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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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italien finit par consentir à céder le N-1 à l’Aéro-Club norvégien. Le 10 avril 1926, le dirigeable, rebaptisé Norge , quitte Rome sous le commandement de Nobile. On retrouve Amundsen à la baie du Roi ainsi que l’Américain Ellsworth qui finance l’entreprise.
    Le 11 mai 1926, à 8 h 50 G.M.T., Nobile donne l’ordre : « Lâchez tout ! » Pour gagner le pôle, il y a 1 280 kilomètres à parcourir. Nobile notera sur son carnet de bord : « 12 mai 1926, 1 h 30 G.M.T. PLANTÉ AU PÔLE LE DRAPEAU ITALIEN . »
    Ensemble, d’une altitude de 200 mètres, Amundsen, Ellsworth et Nobile ont fait descendre solennellement sur le pack leurs pavillons respectifs : le norvégien, l’américain, l’italien. « Le rite accompli, écrira Nobile, le cœur plein de joie et de fierté, je donnai l’ordre d’accélérer la marche, tandis que le dirigeable mettait le cap sur les côtes de l’Alaska. »
    Pour la première fois, des hommes viennent de survoler le pôle  (41) .
     
    La gloire. Quelques heures après l’arrivée du Norge en Alaska, rejointe après de graves difficultés, mais rejointe, le nom de Nobile est sur toutes les lèvres, sa photographie à la « une » des journaux des cinq continents. Au point que cette célébrité soudaine porte ombrage à Amundsen qui répète que l’organisateur, l’explorateur, le découvreur, c’est lui – et que Nobile n’a été que le pilote d’une expédition mise sur pied par lui seul, Amundsen. Une tournée triomphale de l’Italien à travers les U.S.A portera à son comble l’exaspération de l’Aigle blanc. Dans le récit qu’il publiera, les critiques à l’égard de Nobile se voudront si nombreuses, si démesurées que nous ressentons quelque malaise à voir un si grand homme se laisser aller à tant de mesquinerie.
    Paradoxalement cette gloire, qui rejaillit pourtant sur l’Italie, ne sera pas davantage du goût du gouvernement italien. Un homme comme Italo Balbo, par exemple, supporte mal ce démenti infligé avec tant d’éclat. Les fascistes ne veulent pas oublier que le constructeur du Norge est un libéral, qu’il passe même pour « socialiste », qu’on le sait à tout le moins fort réticent à l’égard des dictatures. Le comble est que, pour satisfaire l’opinion, il faut fêter publiquement cet homme que l’on n’aime pas. Mussolini lui ouvre les bras. On le décore de l’ordre de la Maison de Savoie, on le fait même général. On n’en pense pas moins. Au premier incident, à la première fausse manœuvre, on se promet bien de faire payer cher à Umberto Nobile son triomphe intempestif.
    Et Nobile ? Le Japon l’invite à construire des dirigeables pour sa marine. Il accepte, heureux de s’évader pour un temps du climat délétère qui se lève en Italie fasciste. À Tokyo, c’est le même rêve qui le poursuit. Il ressemble à tous ces hommes qui, d’un premier contact avec l’Arctique ou l’Antarctique, ont éprouvé un tel choc qu’ils ne songeront plus qu’à le ressentir de nouveau. Nobile se range désormais parmi ces passionnés du pôle qui, à peine rentrés d’une expédition, n’ont de cesse d’en mettre une autre sur pied.
    Retourner au pôle ? Nobile y est résolu. Son premier vol a démontré que le pôle peut constituer une route . Cependant on ne s’est pas arrêté, on n’a procédé à aucune de ces observations qu’attendent impatiemment les scientifiques. Il reste à explorer les vastes régions inconnues de la calotte glaciaire, atterrir au pôle, y laisser plusieurs jours s’il le faut des hommes qui, munis de tous les instruments nécessaires, se livreront à d’inestimables repérages.
    Les attaques d’Amundsen ont-elles porté ? C’est possible, car cette fois Nobile entend paraître comme seul chef d’une expédition qu’il veut, en fervent patriote qu’il est, exclusivement italienne.
    Dès son retour en Italie, il se livre corps et âme à son grand projet. Il met au point le dirigeable qu’il baptise l’ Italia . Il sélectionne son équipage. Il s’adresse à quatre des mécaniciens qui l’avaient accompagné sur le Norge. Sont-ils prêts, sous ses ordres, à courir des risques encore plus grands ? D’enthousiasme, ils acceptent. Ils se nomment Arduino, Caratti, Pomella, Alessandrini. En cas de défaillance de l’un d’entre eux, il lui faut un remplaçant. C’est Calisto Ciocca qu’il choisit ; il a accompagné le Norge jusqu’à la baie du

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