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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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mes collègues de défendre des prix agricoles trop élevés.
    « Il y a une profonde inquiétude dans l'agriculture française. Les élections aux chambres d'agriculture et à la FNSEA ont montré que les partisans des prix élevés ont maintenu leur emprise. (Le Général ne cille pas, mais j'ai le sentiment que Pisani vient de prononcer une phrase de trop.)
    « Un gros effort sur le prix de la viande est une nécessité, à la fois pour la paix immédiate, et pour l'orientation de l'avenir. Nous ne pouvons pas nous dissocier complètement des Allemands.

    « Vous comparez des situations qui ne sont pas comparables»
    GdG. — Vous comparez des situations qui ne sont pas comparables. Notre pays produit tout ce qu'il consomme et exporte beaucoup. Les Allemands consomment beaucoup plus qu'ils ne produisent. Ils exportent peu de produits agricoles, mais beaucoup de produits industriels. Leur système n'est pas exportable en France.
    « Finalement, ce que les Allemands paient pour leur nourriture n'est pas aussi élevé que ce que les Français paient pour elle, et pourtant les prix chez eux sont plus hauts. Ils peuvent se le permettre, parce qu'ils importent beaucoup d'aliments à bas prix au cours mondial, qui leur sont vendus en échange des produits industrielsqu'ils exportent également au cours mondial, très avantageux pour eux. Ils gagnent sur les deux tableaux. Ils exportent beaucoup plus de produits industriels que nous, et ils importent beaucoup plus de produits agricoles à bon marché que nous. Nous devons faire face à une situation difficile par rapport à eux. Nous devons non seulement absorber la production de nos agriculteurs, mais écouler coûte que coûte leurs surplus. »
    Quelle leçon ! Il est vraiment fort en thème. Puis, se tournant vers Pisani :
    « Vous vous retrouvez entre agriculteurs et vous ne voyez que la question de vos prix. Mais vous êtes le ministre de l'Agriculture, vous n'êtes pas ministre des agriculteurs ! Vous n'avez pas à vous soucier de leurs élections internes ! »
    «Vous n'êtes pas ministre des agriculteurs. » J'ai souvent repensé à ce mot cruel, qui visait Pisani ce jour-là, mais nous atteignait tous.

    « Il faut des années ? Raison de plus pour s'y mettre tout de suite »
    Pisani (sur un ton tragique). — Nous irons vers des catastrophes sociales en mai ou juin, mais j'aurai prévenu.
    GdG (agacé). — Oui, oui, mais ce ne sera pas la première fois que vous nous aurez annoncé des catastrophes. Pendant des années, nous avons été tympanisés par vos agriculteurs, qui ne pouvaient aller qu'à l'explosion si on n'augmentait pas les prix. On ouvre l'Europe à la viande française: qu'ils vendent donc de la viande! Ils n'ont pas besoin d'être entretenus dans le malthusianisme par une politique de prix élevés et de marché protégé, alors qu'ils ont maintenant de larges débouchés ! C'est un changement complet de la condition agricole que nous sommes en train d'opérer par le Marché commun! On n'en parle pas ! Il semble que tout ce que nous faisons pour eux ne compte pour rien et qu'on doive rester dans le petit protectionnisme, pour que notre petite agriculture ne change rien à ses petites habitudes, ni à ses structures héritées de grand-papa !
    Pisani. — Pour changer des habitudes et des structures et tout simplement pour produire de la viande, il faut des années.
    GdG. — Il faut des années ? Raison de plus pour s'y mettre tout de suite ! On vit dans des mythes qu'on entretient soigneusement ! C'est dangereux pour les agriculteurs eux-mêmes ! C'est une escroquerie morale d'essayer d'ameuter les gens sur la misère des campagnes.
    Pisani. — Si la situation des agriculteurs était tellement sensationnelle, il n'y aurait pas 140 000 personnes qui quitteraient l'agriculture chaque année, contre 70 000 prévues par le Plan.
    GdG. — C'est un mouvement mondial qu'il est impossible d'empêcher. Sans doute même n'est-il pas assez rapide chez nous. C'est tout simplement l'effet de la modernisation de l'agriculture. Nous avions des paysans qui n'avaient guère changé depuis des siècles. Ils disparaissent, pour laisser la place à des exploitants. »

    Après le Conseil.
    Le Général : « Dites bien que les décisions sont prises et seront rendues publiques incessamment, après une mise au point des modalités techniques. Qu'on ne s'imagine pas qu'on va pouvoir faire pression sur le gouvernement pour qu'elles changent.. »
    Et il récapitule

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