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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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décourager.
    AP. — Vous annonceriez une aide collective de l'Europe?
    GdG. — Je ne suis pas en mesure de dire ça ! Si un jour l'Europe veut faire comme nous et se livrer à des entreprises collectives, alors ça irait beaucoup mieux. Tout se tient. En même temps que nous essayons d'organiser l'Europe, nous devons nous projeter à l'extérieur. La meilleure façon de bâtir l'Europe, c'est que les Européens bâtissent ensemble hors d'Europe. »

    « Je ne tiens pas à rendre moi-même ces drapeaux »
    Un an a passé depuis que le Général m'a parlé des drapeaux du Mexique. L'affaire vient au Conseil du 26 février 1964. Messmer l'expose avec une froideur qui masque son émotion d'ancien colonel de la Légion étrangère : « Il y a cent ans, l'armée française (il ne dit pas "la Légion") s'était emparée d'un certain nombre d'emblèmes militaires mexicains. La plupart sont des fanions en loques. Quand on les déplie, ils tombent en poussière.
    « Trois emblèmes seulement sont d'un intérêt certain. Les Mexicains nous suggèrent de renvoyer ces trois drapeaux. Comme cette campagne n'a pas eu de suite...
    GdG. — Si, elle a eu des suites ! Il y a toujours des suites. Tout s'enchaîne en histoire. L'expédition a instauré Maximilien, le général Weygand a été la suite de Maximilien, et l'armistice de 40 a été la suite de la nomination de Weygand comme général en chef 5 . » (Rires.)
    Messmer ne rit pas et reprend, comme s'il n'avait rien entendu : « Puisque cette campagne n'a pas eu de suite, j'enverrai un officier général remettre ces trois drapeaux aux Mexicains.
    GdG. — Je ne tiens pas à les rendre moi-même. »
    Messmer a eu l'élégance de prendre toute cette affaire sur lui. Par sa plaisanterie désinvolte, le Général a trahi sa gêne. En passant outre, Messmer donne une leçon de discrétion et de maîtrise. Le Général encaisse et, comme pour s'excuser auprès de son ministre, révèle à tous son souci personnel.
    L'honneur est sauf. Celui des armées françaises et de leur chef : l'affaire aura été réglée avant son arrivée, sans qu'il ait à « porter ces drapeaux dans ses valises ». Mais aussi l'honneur des Mexicains, réparé après cent ans. Toujours, respecter la dignité des peuples.

    « Nous nous présenterons comme l'avant-garde de l'Europe »
    Salon doré, 11 mars 1964.
    AP : « Qu'allez-vous annoncer, la semaine prochaine, à Mexico ? Les Américains redoutent votre voyage.
    GdG. — Ils ont la manie de la persécution. C'est pas sérieux.
    AP. — Ils ont peur que vous mobilisiez l'Amérique latine contre eux.

    GdG. — Elle est mobilisée contre leur système de colonisation par féodaux interposés. Tranchons le mot : les Yankees sont insupportables à l'Amérique latine. Naturellement, ces pays prennent l'argent américain, mais ils s'en veulent. Et ils reprochent aux Américains de les réduire à la mendicité.
    AP. — Vous risquez d'être le facteur de cristallisation.
    GdG. — L'issue, pour l'Amérique latine, ce n'est plus le dialogue avec seulement les Yankees, c'est une situation internationale dans laquelle l'Amérique latine aura affaire aussi à l'Europe. Alors, nous nous présenterons comme l' avant-garde de l'Europe. »
    1 Ambassadeur de France à Mexico de 1962 à 1965, gaulliste de la première heure.
    2 Adolfo Lopez Mateos, Président du Mexique, viendra en France du 26 au 29 mars 1963.
    3 Dans la conversation courante, le Général parle toujours en anciens francs et en anciens centimes.
    4 Voir p. 507.
    5 Le Général ne fait-il que traduire l'opinion commune selon laquelle le général Weygand serait le fils naturel de l'impératrice Charlotte, épouse de Maximilien, ou en sait-il davantage? Weygand lui-même n'aurait jamais réussi à élucider l'énigme de sa naissance.

Chapitre 17
    «POUR LES MEXICAINS, LA FRANCE EST L'INCARNATION DE L'IDÉE NATIONALE »
    Pointe-à-Pitre, 20 mars 1964.
    En attendant le départ du cortège, le Général, arrivé de Mexico cette nuit, nous fait asseoir, Jacquinot et moi.
    Jacquinot: «Pourquoi avez-vous soulevé un pareil enthousiasme ?
    GdG. — Parce que c'est la France. Pour les Mexicains, la France est l'incarnation de l'idée nationale.
    AP - Vous avez bien fait d'aborder l'Amérique latine par le Mexique?
    GdG. — Le Mexique est différent des autres pays, d'abord par la stabilité. Comment voulez-vous sortir du sous-développement sans la stabilité ? Pour un pays misérable, la stabilité et

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