C'était de Gaulle - Tome II
l'indépendance nationale, celui qui a dit non aux Russes.
GdG. — Peu à peu, l'Internationale devient le nationalisme. La Roumanie, la Pologne, la Hongrie, aspirent à l'indépendance. Elles s'en saisiront dès qu'elles en auront la force. »
Au Conseil du 28 avril 1965 , le Général décortique la bonne volonté dont Gromyko a fait preuve lors de sa visite en France :
GdG : « Gromyko avait sûrement des consignes de politesse et de prévenance. Il est évident que les Russes ont un désir de contacts singuliers avec nous. La Russie donne une impression différente de celle qu'elle donnait il y a quelques années. Elle est moins sûre d'elle qu'elle ne l'a été, à l'intérieur d' elle-même comme à l' extérieur. Elle craint l'Allemagne. Elle attache une importance particulière à la France. C'est dans cet esprit que Gromyko est venu, qu'il nous parle, qu'il manœuvre. Il a quelques espérances, pour l'avenir, sur un accord général qu'il fonde sur nous. Pour le moment, c'est très théorique et lointain. »
Échaudé par le premier traité, celui de 1944, de Gaulle est prudent. Mais, pas plus qu'il ne faut être naïf, il ne faut, selon une de ses formules favorites, « insulter l'avenir ».
1 Voir partie IV, chapitres 13 à 15, la chronique de l'aventure du SECAM, de mars 1964 à avril 1966.
2 Voir infra, p. 390.
3 Vice-ministre des Affaires étrangères, adjoint de Gromyko.
4 Ministre des Postes et télécommunications.
IV
« IL FAUT BIEN QUE L'INTENDANCE SUIVE »
LE PLAN DE STABILISATION
Chapitre 1
« TOUT LE MONDE DOIT S'APERCEVOIR QU'UN JOUR, IL FAUT PAYER »
Matignon, vendredi 3 mai 1963.
Lors de notre conversation du matin, Pompidou me confie son agacement au sujet de Giscard : « Il vient d'annoncer à la commission des Finances qu'il lancerait "un petit emprunt" en bons du Trésor. Un milliard ! Il ne m'en a jamais parlé. Et pourtant, le comité d' avant-hier était fait pour préparer ce genre de mesures. Il pousse loin l'insolence. Il est vrai que ça lui réussit. On dirait que le Général aime ça. »
De fait, en comité restreint à Matignon, avant-hier 1 er mai, Giscard nous a simplement annoncé qu'il faudrait « trouver trois milliards ». Il avait précisé : « L'opinion publique a soutenu la grève des mineurs. On va présenter la facture aux Français. Il faut leur montrer qu'on ne se moque pas impunément de l'autorité de l'État, et qu'on doit ensuite accepter la sanction. »
Au Conseil du mardi 7 mai 1963, Giscard : « L'expansion se poursuit, malgré la grève des mineurs. Nous dépassons quatre milliards de dollars de réserves. Nous allons procéder à un nouveau remboursement de la dette extérieure.
« Pourtant, le sentiment s'est répandu que l'inflation nous menace et que nous risquons d'entrer dans le cycle infernal, comme autrefois. Or, nous sommes dans une situation très différente de la crise de 1956-1958 : frontières ouvertes, solidité de la monnaie, déficit en francs constants moitié de ce qu'il était en 1957. Un mauvais climat psychologique se développe à partir de données de fait fondamentalement bonnes.
« Comment expliquer ce contraste ? Par la facilité des prix et des salaires. Les entreprises ont pris de mauvaises habitudes. Il faut donc les taxer, pour les obliger à restituer à l'économie leurs gains de productivité.
GdG (qui a écouté Giscard avec un plaisir évident). — Vous proposez de taxer les entreprises dont les gains sont distribués en rémunérations, ce qui fait monter les prix et les salaires ?
Pompidou (sec). — Je ne me rallie pas à cette mesure.
GdG (qui craint visiblement que ne soit éludée la question qui le préoccupe). — Si nous jouons seulement sur tels crédits ou sur tels droits de douane, nous ne pourrons pas obtenir les mêmes résultats que par un plan global, comportant des mesures générales.
Pompidou. — Il ne faut pas pénaliser les efforts de productivité !On dira que nous frappons les ouvriers ! Évitons une mesure qui aurait un aspect antisocial, et que le président du patronat a déjà dénoncée. »
Le Général conclut : « Il faut élaborer un plan d'ensemble, auquel nous devrons nous tenir pour être efficaces. Tout le monde doit s'apercevoir qu'un jour, il faut payer. »
Après le Conseil, le Général me dit :
« Nous sommes en plein emploi. Vous verrez même qu'il y aura insuffisance des effectifs en 64 ou 65. Mais l'opium de l'inflation nous guette. Il faut prendre
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