepteront le protocole. C'est une affaire de face, comme la paix des braves pour les fellaghas. Il y a des intermédiaires bénévoles qui se livrent à des missions secrètes, comme Bousch et Carous 3 . On est dans la bonne voie. Mais personne ne voudra dire que l'UNR a joué un rôle utile.
    « Le Général ne peut intervenir que si c'est le grand rififi et que s'il a la certitude que son intervention sera suivie d'une réussite. Il faut que tout le monde se rallie à son appel, pour que son autorité en sorte renforcée et non diminuée par les rancœurs suscitées.
    « Si l'affaire dure, on constatera de plus en plus de fermetures d'usines et de restrictions. Le charbon est livré au compte-gouttes. Les livraisons de charbon russe sont arrêtées, à cause des dockers qui ne veulent pas décharger, par solidarité avec les mineurs. Le charbon américain, de même. Maintenant, ça touche les foyers domestiques. S'il y a grève de la SNCF, ce sera le bordel absolu.
    « Mon intervention à la télévision n'a pas produit d'effet. Ils'agissait simplement de préparer le terrain à l'intervention du Général, quand il pourra taper du poing sur la table et dire : "Voilà ce qui est raisonnable, nous faisons un gros effort, nous ne pouvons pas aller au-delà, et maintenant, les enfants, au travail ! "
    « Il faut se garder des deux extrêmes : ni laisser faire, ni dramatiser et aller vers les mesures brutales. Nous avons un problème à résoudre. C'est normal qu'on en rencontre. Il faut lui trouver une solution raisonnable. Il faut régler cette affaire avec bon sens et éviter la douche froide qu'affectionne la presse.
    « Rueff nous embête beaucoup. Sa thèse est simple et même simpliste. Selon lui, la hausse des salaires dans les Charbonnages s'explique par la pénurie de main-d'œuvre en France ; les salaires croissent plus rapidement que le prix mondial du charbon ne le permet. Allons-y gaillardement : importons de la main-d'œuvre maghrébine. Il se fiche des conséquences. »
    Rueff est vraiment sa tête de Turc. Envers les mineurs, les journalistes, les députés démagogues, Pompidou est indulgent : ils ne se battent pas dans la même catégorie que lui. Rueff est dans sa

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